Ile Maurice: L'Assemblée nationale - Un nivellement vers le bas !

Les travaux (vraiment ?) ont repris la semaine dernière à l'Assemblée nationale après plusieurs mois de vacances. Comme à l'accoutumée, plus de vacances que de travaux !

On aurait pu penser qu'après ces vacances, méritées ou pas, une certaine sérénité aurait planée sur ce qu'on a jadis connu comme notre auguste assemblée. Souvent décrit comme le temple de la démocratie, l'Hémicycle est devenu plutôt un endroit où certains de ces soi-disant honorables membres qui y siègent, payés des deniers publics, y viennent que pour se donner en spectacle.

Ces séances sont devenues tellement récurrentes que quelqu'un qui n'a pas connu les débats et questions/réponses de haute facture qui animaient les sessions de l'Assemblée durant les décennies précédentes, surtout d'avant 2014, croirait que c'est la pratique normale que nos élus hurlent à tue-tête en se lançant des invectives qui feraient pâlir même les plus mal élevés de nos citoyens. À commencer par le président de cette assemblée, qu'on appelle le speaker.

Jamais de mémoire, n'a-t-on vu un speaker agir aussi brutalement et se passer du décorum que l'on attend de quelqu'un détenant une telle position. Le speaker devrait être au-delà de la chose politicienne, même s'il a droit à ses préférences et choix politiques. Mais en tant que président de séance, son rôle consiste à réglementer les débats et faire preuve d'impartialité dans la conduite des travaux.

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Dans la stricte tradition westministérienne, c'est-à-dire le Parlement britannique sur lequel est calqué le nôtre, le speaker de la Chambre des communes se fait même un devoir de protéger les élus de l'opposition contre toute action perçue comme dominatrice de la part de la majorité. On a même vu dans un récent passé un speaker mettre au pas des ministres sinon le Premier ministre, lui-même. Est-ce beaucoup demander au speaker de donner l'exemple et faire preuve de retenue au lieu d'afficher un air pugnace vis-à-vis des parlementaires de l'opposition ?

Depuis que les travaux sont retransmis en direct à la télévision, le public, qui a le courage et la patience de suivre le déroulement, est, pour être généreux, estomaqué de voir, semaine après semaine, les prises de bec de la présidence avec les représentants élus du peuple, surtout ceux de l'opposition, alors que lui ne l'est pas. Afficher une posture hargneuse constante de cette façon n'est pas pour arranger les choses. Le niveau de notre Assemblée est vraiment déplorable. Les visiteurs occasionnels venus assister aux débats en sortent ébahis, devant des scènes inimaginables qui frôlent l'indécence, pour ne pas dire le burlesque.

Il fut un temps où c'était avec plaisir qu'on allait assister aux débats parlementaires, s'accrochant à l'élocution tant dans la forme que dans le contenu de ces députés d'une autre trempe que nous avons eu le privilège de voir évoluer au sein de notre Hémicycle. On s'abstiendra de les nommer ici, au risque d'en oublier quelques illustres orateurs, mais quel régal de les entendre débattre des motions sans lecture de discours pré-écrits, s'il vous plaît ! On se bousculait pour avoir une place dans la galerie publique. Une atmosphère sérieuse prévalait pour la plupart du temps.

Dire qu'il n'y avait pas d'accrochages serait faire l'économie de la vérité. Mais, ceux-là étaient ponctués d'humour, d'élégance et d'intelligence. Le speaker se faisait un devoir d'accorder autant de latitude possible, mais suivant les règlements internes, aux députés, surtout ceux qui voulaient faire suivre leurs questions aux ministres par des supplémentaires. Il n'y avait pas, comme on le constate de nos jours, des questions supplémentaires plantées venant des bancs de la majorité avec des réponses pré-écrites, dont lecture est faite par les ministres interpellés, inclus le premier ministre, simplement pour empêcher aux auteurs des questions originales de poursuivre leur démarche.

Depuis le début de cette présente législature, le nombre de suspensions des parlementaires de l'opposition bat tous les records. Chaque séance nous arrive avec sa dose de suspension et les hurlements indignes de la présidence, sans parler de l'impartialité dont elle fait preuve, ne se souciant guère du sentiment de révolte provoquée chez les téléspectateurs.

Comme dirait l'autre, son ouïe sélective serait peut-être le résultat d'une quelconque huile dans l'orifice de son oreille ne lui permettant pas d'entendre les épithètes impolies venant de son côté gauche. Est-ce qu'il souffre aussi de sa vue, côté droit ? Car, les demandes de parole des membres de l'opposition ne semblent pas attirer son attention. On n'est pas près d'oublier sa salve de remarques désobligeantes s'agissant de la condition physique d'un membre en vue de l'opposition, il n'y a pas si longtemps.

C'est vraiment un nivellement vers le bas de notre pas si auguste Assemblée ! Au fait, la plupart de nos institutions et organismes publics subissent la même perte de crédibilité, surtout là où sont casés les protégés non qualifiés du régime. On en a vu récemment certains qui ont dû plier bagage et dégager le plancher. N'est pas Bill Gates qui le veut !

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