Niger: Coup d'Etat - Trois mois après, le général Tchiani au milieu du gué

Niger’s junta leader General Abdourahamane Tchiani (photo d'archives).
analyse

Le 26 juillet 2023 les Nigériens se sont réveillés avec un nouveau président, le général Abdourahamane Tchiani, nommé par Mahamadou Issoufou 12 ans auparavant comme chef de la sécurité présidentielle.

Il avait été maintenu à son poste par Mohamed Bazoum à son arrivée au pouvoir en avril 2021. Celui qui était censé protéger le chef de l'Etat a retourné son armada contre la personne sur laquelle il devait veiller.

Comme d'autres avant lui, le nouvel homme fort de Niamey avait tiré argument de la situation sécuritaire peu reluisante du pays. Même si à la vérité, on doit le dire, elle n'était pas la pire des trois pays sahéliens qui pataugent dans ce bourbier depuis plus d'une décennie.

Trois mois après, il est peut-être trop tôt pour tirer un bilan. Le moins que l'on puisse dire est que la situation sécuritaire qui a servi de prétexte aux putschistes du 26 juillet ne s'est pas spécialement améliorée.

Bien au contraire. On se rappelle cette attaque qui a causé la mort de 29 soldats à l'ouest du pays le 3 octobre dernier. Dans la même semaine 7 soldats ont perdu la vie, toujours dans la partie occidentale. Sans oublier l'attaque qui a eu lieu dans la zone des trois frontières en mi-août, occasionnant 17 morts et 20 blessés.

Mais comme la France ne saurait être étrangère à ce qui s'y passe, ceux qui souffrent du syndrome de la persécution sur fond d'un souverainisme et d'un anti-impérialisme diront que Barkhane a certainement miné le terrain avant de décamper. Qu'importe, l'échec est là.

Dans le domaine socio-économique, il y a peu de place à la polémique. Dès la commission du putsch, la CEDEAO a pris une batterie de mesures particulièrement drastiques, qui ont plombé du jour au lendemain la situation économique du pays. Il s'agissait essentiellement de la suspension de toutes les transactions commerciales et financières entre les Etats membres de l'organisation sous-régionale et le Niger, le gel des avoirs dans les banques de la CEDEAO et la fermeture des frontières terrestres et aériennes avec le Niger. Le puissant voisin nigérian a aussi coupé son approvisionnement en électricité privant le pays de 75% de ses besoins.

A cela se sont ajoutées les mesures tout aussi drastiques de l'UE et de certains pays européens comme la France et l'Allemagne. Et pas plus tard qu'il y a un mois, les Etats-Unis qui étaient dans une sorte d'attentisme ont eux aussi donné un tour de vis à leur coopération. Toutes ces mesures ont privé le pays d'Hamani Diori d'une manne internationale considérable qui a contribué à sécher un peu plus les finances publiques et à renchérir le coût de la vie. Le citoyen lambda est le premier à en souffrir. Même si les nouvelles autorités s'en lavent les mains, préférant rejeter la responsabilité sur ceux qui sanctionnent que sur ceux qui en sont la cause.

Quoi qu'il en soit, disons que la situation au Niger est particulièrement préoccupante. La question se pose dorénavant de savoir jusqu'à quand le pays pourra tenir, notamment pour ce qui est du payement des salaires des fonctionnaires qui devient de plus en plus problématique.

Seule victoire notable, si on peut l'appeler ainsi, la mission d'intervention militaire qu'avait brandie la CEDEAO dès les premiers jours du putsch semble s'éloigner. Il est vrai que sa mise en oeuvre était d'autant plus compliquée que tous les pays membres de l'organisation ne parlaient pas le même langage. Et même qu'à l'intérieur de certains pays, des tensions sociales et politiques commençaient à naître. Ce qui faisait craindre un effet boumerang si l'option militaire devait être mise en branle.

Presque 100 jours après, le général Tchiani semble être au milieu de gué, impossible de faire demi-tour, mais tout aussi compliqué de continuer avec une situation peu reluisante. Il faut bien plus que des propos anti-impérialistes, le discours souverainiste et panafricaniste pour résoudre des problèmes plus concrets.

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