Afrique: Conférence des Nations Unies sur les changements climatiques (COP28)

communiqué de presse

La COP28, 28e Conférence annuelle des Nations Unies sur les changements climatiques, rassemblera les États parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC), ainsi que des milliers d'experts, de journalistes et de représentants du monde des affaires et d'organisations non gouvernementales. Elle offre aux États un espace où débattre de la crise climatique, qui engendre des conséquences de plus en plus néfastes pour les droits humains partout dans le monde.

Malgré une urgence croissante, les réunions n'ont pas réellement réussi à obtenir les réductions nécessaires des émissions de gaz à effet de serre ni à soutenir de manière adéquate la transition vers les énergies renouvelables, ce qui permettrait de protéger les personnes les plus durement touchées par les inondations, les sécheresses, les ouragans et d'autres catastrophes climatiques. La COP28 sera accueillie par les Émirats arabes unis (EAU) du 30 novembre au 12 décembre 2023, en dépit de la répression draconienne de la dissidence pacifique dans ce pays et de l'expansion agressive de sa production de combustibles fossiles.

Pourquoi la crise climatique est-elle une crise des droits humains ?

Le droit à un environnement sain est un droit humain reconnu dans le monde entier. La crise climatique a également des effets négatifs sur de nombreux autres droits fondamentaux, notamment le droit à la vie et les droits au logement, à l'alimentation et à l'eau.

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Feux de forêt, villes étouffantes de chaleur, terres agricoles desséchées, côtes dévastées par les tempêtes... Partout dans le monde, la crise climatique pèse de plus en plus lourdement sur les vies et les moyens de subsistance. L'augmentation des concentrations de gaz à effet de serre dans l'atmosphère terrestre, causée principalement par la combustion de combustibles fossiles, piège la chaleur, ce qui engendre des conséquences profondes. Les effets néfastes se font déjà sentir, et leur fréquence et leur ampleur augmenteront de manière exponentielle et irrégulière dans un avenir prévisible.

Environ 3,5 milliards de personnes vivent déjà dans des contextes très vulnérables face au changement climatique, a récemment averti le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC). D'ici à 2050, plus d'un milliard de personnes vivant sur de petites îles et dans des communautés et établissements côtiers de faible altitude devraient être menacées par l'élévation du niveau de la mer et des conditions météorologiques extrêmes. Le changement climatique aggrave les inégalités sociales et économiques existantes, et les catastrophes aiguës et les changements à long terme, tels que les sécheresses pluriannuelles, sont bien pires pour les communautés à faibles revenus et marginalisées que les gouvernements n'ont déjà pas réussi à protéger.

Les personnes dont les identités marginalisées et les vulnérabilités se recoupent ont encore plus de probabilités de mourir, d'accroître leur pauvreté ou de perdre des ressources importantes à cause du changement climatique. Les personnes concernées sont les personnes à faible revenu, les Noirs, les autochtones et les autres personnes de couleur, les personnes âgées, les personnes handicapées, les personnes LGBT, les femmes et les femmes enceintes, les enfants et les travailleurs migrants. Ces groupes sont également les plus exposés au risque d'être laissés pour compte en cas de catastrophe. Les gouvernements devraient établir un budget pour protéger les droits humains des populations contre les effets néfastes du climat. Pourtant, la capacité des gouvernements des pays à revenu faible ou intermédiaire à faire respecter les droits des populations les plus exposées pourrait être mise à rude épreuve et, dans de nombreux cas, réduite à néant. La capacité des gouvernements à faire face à la crise climatique dépendra très probablement, dans une large mesure, de ce qu'ils font aujourd'hui pour défendre les droits de ceux qui subissent déjà l'impact du changement climatique et pour s'attaquer aux industries sous-jacentes et aux politiques économiques qui en sont la cause.

La crise climatique nécessite de soutenir les économies et les systèmes politiques qui ne reposent pas sur les combustibles fossiles et s'attachent à mettre fin à la marginalisation économique, au racisme, aux discriminations fondées sur le handicap, à l'âgisme, à la misogynie et à d'autres formes de discrimination.

Quels sont les enjeux de la COP28 pour les droits humains ?

