Le gouvernement a du mal à endiguer le mal des jeunes
Faut-il revoir de fond en comble les stratégies nationales mises en place pour lutter contre ce phénomène social?
Alarmante, inquiétante, mais sans doute pas si surprenante que ça. C'est ainsi que l'on pourrait qualifier la situation du marché du travail au troisième trimestre de 2023.
En effet, d'après les dernières données publiées par le Haut-commissariat au plan (HCP), le taux de chômage s'est gravement accru sur un an au troisième trimestre dernier atteignant 13,5% contre 11,4% durant la même période de l'année écoulée.
Entre le troisième trimestre de 2022 et celui de 2023, « le taux de chômage est ainsi passé de 11,4% à 13,5% au niveau national, passant de 15% à 17% en milieu urbain et de 5,2% à 7% en milieu rural », a annoncé l'organisme public chargé de la production, de l'analyse et de la publication des statistiques officielles au Maroc.
Comme depuis des années, « les taux les plus élevés demeurent ceux parmi les jeunes âgés de 15 à 24 ans, enregistrant 38,2%, les femmes, 19,8%, et les diplômés, 19,8% », a précisé l'institution dans sa note d'information relative à la situation du marché de travail au troisième trimestre de l'année 2023. Juste devant les personnes âgées de 25 à 34 ans (+2,5), de 18,4% à 20,9%.
La progression quasi-attendue du chômage par bien d'observateurs de l'économie nationale est inquiétante d'autant plus qu'elle s'accélère alors que le gouvernement a fait de la lutte contre ce phénomène son cheval de bataille, multipliant des initiatives qui vont s'avérer au fil des ans sans véritable effet sur l'un des maux récurrents des jeunes Marocains.
Une hausse spectaculaire. A 13,5%, le taux de chômage file droit dans le registre des records, mettant au passage à mal les politiques mises en place par le gouvernement (Awrach et Forsa) pour infléchir sa courbe et la litanie des promesses de créations de postes.
Afin de mieux apprécier l'évolution de ce phénomène durant l'année en cours, rappelons les principales évolutions enregistrées sur le marché du travail depuis le début de l'année.
Selon les chiffres du HCP, le taux de chômage était déjà passé de 11,2% à 12,4% au niveau national au deuxième trimestre, de 15,5% à 16,3% en milieu urbain et de 4,2% à 5,7% en milieu rural. Comme aujourd'hui et avant, il était plus élevé parmi les jeunes âgés de 15 à 24 ans (33,6%), les diplômés (19,2%) et les femmes (17%).
Au premier trimestre, ce taux avait atteint 12,9% au niveau national au lieu de 12,1% un an auparavant, passant de 16,3% à 17,1% en milieu urbain et de 5,1% à 5,7% en milieu rural. Il était resté très élevé parmi les jeunes âgés de 15 à 24 ans (35,3%), les diplômés (19,8%) et les femmes (18,1%).
Au troisième trimestre de 2023, le Haut-commissariat fait en outre savoir que « le nombre de chômeurs a augmenté de 248.000 personnes entre le troisième trimestre de l'année 2022 et celui de 2023, passant de 1.378.000 à 1.625.000 chômeurs, ce qui correspond à une augmentation de 18% ».
Comme le relève l'institution dans sa note, cette hausse résulte d'une augmentation de 181.000 chômeurs en milieu urbain et de 67.000 en milieu rural.
Toujours selon le HCP, « entre le troisième trimestre de 2022 et la même période de 2023, le taux d'activité a diminué, au niveau national, de 44% à 43,2%. Il a baissé de 48,1% à 45,8% en milieu rural et stagné à 41,9% en milieu urbain », ajoutant que les taux d'activité des hommes et des femmes ont reculé de 0,8 point pour s'établir respectivement à 68,7% et 18,4%.
Quant au taux d'emploi, les chiffres montrent qu'il a reculé de 39% à 37,4% au niveau national (-1,6 point). Plus accentué parmi les hommes (2,2 points) que parmi les femmes (1,1 point), ce taux a connu une baisse de 2,9 points en milieu rural (de 45,5% à 42,6%) et de 0,9 point en milieu urbain (de 35,7% à 34,8%).
Notons que « le volume de l'emploi a baissé de 297.000 postes entre les troisièmes trimestres de 2022 et 2023, suite à une perte de 269.000 postes en milieu rural et 29.000 postes en milieu urbain », selon les explications de l'organisme.
Augmentation du sous-emploi. Tout aussi inquiétante, la hausse du volume des actifs occupés en situation de sous-emploi qui a bondi de 94.000 personnes sur un an, passant de 911.000 à 1.005.000 personnes au niveau national, de 488.000 à 523.000 personnes en milieu urbain et de 423.000 à 482.000 en milieu rural.
Ainsi qu'en déduit le HCP, « le taux de sous-emploi est passé de 8,5% à 9,6% au niveau national, de 7,5% à 8,1% en milieu urbain et de 9,9% à 12% en milieu rural ».
D'après les données recueillies par le Haut-commissariat, le secteur des BTP est le plus touché par le sous emploi. Il a en effet connu une importante hausse du taux de sous-emploi avec +3,1 points (de 15,8% à 18,9%), suivi par le secteur de l"Industrie y compris l'artisanat" avec 2,1 points (de 5,6% à 7,7%).