Cameroun: Guy Gweth - L'intelligence économique est une activité de renseignement

23 Octobre 2023
interview

Le président du Centre africain de veille d'intelligence économique (Cavie) parle du Festival de l'intelligence économique francophone qui se tiendra le 2 novembre prochain à Yaoundé.

Président, plus que quelques jours, et le Cavie organisera le Fief. Comment le Cameroun prépare-t-il cet événement ?

Avec gravité et sobriété. Si nous en arrivons à parler de festival, c'est par-dessus tout pour attirer l'attention des pouvoirs publics et du monde de l'entreprise sur l'urgence de politiques publiques et d'unités opérationnelles d'intelligence économique tant au niveau national qu'à l'échelle des acteurs économiques pris individuellement. L'exacerbation de la compétition sur nos marchés nous presse. En vérité, s'il n'y avait pas urgence, nous n'en parlerions pas en public pour la simple raison qu'aucun compétiteur normalement constitué n'expose ni sa stratégie, ni ses méthodes, ni ses outils. A moins d'une manoeuvre visant à distraire ou à tromper l'adversaire. Au reste, n'oubliez jamais que l'intelligence économique est une activité de renseignement, certes légale, mais sensible pour nos Etats et nos entreprises, qui doit être protégée.

Quelles seront les innovations de cette 2e édition ?

Les principales innovations de cette édition résident dans l'implication du gouvernement camerounais, des organisations internationales et des représentations diplomatiques. C'est le lieu de saluer, à l'échelle des pouvoirs publics, la remarquable contribution du ministère camerounais de l'Economie, de la planification et de l'aménagement du territoire dont le numéro un, Monsieur Alamine Ousmane May, signe la préface du livre blanc qui comprend l'ensemble des travaux et recommandations de cette seconde édition du FIEF.

Notre gratitude et nos félicitations vont également au ministère des PME, de l'économie solidaire et l'artisanat, ainsi qu'au ministère du Tourisme et des loisirs qui sont impliqués dans la réussite de cet évènement international dans la mesure de leurs possibilités. Enfin, la participation des ambassades du Congo, de France et de Tunisie, notamment ; ainsi que le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), de l'Organisation des Nations Unies pour l'éducation, la science et la culture (UNESCO) de la Banque africaine de développement (BAD) sont un signal extrêmement fort de l'intérêt grandissant de ces acteurs de premier plan pour l'intelligence économique.

Il est question du Festival de l'intelligence économique francophone. Comment en est-on arrivé là et quelles solutions ces rencontres apporteront dans l'écosystème de l'intelligence économique ?

Nous sommes partis de deux constats. Le premier est que l'Afrique est l'avenir de la francophonie. Mathématiquement, démographiquement parlant. De 321 millions aujourd'hui, la population de cette communauté atteindra 700 millions en 2050. Plus de 85% de ces individus vivront sur le continent noir. Le second constat est que cette communauté francophone, si elle était aussi intégrée économiquement que ses concurrentes de type Commonwealth, elle pourrait devenir plus compétitive, plus attractive et plus propice au bien-être de ses citoyens. Devant l'analyse de ce double constat, nous avons estimé que lorsqu'on est un centre de référence en Afrique en matière de formation, de certification et de mise en place de dispositifs de veille et d'intelligence économique et de due diligence, on prend ses responsabilités.

C'est ainsi que le Festival de l'intelligence économique francophone est né. Sa mission est de mobiliser, de manière méthodique, l'expertise francophone des cinq continents pour doper la compétitivité de l'espace francophone par des constats, des analyses et des recommandations. Le FIEF2023 s'attèlera à doper la compétitivité des territoires francophones à travers des méthodes, des techniques et des outils d'intelligence territoriale exploitables immédiatement par les décideurs centraux et les élus locaux.

Quel est l'état des lieux par rapport à la pénétration de la matière au Cameroun ?

S'il faut beaucoup de précautions pour répondre à cette question - précisément pour les raisons évoquées plus haut - force est de constater qu'au moment où je vous parle, haut - force est de constater qu'au moment où je vous parle, l'Etat du Cameroun ne dispose pas encore d'une véritable politique publique en matière de veille et d'intelligence économique, encore moins d'un dispositif national dédié. Soulignons tout de même que le CAVIE a déjà formé les attachés parlementaires de l'Assemblée nationale du Cameroun, en même temps que leurs homologues congolais, à l'intelligence parlementaire.

Dans le monde de l'entreprise, le CAVIE et le GICAM (Groupement interpatronal du Cameroun) ont déjà signé partenariat stratégique qu'il reste à implémenter. A l'échelle des sociétés privées, prises individuellement, nous pouvons nous satisfaire que des acteurs de poids comme Boissons du Cameroun, filiale du groupe Castel au Cameroun ; Sic Cacaos, filiale de Barry Callebaut ; Chanas Assurance, Afriland First Group, la BICEC, le Port autonome de Douala, le Crédit foncier du Cameroun, la CRTV, Cameroun Tribune, Vision 4, Mutations, pour ne citer qu'eux, ont déjà envoyé leurs cadres et dirigeants en formation au CAVIE. Ces derniers passent par des programmes courts, intensifs et certifiants en veille, intelligence économique, due diligence, renseignement humain, influence de la décision publique, gestion des risques ou communication de crise. Ils sont les ambassadeurs de l'intelligence économique au sein des entreprises locales.

Les Camerounais peuvent-ils mieux connaître l'homme qui porte le Cavie?

En plus de présider le CAVIE, je suis fondateur de Knowdys Consulting Groupe, responsable du Programme Doing Business in Africa à CentraleSupélec Paris depuis 2012, ancien de l'Ecole de guerre économique de Paris et de l'Executive Doctorate in Public Affairs de l'Université Paris Dauphine-PSL. Je suis à auteur de plusieurs ouvrages dont « 70 chroniques de guerre économique en Afrique ».

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