En mars 2023, le GIEC, la principale autorité mondiale en matière de science du climat, a confirmé que le monde se réchauffe à des niveaux record et a averti que les gouvernements ne prennent pas de mesures suffisantes pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. Il a exhorté les gouvernements à réduire les émissions en abandonnant progressivement les combustibles fossiles, en mettant un terme à la déforestation et en développant les énergies renouvelables.

Cette année, si les gouvernements veulent remplir leur obligation, en matière de droits humains, de lutter contre le changement climatique, ils devraient s'engager à inscrire dans les conclusions de la COP28 leur engagement à éliminer progressivement, de manière équitable et dans le respect des droits, tous les combustibles fossiles. Les gouvernements doivent également assurer une transition juste et équitable vers les énergies renouvelables et aider les populations à s'adapter à l'impact de la crise climatique.

Les gouvernements qui participeront à la COP28 devraient s'engager à ne plus autoriser aucun nouveau projet lié aux énergies fossiles. De plus, ils devraient mettre fin à toute forme de soutien, notamment sous la forme de subventions et de financements internationaux, à l'exploitation de pétrole, de gaz et de charbon afin de réduire rapidement les émissions de CO2 et de limiter les conséquences du changement climatique sur les droits humains.

Les gouvernements devraient également s'engager à protéger les droits des communautés directement touchées par l'exploitation de combustibles fossiles, notamment les personnes travaillant et vivant dans et autour de sites d'exploitation, de production, d'entreposage, de transport, de raffinement, d'utilisation et d'élimination de combustibles fossiles. Ils devraient en outre garantir leur participation et leur représentation dans la prise de décision sur les activités liées aux combustibles fossiles et au changement climatique. Il est particulièrement important d'assurer la participation des groupes historiquement exclus, tels que les personnes handicapées.

Il y a deux ans, lors de la COP26 à Glasgow, les gouvernements se sont engagés à réduire progressivement l'utilisation du charbon, et l'année dernière, lors de la COP27 en Égypte, un groupe de 81 pays a tenté, en vain, d'inclure l'élimination progressive de tous les combustibles fossiles dans le texte du document final. Cette tentative a été bloquée par l'Arabie saoudite et d'autres États du Golfe, selon le Guardian.

Pourquoi l'élimination progressive des combustibles fossiles est-elle nécessaire à la réalisation des droits humains ?

Selon un consensus de plus en plus partagé, y compris au sein de l'Agence internationale de l'énergie et du GIEC, pour que les gouvernements atteignent les objectifs mondiaux en matière de climat, il faut mettre un terme aux projets d'exploitation du pétrole, du gaz et du charbon.

La combustion des combustibles fossiles est le principal facteur de la crise climatique, puisqu'elle représente plus de 80 % des émissions mondiales de dioxyde de carbone. Selon le GIEC, les projets actuels d'exploitation des combustibles fossiles dépassent déjà la capacité du climat à limiter le réchauffement de la planète à une augmentation de 1,5 °C pour éviter un effondrement du climat mondial.

Pourtant, les gouvernements continuent d'autoriser -- et de subventionner -- la construction d'infrastructures d'exploitation de combustibles fossiles, et les réglementations encadrant les opérations existantes demeurent insuffisantes. L'industrie des combustibles fossiles détourne la pression publique et politique sur ses activités principales en affirmant, plus récemment, que ses activités peuvent assurer la neutralité carbone (devenir « zéro émission nette »).

Pourquoi une réglementation robuste est-elle essentielle pour garantir le respect des droits humains par les marchés du carbone et pour soutenir une action climatique efficace ? Quelles règles faudrait-il adopter à la COP28 ?

La COP28 devrait veiller à ce que le marché mondial du carbone envisagé à l'article 6.4 de l'Accord de Paris soit strictement réglementé afin de faire respecter les droits, de soutenir l'action climatique et de fournir une réparation en cas de préjudice. Ces questions sont vitales étant donné que les États parties à l'accord, les entreprises et d'autres entités privées développent rapidement leur présence sur le marché, alors même que dans la plupart des pays les garanties sont inadéquates, voire inexistantes.

