La Ligue sénégalaise contre le cancer organise des formations pour 140 sages-femmes à travers cinq villes du pays. L'objectif est de dépister de manière plus précoce les lésions précancéreuses et éviter ainsi le développement de cas de cancers du col de l'utérus. Reportage lors d'une session dans un centre de santé de Thiès.
Au Sénégal, le cancer du col de l'utérus est la deuxième cause de mortalité chez les femmes atteintes de cette maladie. Chaque année, plus de 3 000 nouveaux cas de cancers du sein et l'utérus y sont diagnostiqués.
Pourtant, un dépistage précoce permet facilement d'éviter ce cancer. Mais, encore faut-il que cet examen gynécologique soit systématique. C'est l'objectif que s'est fixé la Ligue sénégalaise contre le cancer.
Cette année encore, Octobre rose, consacré à la prévention du cancer du sein et de l'utérus, a été l'occasion de former 140 sages-femmes au dépistage dans cinq villes du Sénégal, comme par exemple dans un centre de santé de Thiès, à 70 km à l'est de Dakar.
Même en zone rurale, une sage-femme voit cette maladie progresser
Assises autour d'une grande table en forme de U, à tour de rôle, les sages-femmes indiquent si elles ont été formées à la technique de dépistage que propose la Ligue sénégalaise contre le cancer, l'inspection visuelle à l'acide acétique. Une méthode particulièrement intéressante pour le Sénégal pour le docteur Yaye Coumba Diouf, gynécologue : « La technique, elle est simple, facile à enseigner, peu coûteuse et ça permet d'éviter l'apparition du cancer du col. »
Car tout l'enjeu est là : si les lésions précancéreuses sont détectées et traitées, il n'y aura jamais de cancer. Pour cela, il faut que les femmes viennent suffisamment tôt se faire diagnostiquer. Mame Soukhnou Faye travaille dans un centre de santé à 16 km de Thiès. Et même en zone rurale, elle voit la maladie progresser. « Les cas sont là, bien présents, insiste-t-elle. Dans le poste auquel je suis actuellement, il y a trois femmes qui ont eu les lésions précancéreuses, et on a pu déceler les lésions mais tardivement. Elles ont été diagnostiquées et elles ont perdu la vie, malheureusement ».
Des vies qui peuvent être sauvées facilement vu que le cancer met une dizaine d'années à se déclarer. Mais pour Sylviane Bingui, sage-femme depuis 13 ans, l'un des freins reste l'argent. « Les moyens, si toutefois j'ai cette maladie, est-ce que j'aurais les moyens pour pouvoir vraiment me faire soigner, interroge-t-elle. Donc, nous, notre rôle, c'est vraiment de les sensibiliser, leur faire savoir qu'il faut consulter à temps pour ne pas arriver au stade du cancer ».
Toute la journée, les 30 sages-femmes venues de la région de Thiès ont pu affiner leur technique de dépistage et apprendre les nouvelles méthodes de traitement immédiat des lésions cancéreuses et ainsi faire reculer ce cancer.
On peut dire que tous les jours il y a au moins une à deux femmes qui décèdent du cancer du col de l'utérus. Et les femmes qui ont le cancer invasif, le cancer qui nécessite la chirurgie, la radiothérapie chimio, elles sont âgées aux alentours de la quarantaine, cinquantaine, c'est vraiment à la fleur de l'âge. Elles ont des enfants en bas âge à éduquer, ça détruit des familles, ça a un impact économique très important, impact social très important, c'est vraiment un problème de santé publique. On ne peut pas attendre tous les efforts du gouvernement. Ce que nous faisons aujourd'hui est financé par une entreprise, et c'est de la responsabilité sociétale d'entreprise, ça nous permet chaque année de plus en plus de former des sages-femmes à cette technique de dépistage, et parfois de leur laisser aussi le matériel nécessaire pour continuer à faire dans la routine ce dépistage et traitement de lésions précancéreuses. Donc c'est l'importance de la société civile aujourd'hui.