Madagascar: Transport routier - Une place socio-économique centrale

Le transport routier comprend à la fois le transport des personnes et le transport des marchandises. Le premier concerne le transport public routier de voyageurs, le transport de location, les transports intermédiaires (bajaj, vélo, taxi-moto...), les taxi-villes, les véhicules particuliers. Quant au second, il concerne le transport de marchandises public ou à titre privé, avec des véhicules motorisés ou non motorisés. Le transport routier occupe une place prépondérante dans l'économie nationale et sa défaillance constitue un blocage au développement.

En tant que première tutelle de ce secteur, le ministère des Transports et de la météorologie a défini une vision d'« un système de transports routiers fiable et viable », à travers son plan d'actions de 5 ans. Une vision qui implique à la fois la sécurité et la qualité des services ainsi que l'adéquation du système aux besoins de la population favorisant le développement du sous-secteur et de l'économie en général.

Selon les chiffres disponibles, 90% des déplacements routiers à l'intérieur du pays sont formés par le transport des voyageurs. Du côté de l'Agence des Transports Terrestres (ATT), on avance que la barre de 10.000 départs mensuels des taxis-brousse relevés dans l'un des principaux stationnements de la capitale, le Fasan'ny Karana, a été atteinte il y a dix ans. En ce qui concerne la qualité des routes, les infrastructures existantes à Madagascar pourraient être qualifiées de mauvaise en général. Il y a 10 ans, si 43,28% des routes étaient en mauvais état, une amélioration de cette qualité a été observée durant les années suivantes (réduit à 32%) avant que la tendance ne se renverse à nouveau.

%

On sait, en outre, qu'il n'y a que 26 infrastructures de transport au niveau national, dont 16 gares routières et une dizaine d'aires de stationnement. Rapportées au nombre des véhicules de transport qui s'exercent, ces infrastructures s'avèrent très saturées. En effet, il existe actuellement près de 20 000 véhicules de transport regroupés dans plus de 400 coopératives. C'est-à-dire, en moyenne, une gare routière héberge 1125 véhicules et 25 coopératives.

En plus de l'insuffisance des infrastructures routières, la plupart d'entre elles sont aussi en état de vétusté car elles ont été construites en grande partie à l'époque de la colonisation. Et vue la position géographique de Madagascar, ces infrastructures sont vulnérables et souffrent souvent des dégâts causés par les aléas climatiques.

On remarque aussi que les transports intermédiaires gagnent actuellement du terrain dans le transport routier, surtout dans les villes et les périphéries. Ils sont plus accessibles à la population en termes de coût et sont également très adaptés aux circonstances difficiles (contrainte temporelle, impraticabilité routière, etc...). La situation du parc automobile de la capitale reflète ce phénomène. En effet, plus de 40% de l'immatriculation durant l'année sont constituées par les véhicules à deux roues et viennent ensuite les voitures particulières qui ont occupé les 33,3%.

On constate également une faible immatriculation des véhicules de transport en commun. Depuis plusieurs années, on enregistre une lenteur sensible au niveau du renouvellement des véhicules. En 2016, le taux annuel d'immatriculation a été de 8,6% seulement, 1% des véhicules étaient neufs, 18,8% des occasions et 11,6% des mutations en provenance des provinces. 7 ans après, ces chiffres ne se sont guère améliorés.

Plusieurs objectifs fixés

Enfin, beaucoup d'usagers se heurtent à des problèmes liés aux services fournis par les opérateurs, tant au niveau urbain et suburbain qu'au niveau régional et national. Les problèmes les plus fréquents rencontrés sont, entre autres, l'arrêt de service avancé par certains opérateurs urbains et suburbains, l'inefficience du réseau de transport, l'insuffisance des véhicules et notamment l'enclavement de certaines régions durant la période de pluie alors que les voyageurs ont besoin de toujours se déplacer.

Bref, de nombreux défis se posent devant les autorités, en particulier le ministère de tutelle, pour renverser la vapeur. « à Madagascar, le transport public routier demeure le plus utilisé, que ce soit en matière de transport de personnes que de marchandises. Actuellement, bien que le transport de marchandises soit le plus souvent visible, il n'est pas encore vraiment développé dans le pays. Nous travaillons à l'amélioration du cadre règlementaire qui le régit. Ce transport se formalise au sein du bureau de contribution et des statistiques ainsi qu'au registre de commerce », note de ce département.

Quant au transport de personnes, il est observé au sein dudit ministère à travers l'Agence des Transports Terrestres (ATT), qui est l'autorité de régulation des transports routier et ferroviaire de la Grande Ile. Comme toute Institution, le ministère des Transports et de la météorologie a ses propres visions et stratégies afin de développer le secteur et les sous-secteurs. Son objectif :

« Fiabilité, Qualité, Sécurité, Proactivité pour tous modes de transport confondus et compétitivité pour tous les opérateurs ».

Mais pour atteindre ces buts fixés, la route est encore longue et les usagers, lassés par des années de promesses non tenues et de bilans en demi-teinte, multiplient les critiques. « Le pari n'est pas facile à gagner mais le pays se doit d'avoir d'avoir un système de transports routiers fiable et viable, qui implique : la sécurité et la qualité des services ainsi que l'adéquation du système aux besoins de la population favorisant le développement du sous-secteur », soutient un responsable.