Les marchés du carbone échangent des crédits de carbone, censés représenter le dioxyde de carbone qui a été retiré de l'atmosphère ou dont l'émission a été évitée grâce à des projets allant de la conservation des forêts à l'énergie propre, entre autres. Quantité d'entreprises et de gouvernements en achètent pour prétendre compenser leur propre pollution.

Pourtant, dans les faits, de nombreux crédits carbone échangés sur ces marchés ne représentent pas de carbone éliminé de façon permanente ou d'émissions évitées. Ils font illusion et sapent l'action climatique lorsqu'ils sont utilisés pour compenser la pollution, car en réalité, aucune réduction globale des émissions n'a lieu. De plus, certains projets de compensation des émissions de carbone violent les droits de peuples autochtones et de communautés locales en les chassant de leurs terres et en criminalisant leurs moyens de subsistance.

En 2022, les États parties à l'Accord de Paris ont chargé un groupe d'experts -- l'organe de supervision établi au titre de l'article 6.4 -- de proposer des règles applicables au marché du carbone dans le cadre d'un nouveau mécanisme. De son côté, Human Rights Watch exhortait l'organe de supervision à adopter, en vue de consultations avec les peuples autochtones, des exigences de base standard conformes aux normes internationales et aux bonnes pratiques en matière de droit des peuples autochtones au consentement libre, préalable et éclairé, et à l'accès à l'information et à la participation. Human Rights Watch s'est également fait l'écho des recommandations d'organisations de la société civile de créer une solide procédure de réclamation et d'appel qui soit opérationnelle avant que l'organe de supervision ne puisse approuver un projet.

Avant et pendant la COP28, l'organe de supervision devrait proposer des règles rigoureuses pour garantir une réglementation stricte du marché du carbone établi dans le cadre de l'Accord de Paris afin de faire respecter les droits, de soutenir l'action climatique et de fournir un recours en cas de préjudice. Ces règles seront soumises au vote des parties.

Comment les Émirats arabes unis utilisent-ils la COP28 pour blanchir leur réputation en matière de droits humains et faire de l'écoblanchiment tout en augmentant leur production de combustibles fossiles ?

Il apparaît de plus en plus que les Émirats arabes unis, l'un des plus grands producteurs de pétrole au monde et une autocratie pétrolière qui utilise la richesses tirée des combustibles fossiles pour financer la répression des droits fondamentaux et des libertés, cherchent à utiliser la conférence comme un moyen de redorer leur blason tout en promouvant l'expansion des combustibles fossiles, sapant ainsi les efforts déployés pour faire face à la crise climatique et protéger les droits humains.

Les Émirats arabes unis sont l'un des plus gros émetteurs par habitant de gaz à effet de serre, facteurs aggravants de la crise climatique, et les fonds provenant de leur vaste industrie de combustibles fossiles constituent la majeure partie de leurs recettes publiques. L'Abu Dhabi National Oil Company (Compagnie pétrolière nationale d'Abu Dabi - ADNOC) est la principale entreprise publique de combustibles fossiles. Elle a récemment annoncé qu'elle étendait tous les aspects de ses activités, malgré un consensus de plus en plus large sur le fait que pour atteindre les objectifs climatiques mondiaux et protéger les droits humain, aucune nouvelle exploitation de pétrole, de gaz ou de charbon ne doit voir le jour.

En 2023, les Émirats arabes unis ont soumis leurs contributions déterminées au niveau national (CDN) récemment renforcées à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC), mais Climate Action Tracker, une organisation fournissant des analyses scientifiques indépendantes, a estimé que « les actions dans l'économie réelle étaient peu nombreuses » et a attribué au pays une note « insuffisante », notamment parce que les Émirats arabes unis prévoient toujours d'augmenter leur production de combustibles fossiles, ce qui rendrait son objectif irréalisable. Ces politiques sont incompatibles avec la limitation du réchauffement à 1,5 °C.

Le 12 janvier, les Émirats arabes unis ont nommé Sultan Ahmed Al Jaber président de la COP28. Celui-ci est le PDG de l'ADNOC, 11e producteur mondial de pétrole et de gaz - responsable d'une grande partie des émissions mondiales des dernières décennies - et fondateur de la société publique d'énergie renouvelable Masdar en 2006. M. Jaber conservera ses fonctions au sein de l'ADNOC tout en endossant les rôles d'envoyé spécial des Émirats arabes unis pour le changement climatique et de président de la conférence. Ainsi, après avoir obtenu la présidence de la COP28, les Émirats arabes unis ont rapidement fait appel à plusieurs sociétés de relations publiques américaines, à grands frais, vraisemblablement pour promouvoir leur rôle d'hôte.

