Madagascar: Entre les lignes

IDébordé par la contre-offensive de la VIIIe armée de Montgomery, l'Afrikakorps recule pour la première fois, depuis son engagement sur le théâtre nord-africain, en avril 1941.

Au moment du déclenchement de cette contre-offensive britannique, le 23 octobre 1942, Rommel se trouve à Berlin. Il demande à Hitler le droit de se replier.

Le Führer le lui refuse, mais fort de son prestige, le maréchal décide de désobéir.

Le 3 novembre 1942, l'Afrikakorps décroche en bon ordre et parvient en Tunisie.

Cependant, ce premier revers militaire allemand constitue un tournant majeur de la seconde guerre mondiale et Churchill l'a bien compris qui dira : «Avant Alamein, nous ne connaissions que la défaite ; après, Alamein, nous ne connaitrons que la victoire».

Cité dans le complot Stauffenberg qui devait renverser Hitler, Rommel fut contraint de se donner la mort.

Le régime nazi lui organisera des funérailles nationales.

La presse britannique et le cinéma américain se saisiront du personnage de Rommel, devenant les alliés objectifs d'une Wehrmacht qui, en quête des derniers lambeaux d'une supériorité morale présumée comparée à barbarie de la SS, allait magnifier la figure de Rommel et le hisser au rang de mythe.

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Erwin Rommel (15 novembre 1891 - 14 octobre 1944) restera surtout comme «le loup du désert» d'Afrique du Nord où son Afrikakorps, en infériorité numérique et en bricolage logistique, tint longtemps tête aux troupes alliées qui voulaient faire de la rive arabe de la Méditerranée la base arrière de leur débarquement en Italie.

Son principal ennemi, dont on se plaira à dire que, finalement, il ne fut que son adversaire, le Britannique Montgomery, dira que «ce fut une guerre de Gentlemen».

Rommel, général allemand combattant les troupes alliées, mais respecté par ses ennemis.

Savoir-faire dans son métier de la guerre, grandeur dans l'adversité, honneur sauvegardé d'officiers allemands ainsi distingués du kapo des camps de concentration.

II. Le colonel STAUFFENBERG reste dans l'histoire comme l'homme de l'attentat du 20 juillet 1944, contre Adolf Hitler.

L'opération Walkyrie ayant échoué, on lui reprochera la décision tardive de l'attentat ainsi que sa réalisation hasardeuse.

Officier au sein de l'état-major général, il finit par se détourner des objectifs politiques et des méthodes militaires de Hitler : «Il faut agir, dit-il, mais avoir conscience d'entrer dans l'histoire comme traître».

Un camarade de Stauffenberg, Wolf Graf von BAUDISSIN (1907-1993), développa la notion de «Innere Führung» qui accordait «une forte valeur pédagogique au débat intérieur du soldat concernant les fondements éthiques de sa condition de soldat et les limites de l'obéissance».

Baudissin faisait partie du staff de Rommel, quand il fut capturé en Afrique du Nord en 1941, avant d'être envoyé dans un camp de prisonnier en Australie, dont il ne sera libéré qu'en 1947.

Réintégré dans la Bundeswehr, la nouvelle armée allemande, en cours de constitution, Baudissin se retrouve à la tête du Département «Innere Führung» : si l'exécution d'un ordre devait constituer un crime ou une violation de la dignité humaine, alors, l'ordre n'a pas à être suivi. Une conception en totale rupture avec l'obéissance du cadavre, «sans hésitation ni murmure».

Le postulat de Baudissin et du groupe d'officiers appelé «Leutnante 70» (huit officiers de l'École militaire qui ont publié les thèses qu'ils avaient préparées dans les années 70) était que les normes et les valeurs de la société allemande devaient imprégner la Bundeswehr par la méthode «Innere Führung» : les principes de liberté, de démocratie et d'État de droit.

Ce qui suppose au soldat allemand des fondations éthique, légale, politique et sociale, particulières, aboutissant au concept de «Staatsbürger in Uniform», citoyens sous l'uniforme.

Respect des grands principes démocratiques, adhésion aux grandes valeurs démocratiques : Innere Führung ne sera remise en cause qu'au début des années 2000.

Ses adversaires pointent les difficultés constantes de son application (supérieur et subalterne, soldat et politique) et son inadaptation aux nouvelles missions extérieures de la Bundeswehr ainsi qu'au fait migratoire sur le sol allemand.

Éducation civique et morale ou «dénaturation» de l'essence du militaire ?

III. Le véritable «soldat de la paix» durant cette seconde guerre mondiale était «LILI MARLEEN» : une chanson diffusée chaque soir pour les soldats de l'Afrikakorps.

Également sensibles à la mélancolie de la chanson, les soldats britanniques cessaient le feu et demandaient à l'ennemi allemand de monter le volume de la radio.

À 22 heures, sur le front de Tripolitaine, s'installait ainsi une fraternisation des hommes par-delà leur condition de soldats : «un message d'amour triste et nostalgique qui rappelle la tragique réalité de la grande solitude de l'être humain.

Un poème qui parle aux adultes sevrés de leur enfance, aux fils séparés de leurs mères, aux maris frustrés de leurs épouses, aux pères privés de leurs filles, aux amants qui se languissent de leurs maîtresses» (Jean-Pierre Guéno, dans «Lili Marleen, la véritable histoire de la plus belle chanson d'amour de tous les temps», Librio, 2012). Les généraux alliés se résignèrent à commander à leur état-major des versions adaptées.

Lili Marleen (Lily Marlène), avec ses 48 versions linguistiques, fut véritablement le premier tube planétaire.

La plus célèbre interprétation fut celle de Marlène Dietrich, Allemande passée en Amérique dès juin 1939.

IV. Le général Friedrich von PAULUS était le commandant en chef de la VIème armée allemande qui entra dans Stalingrad et atteignit le fleuve Volga, en août 1942.

Les Allemands ne parvinrent cependant ni à contrôler totalement la ville de Stalingrad ni à franchir la Volga.

Lancées dans une contre-offensive, deux armées soviétiques opèrent leur jonction le 23 novembre 1942, enfermant les Allemands dans la ville qu'ils avaient conquise.

Désobéissant trop tard à l'ordre d'Hitler de «ne pas céder un seul pouce de terrain», Paulus se retrouva coincé dans une ville fantôme encerclée.

Il se résoudra finalement à capituler le 31 janvier 1943, avec 91.000 survivants dont 24 généraux.

La bataille de Stalingrad est également appelée le «Verdun de la Volga» : 800.000 soldats allemands blessés, tués ou capturés ; 1.000.000 d'hommes tués du côté de l'Armée rouge.

La bataille la plus sanglante de l'histoire : pour quoi faire ? On reprochera à von Paulus, nommé «Fedlmarschall» juste la veille, d'avoir enfreint le code d'honneur tacite : le suicide plutôt que le déshonneur.

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