Afrique: Au Sénégal, le choc après l'exhumation puis l'incinération d'une personne supposée homosexuelle

Carte du Sénégal (photo d'archives).

Les vidéos d'une dépouille exhumée, sortie d'un cimetière puis brûlée devant une foule le 28 octobre dernier ont choqué au Sénégal. Le défunt, supposément homosexuel, avait été enterré le jour même à Kaolack, ville à 200 kilomètres au sud-est de Dakar. Le parquet a demandé l'ouverture d'une enquête et plusieurs organisations de la société civile ont condamné cet acte de barbarie.

Sur les images diffusées sur les réseaux sociaux, une foule de plusieurs centaines de personnes jubile autour d'un feu. Juste avant, des « hommes non identifiés » ont exhumé le corps d'un homme présumé homosexuel, avant de le brûler.

« Ces actes d'une extrême gravité, relevant de la barbarie, [...] ne peuvent rester impunis », a réagi le procureur de la république de Kaolack dès le lendemain, qui a demandé l'ouverture d'une enquête afin d'identifier les auteurs et d'engager des poursuites pénales.

« Un acte qui porte atteinte à la dignité du défunt et de sa famille »

Plusieurs organisations de la société civile, dont l'ONG Amnesty International, ont condamné « cet acte qui porte atteinte à la dignité du défunt et de sa famille » et rappellent que les maires « ont l'obligation de délivrer un permis d'inhumer aux proches de toute personne décédée et de veiller à la sécurité des cimetières ».

De son côté, le khalife de Léona Niassène, autorité religieuse du quartier où se sont déroulés les faits, réagit : « Nous condamnons toute interprétation déviante de notre religion. »

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Du jamais vu au Sénégal

Dans ce pays à plus de 90% musulman, les « actes contre natures avec un individu de son sexe » sont pénalisés de un à cinq ans de prison.

En 2008, un corps avait été exhumé, mais n'avait pas été incendié. Un acte d'une telle violence n'avait encore jamais été observé au Sénégal.

Babacar Ba, président du Forum du justiciable (ONG des droits humains), demande alors une enquête pour que des personnes soient arrêtées et condamnées le cas échéant : « Nul n'a le droit de se faire justice soi-même. Cet acte-là ne doit pas rester impuni, sinon ça peut être une jurisprudence, ça peut aujourd'hui pousser les gens sur la base de faibles soupçons à, arrêter une personne et à la brûler vive. Il faudrait que les autorités judiciaires aujourd'hui poursuivent les auteurs de ces actes ignobles. »

Une peine allant de trois mois à un an de prison pour violation de tombeau ou de sépulture

Selon « Prési Xalima », fondateur du collectif Free Sénégal qui défend les droits de la communauté LGBT+ - et qui souhaite garder l'anonymat avec un pseudonyme -, ce nouvel acte de violence est inquiétant : « Ça démontre effectivement l'avancée de l'homophobie, l'insécurité qu'est en train de vivre la communauté LGBT. Que le gouvernement sénégalais prenne ses responsabilités pour protéger l'ensemble des citoyens sénégalais. Et je pense que c'est comme ça qu'on arrivera à faire au minimum respecter les droits, ne serait-ce que pour que ces personnes-là soient en sécurité. »

Le Code pénal prévoit une peine allant de trois mois à un an de prison pour toute personne coupable de violation de tombeau ou de sépulture.

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