À l'instar d'autres grands producteurs de pétrole et de gaz, les entreprises émiraties de combustibles fossiles contribuent, par leur production, aux effets néfastes du changement climatique sur les droits humains. L'ADNOC a récemment annoncé qu'elle développait tous les aspects de ses activités et augmentait sa capacité de production de 4 à 5 millions de barils par jour, malgré le consensus scientifique croissant selon lequel les gouvernements devront interdire tout nouveau développement pétrolier, gazier ou charbonnier s'ils veulent atteindre les objectifs climatiques mondiaux et protéger les droits humains. Seulement 10 % de l'expansion de l'ADNOC est conforme au scénario de l'Agence internationale de l'énergie pour des émissions nettes de carbone nulles dans le monde d'ici à 2050.

En septembre, le New York Times a fait état d'un enregistrement qui avait fuité lors d'une réunion entre l'équipe de communication de la COP28 et un responsable des droits humains du tribunal présidentiel émirati. L'enregistrement révèle que les autorités émiraties ne souhaitent pas rencontrer les groupes de défense des droits humains, notamment Human Rights Watch et Amnesty International, ni s'engager auprès d'eux.

La COP28 est organisée par les Émirats arabes unis. Quelles préoccupations cela suscite-t-il en matière de droits humains ?

Les groupes de défense des droits craignent que la criminalisation de la liberté de réunion, la fermeture de l'espace civique et la répression des critiques par les Émirats arabes unis n'empêchent une participation effective des activistes et des défenseurs des droits humains aux négociations sur le climat. Les personnes qui, aux Émirats arabes unis, s'expriment ou font des recherches sur l'expansion des énergies fossiles ou sur les effets néfastes des combustibles fossiles sur la santé et le climat risquent de faire l'objet d'une surveillance illégale, d'arrestations, de détentions ou de mauvais traitements.

Au cours de la dernière décennie, les autorités des Émirats arabes unis ont engagé un combat soutenu contre les droits humains et les libertés, notamment en ciblant les activistes des droits humains, en promulguant des lois répressives et en utilisant le système de justice pénale comme outil pour éliminer le mouvement des droits humains. Ces politiques ont conduit à la fermeture complète de l'espace civique, à des restrictions sévères de la liberté d'expression, en ligne et hors ligne, et à la criminalisation de la dissidence pacifique. Les autorités des Émirats arabes unis appliquent une politique de tolérance zéro à l'égard des dissidents. Elles déploient des technologies de surveillance avancées pour contrôler les espaces publics et l'activité sur Internet, ainsi que les téléphones et ordinateurs des particuliers.

Depuis plus de dix ans, les autorités émiraties détiennent illégalement au moins 60 défenseurs des droits humains, activistes de la société civile et dissidents politiques émiratis. Ceux-ci ont été arrêtés en 2012 en raison de leurs revendications en faveur d'une réforme et de la démocratie, ou de leur affiliation à l'Association pour la réforme et l'orientation sociales (al-Islah). Certains de ces détenus, appelés « les EAU-94 » en raison du nombre d'accusés ayant comparu dans un procès collectif irrespectueux des normes minimales d'équité, ont été soumis à des disparitions forcées, à la torture et à d'autres mauvais traitements. En 2013, ils ont été condamnés à des peines allant de 7 à 15 ans de prison. Aujourd'hui, au moins 51 d'entre eux restent détenus alors qu'ils ont fini de purger leur peine, certains depuis 2019.

Les Émirats arabes unis participent également à des actes de répression au-delà de leurs frontières, notamment l'extradition et l'arrestation d'un dissident émirati de Jordanie ; la désignation de quatre éminents dissidents émiratis en exil comme des partisans du « terrorisme » ; et l'enlèvement et le retour forcé aux Émirats arabes unis, par cheikh Mohammed bin Rashid Al Maktoum, premier ministre émirati et dirigeant de Dubaï, de ses deux filles adultes, Shamsa et Latifa.

