Cameroun: Affaire Martinez Zogo - Des avocats dans l'expectative

Plus de neuf mois après la découverte du corps supplicié de l'animateur radio Martinez Zogo dans la banlieue de Yaoundé, l'instruction est toujours en cours au niveau du tribunal militaire. Les différentes parties ont chacune leurs attentes concernant la progression de l'enquête.

Neuf mois après la découverte du corps de Martinez Zogo dans la bourgade d'Ebogo, quatorze personnes sont mises en examen, notamment pour « complicité d'enlèvement et de torture ». Treize d'entre elles ont été placées en détention provisoire. Parmi elles figure le patron de la Direction générale des renseignements extérieurs (DGRE), le commissaire-divisionnaire Léopold Maxime Eko Eko, en prison depuis fin janvier. Il n'a cependant été ni démis ni suspendu de ses fonctions à ce jour.

Entendu au mois d'août par le juge d'instruction, il attend maintenant d'être confronté à l'un de ses subordonnés, un autre inculpé dans ce dossier, le lieutenant-colonel Justin Danwe qui occupait les fonctions de directeur des opérations à la DGRE. « Il est nécessaire pour notre client d'être confronté de façon rapide à M. Danwe, afin que ce que notre client a déclaré devant la commission d'enquête mixte comme devant la gendarmerie soit réitéré, réclame Me Seri Simplice Zokou, l'un des avocats de Eko Eko. Sa position est claire : il est étranger à cette affaire. D'ailleurs, de prime abord, M. Danwe avait dit que M. Eko Eko n'avait rien à voir avec cette affaire. »

Ce désir de confrontation a été exprimé à plusieurs reprises par les conseils du patron de la DGRE auprès du juge d'instruction au tribunal militaire de Yaoundé, Florent Aimé Sikati II Kamwo. Plusieurs demandes de mise en liberté provisoires ont également été faites, toutes rejetées.

Trois demandes

Depuis la découverte macabre du corps de Martinez Zogo au matin du dimanche 22 janvier, une première enquête a été menée par la gendarmerie camerounaise, puis une autre enquête a été conduite sous l'égide d'une commission mixte police-gendarmerie mise en place sur instruction du chef de l'État, Paul Biya. Le magistrat Sikati a repris le dossier au mois d'avril. Un premier juge d'instruction désigné sur ce dossier ayant été dessaisi.

L'avocat de la famille de Martinez Zogo, Me Calvin Job, estime pour sa part que l'instruction suit un « rythme normal » dans une enquête « d'une complexité rare ». Il attend toutefois depuis plusieurs mois des réponses du juge d'instruction à trois demandes : que les journalistes ayant reçu menaces et intimidations à la même période que Martinez Zogo soient entendus ; qu'une expertise soit menée pour déterminer quel acte de torture parmi tous ceux subis par Martinez Zogo a entraîné son décès (deux autopsies ont déjà été réalisées) ; et que les faits soient requalifiés.

Car pour l'heure, personne, dans ce dossier, n'est inculpé pour meurtre ou assassinat. « On ne peut pas pour une personne décédée se contenter de la "complicité de torture", souligne l'avocat Me Calvin Job. Martinez Zogo est décédé du fait des multiples sévices subis de la part de ses bourreaux. On ne peut qu'aller vers une qualification de meurtre avec préméditation. »

Pour la famille et les amis du journaliste, l'attente est éprouvante. Plus de neuf mois sans savoir quand ils pourront organiser les obsèques de leur proche défunt. Le juge d'instruction du tribunal militaire de Yaoundé a, légalement, un délai maximum de 18 mois pour mener ses travaux avant de prononcer un non-lieu ou une ordonnance de renvoi vers une juridiction de jugement pour qu'un procès soit organisé.

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