Aux EAU, la loi sur la cybercriminalité (loi fédérale n° 34 de 2021 sur la lutte contre les rumeurs et la cybercriminalité) est utilisée pour réduire au silence les dissidents, les journalistes, les militants et toute personne que les autorités considèrent comme critique à l'égard du gouvernement, de ses politiques ou de ses représentants. Elle contient des dispositions abusives, inquiétantes et formulées de façon floue, restreint l'espace en ligne des Émirats arabes unis, déjà très limité et fortement surveillé, et constitue une menace sérieuse pour la liberté des dissidents pacifiques, rendant encore plus difficile pour les citoyens ordinaires, les résidents et les visiteurs de savoir quels types d'activités en ligne pourraient conduire à une arrestation et à des poursuites judiciaires.

Aux Émirats arabes unis, la criminalisation des relations sexuelles hors mariage, de la sodomie, de l'avortement, la définition trop large des crimes de « moralité », et le maintien d'un système de tutelle masculine touchent de manière disproportionnée les femmes et les personnes LGBT. Les autorités continuent également à rendre difficile l'accès des personnes non mariées à certaines formes de soins de santé sexuelle et reproductive, tels que les soins prénataux et les tests de santé sexuelle. Cela concerne les femmes enceintes ainsi que les victimes de violences sexuelles qui devraient pouvoir accéder à la contraception d'urgence, aux contrôles des infections sexuellement transmissibles et à la prophylaxie post-exposition (ou PEP) pour le VIH.

Les Émirats arabes unis s'appuient fortement sur les travailleurs migrants, qui représentent plus de 88 % de la population du pays. Ceux-ci sont soumis à un système de parrainage (ou « kafala ») qui lie leur visa à leur employeur et les place dans une position de grande vulnérabilité dont les employeurs peuvent profiter indûment, ce qu'ils font d'ailleurs souvent. Les pratiques abusives en matière de recrutement et d'emploi, telles que le vol de salaire et les frais de recrutement illégaux, sont monnaie courante, y compris parmi les travailleurs engagés dans les secteurs de la construction et des services à l'Expo City Dubaï où se tiendra la COP28. Les travailleurs migrants exposés à ces abus généralisés en matière de travail occuperont également, pendant la COP28, des postes de personnel événementiel, d'hôtellerie, de gestion des installations, d'agents de sécurité et de chauffeurs, entre autres fonctions.

Les Émirats arabes unis négligent de protéger les travailleurs contre l'exposition à la chaleur extrême, qui est un risque pour la santé exacerbé par le changement climatique. Les travailleurs en extérieur, notamment dans le secteur de la construction, sont exposés de manière disproportionnée à ces dangers. À l'instar des autres pays du Golfe, les Émirats arabes unis interdisent de travailler à la mi-journée durant certains mois et horaires prédéfinis, mais des preuves solides démontrent que ces interdictions ne constituent pas une protection suffisante contre la chaleur.

La chaleur n'est pas le seul facteur préjudiciable et d'autres abus courants, notamment la promiscuité et l'absence de zones de repos ombragées et de services de transport climatisés pendant les trajets quotidiens, érodent également la capacité des travailleurs à se reposer, à se réhydrater et à se rétablir. Plusieurs études sur les risques d'exposition à la chaleur dans les États du Golfe établissent une forte corrélation entre le stress thermique et les décès dus à des problèmes cardiovasculaires et indiquent que les journées extrêmement chaudes sont associées à un risque de mortalité plus élevé, et les travailleurs migrants y sont exposés de manière disproportionnée. Compte tenu de l'interdiction des syndicats et de la restriction de la liberté d'expression, les travailleurs migrants sont dans l'impossibilité de réclamer collectivement de meilleures protections contre la chaleur et d'autres garanties.

Qui est Ahmed Mansoor ?

Ahmed Mansoor est sans doute le défenseur des droits humains le plus connu des Émirats arabes unis. Il a reçu le prestigieux prix Martin Ennals pour les défenseurs des droits humains en 2015 et est membre du comité consultatif de Human Rights Watch pour la division Moyen-Orient et Afrique du Nord. Avant sa détention, il était le dernier défenseur émirati des droits humains à travailler ouvertement aux Émirats arabes unis. Les Émirats arabes unis devraient libérer Ahmed Mansoor immédiatement et sans condition ; tous les gouvernements participant à la COP28 et les organes des Nations Unies devraient exiger sa libération publiquement et de façon systématique.

Les forces de sécurité des Émirats arabes unis ont fait une descente à son domicile et l'ont arrêté le 20 mars 2017. Depuis lors, il est détenu dans une minuscule cellule à l'isolement dépourvue de lit et de matelas, où il est privé de lecture et d'articles de première nécessité. Il est également privé de tout contact véritable avec d'autres prisonniers ou avec le monde extérieur, notamment de visites ou d'appels réguliers de sa femme et de ses quatre fils, ce qui constitue une violation flagrante des droits des prisonniers en vertu des normes internationales, que les Émirats arabes unis affirment, à tort, respecter.

En mai 2018, la Chambre de la sécurité de l'État de la Cour d'appel d'Abu Dhabi a condamné Ahmed Mansoor à 10 ans de prison pour des accusations entièrement liées à ses activités en faveur des droits humains. Le 31 décembre 2018, le tribunal de dernier recours, la Cour suprême fédérale, a confirmé cette peine injuste, réduisant à néant sa dernière chance de bénéficier d'une libération anticipée. Les deux procès se sont déroulés dans le plus grand secret, et le gouvernement a refusé les demandes de publication de l'acte d'accusation et des décisions prononcées.

Les tweets d'Ahmed Mansoor sur les injustices, sa participation à des conférences internationales en ligne sur les droits humains, ses échanges d'e-mails et ses conversations WhatsApp avec des organisations internationales de défense des droits humains -- notamment Human Rights Watch et le Gulf Centre for Human Rights : tout cela a été présenté comme des preuves d'activité criminelle pour étayer les accusations fallacieuses prononcées contre lui.

En août 2016, selon le Citizen Lab de Toronto, Ahmed Mansoor a été ciblé au moyen du logiciel espion Pegasus de NSO Group, qui a fait couler beaucoup d'encre. Mais avant cela, il avait déjà été la cible des logiciels espions FinSpy de FinFisher en 2011 et Remote Control System de Hacking Team en 2012. Une fois que Pegasus est installé sur un appareil, le client peut le transformer en un puissant outil de surveillance offrant un accès complet à la caméra, aux appels, aux médias, au microphone, aux e-mails, aux SMS et à d'autres fonctions, ce qui permet de surveiller la personne ciblée et ses contacts.

Quel type de restrictions pourrait être imposé aux Émirats arabes unis pendant la COP28 ?

Les attaques des Émirats arabes unis contre le droit à la liberté d'expression s'étendent non seulement aux citoyens émiratis, mais aussi aux citoyens non émiratis se trouvant dans le pays. En 2018, les forces de sécurité émiraties ont arrêté un universitaire britannique, Mathew Hedges, en voyage de recherche sur le terrain pour sa thèse de doctorat. Il a été détenu arbitrairement, à l'isolement, pendant des mois avant d'être libéré sous la pression du gouvernement britannique. Le cas de Mathew Hedges illustre les menaces que fait peser le gouvernement émirati sur les personnes participant à la COP28.

Les Émirats arabes unis continuent d'étendre leurs capacités de surveillance en ligne et hors ligne. Les autorités déploient des technologies de surveillance avancées pour contrôler les espaces publics à l'aide de caméras de vidéosurveillance et de l'intelligence artificielle. De nombreux sites Web, blogs, forums de discussion et plateformes de réseaux sociaux sont surveillés afin de censurer les contenus que le gouvernement considère comme critiques à l'égard des dirigeants, du gouvernement et des politiques émiratis, ainsi que d'autres sujets que les autorités jugent sensibles.

Y a-t-il déjà eu par le passé des COP où la participation de la société civile a été restreinte ?

Les représentants de la société civile et des peuples autochtones se battent depuis longtemps pour leur droit à participer aux négociations sur le climat. Par exemple, lors de la COP25 à Katowice, le gouvernement polonais a empêché certains activistes du climat d'entrer dans le pays et a fouillé certains d'entre eux dans leur chambre d'hôtel. Lors de la COP26 à Glasgow, les observateurs ont eu du mal à accéder aux salles de négociation, en ligne et sur place. Lors de la COP27 à Sharm el-Sheikh, le gouvernement égyptien a imposé des restrictions arbitraires à l'enregistrement des groupes de défense des droits et des activistes, intensifié la surveillance et les détentions, harcelé des défenseurs du climat et refusé l'entrée à au moins un activiste qui a ensuite été expulsé.

Pourquoi la participation effective de la société civile et des peuples autochtones est-elle essentielle à la réussite de la COP28 ?

Une action climatique respectueuse des droits nécessite la participation pleine et entière des journalistes, des activistes, des défenseurs des droits humains, de la société civile, des groupes de jeunes et des représentants des peuples autochtones. Cela inclut les personnes en première ligne de la crise climatique et des populations les plus menacées par les effets du changement climatique.

Que devrait faire le gouvernement émirati pour garantir la participation pleine et entière de la société civile à la COP28 ?

Le gouvernement émirati devrait relâcher son emprise sur l'espace civique et respecter ses obligations en matière de droits humains en défendant les droits à la liberté d'expression, d'association et de manifestation. Les autorités des Émirats arabes unis devraient libérer immédiatement et sans condition toutes les personnes détenues arbitrairement pour avoir exercé leur droit à la liberté d'expression, à savoir, Ahmed Mansoor et les personnes détenues à tort dans l'affaire des UAE94. Le gouvernement émirati devrait modifier la loi sur la cybercriminalité afin de s'aligner sur ses obligations en matière de droit à la liberté d'expression en vertu du droit international.

Les Émirats arabes unis devraient également décriminaliser les relations sexuelles consensuelles hors mariage, l'expression de la non-conformité au genre et d'autres actes vaguement définis visant les personnes lesbiennes, gays, bisexuelles et transsexuelles (LGBT). La criminalisation des relations sexuelles non maritales et d'actes vaguement définis fait peser un risque grave sur la sécurité des femmes et des personnes LGBT participant à la COP28.

Les Émirats arabes unis devraient veiller à ce que les lois et les politiques facilitent l'accès des femmes aux soins de santé sexuelle et reproductive, qu'elles soient mariées ou non, y compris l'accès à la contraception d'urgence, aux contrôles des infections sexuellement transmissibles et à la prophylaxie post-exposition pour le VIH, qui est importante pour les survivantes de violences sexuelles.

Que devraient faire les États membres de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) pour inciter les Émirats arabes unis à mettre fin aux violations des droits humains ?

Les États membres de la CCNUCC devraient souligner l'importance d'une société civile florissante et indépendante pour exiger des mesures climatiques ambitieuses, notamment l'élimination progressive des combustibles fossiles, et faire pression sur le gouvernement des Émirats arabes unis, en public et en privé, pour qu'il respecte ses obligations en matière de droits humains et qu'il libère immédiatement et sans condition les militants et les défenseurs des droits humains détenus de manière arbitraire.

Quelle est la responsabilité du secrétariat de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) en matière de respect des droits humains lors de la COP28 ?

Le 1er août 2023, la CCNUCC a conclu un accord encadrant l'accueil de la 28e session de la Conférence des parties sur le changement climatique avec le gouvernement des Émirats arabes unis. Elle n'a pas rendu cet accord public.

Les accords encadrant l'accueil des Conférences doivent être publics et « refléter les objectifs et les principes de la Charte des Nations Unies ainsi que les obligations respectives [des parties] en vertu du droit international des droits humains », comme l'ont demandé les parties à la CCNUCC dans un document de juin 2023.

Les parties à la CCNUCC ont encouragé le Secrétariat à continuer à respecter « la législation sur les droits humains et à garantir l'intégrité, la dignité et la sécurité de tous les observateurs aux conférences de la CCNUCC ». Le Secrétariat devrait donc faire pression sur le gouvernement des Émirats arabes unis pour qu'il respecte ses obligations en matière de droits humains et signale son intention de faciliter des négociations climatiques solides et respectueuses des droits avant, pendant et après la COP28.

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