Du côté des transporteurs, on insiste sur la nécessité de garantir la contribution du sous-secteur des transports routiers à l'accroissement de l'économie de Madagascar, cette vision s'inscrivant dans la Politique Générale de l'État. « Outre les défaillances bien connues de tout le monde, la faiblesse du cadre règlementaire, l'absence d'une gestion efficace des infrastructures existantes, l'obsolescence de l'organisation du transport public routier de voyageurs et la recrudescence de l'insécurité routière sont des problèmes majeurs liés au sous-secteur », ajoutent-ils.

À savoir que la plupart des textes règlementaires appliqués au niveau du sous-secteur des transports routiers datent des années 70 à 90. Certes, une mise à jour des textes généraux a été procédée, dont la loi fixant les principes de la politique des transports terrestres et la loi portant Code de la Route à Madagascar, mais les réformes menées n'ont pas encore permis le grand changement attendu. La mise en place d'un cadre règlementaire relatif aux transports intermédiaires, dont l'émergence massive n'a pas été soupçonnée, s'avère aussi urgente.

Par ailleurs, la gestion des infrastructures de transport est limitée aux activités de base afférentes à cette attribution, principalement l'organisation des départs, la gestion des blocs sanitaires (source de revenus importante), l'entretien de l'infrastructure et la perception des droits. Cette gestion est laissée totalement aux représentants des opérateurs qui y transitent. À noter cependant que la mise en place des comités de gestion a été facilitée par le ministère en charge des Transports. Le contrôle des mouvements, les actions d'investissement et de développement ainsi que le renforcement de l'assiette de services de transport, qui sont cependant essentiels au développement du sous-secteur, ne sont pas jusqu'ici effectifs.

Axes de réforme

Pour Jean Solo, dirigeant de coopérative, la multiplicité des opérateurs ainsi que leur organisation et leur fonctionnement rendent difficiles la régulation du sous-secteur, la mise en oeuvre des réformes requises et en conséquence le développement du sous-secteur. Et lui de poursuivre que les problèmes liés à la qualité des enseignements sur le code de la route, à la délivrance de permis de conduire et au contrôle technique des véhicules, la dégradation des infrastructures routières, l'absence de synergie entre les pouvoirs publics concernés et l'inconscience ou ignorance des usagers de la route concernant les règles de sécurité routière sont également des points sur lesquels des efforts doivent être déployés.

Par rapport au contexte existant, quatre axes stratégiques ont été retenus face à la vulnérabilité du secteur des transports routiers, particulièrement le transport public routier à Madagascar. Basé sur les constats les plus marquants, le plan d'actions proposé est cadré sur les principaux points que sont le développement d'infrastructures (routes, gares routières, aires de stationnement...) adéquates et modernes, la professionnalisation des opérateurs assurant une mise à disposition de moyens de transport sécuritaires, la mise en adéquation des services de transport routier aux besoins de la population et le renforcement de la sécurité routière à travers une synergie des actions des pouvoirs publics et la conscientisation des usagers.

« L'État malgache, par l'intermédiaire du ministère en charge des Transports, investit dans la construction de gares routières de voyageurs et de marchandises en promouvant le partenariat public-privé ou en consacrant des ressources propres internes dans le programme d'investissements publics depuis 2009. Conscient de l'importance des infrastructures de transport, les responsables s'attèlent à leurs renforcements », soutient un responsable.

Concernant l'élaboration d'un cadre règlementaire favorisant le renforcement de l'assiette des services des transports routiers et garantissant la protection des investissements réalisés qui est déjà initiée, notre interlocuteur note que c'est une initiative qui assurera la normalisation des infrastructures de transport à travers la conception de plan type en tenant compte des spécifications des différentes régions, la gestion efficace de toutes les infrastructures de transport et leur développement.

Transporteurs routiers

Un nombre en constante croissance

Les analystes révèlent que suite à la libéralisation du sous-secteur, notamment le transporteur public routier de voyageurs, un net accroissement de l'effectif des opérateurs et une exploitation profane des transports publics routiers ont été ressentis. Des essais de normalisation ont été réalisés mais ont été inefficaces. La structure de coopérative, l'exploitation des transports routiers à titre d'activité secondaire et le système de location opté par la plupart des opérateurs ne font qu'aggraver l'anarchie au niveau du sous-secteur. « L'État doit entreprendre les mesures nécessaires pour un ajustement progressif du sous-secteur allant vers la professionnalisation des opérateurs, compte tenu de sa vulnérabilité.

Ces mesures doivent comprendre les transports intermédiaires », constate Jean Solo avant de noter l'importance de la mise en place d'un centre de formation des opérateurs et de leurs préposés. Ce transporteur qui fait aussi remarquer que la libéralisation du sous-secteur a conduit à une délivrance massive d'autorisations d'exploiter qui ne sont plus, à ce jour, valides pour la plupart. En l'absence d'outil de régulation approprié, compte tenu de la faiblesse de l'Administration dans la mise en application ou la mise à jour des textes régissant le sous-secteur, la mise en adéquation du cadre d'exploitation avec le contexte actuel n'a pas pu être réalisée. Ce qui a amplifié la désorganisation du sous-secteur. Des études ont été programmées afin de rectifier cette situation.

On attend donc la suite, comme on attend les fruits des actions entreprises pour le renforcement de la sécurité routière à travers l'accélération de la publication des textes d'application, l'éducation et la sensibilisation sur la sécurité routière, la responsabilisation de toutes les parties concernées à travers une clarification des responsabilités et le renforcement de la synergie des pouvoirs publics, notamment le ministère en charge des Transports et les Forces de l'Ordre, la gestion rigoureuse de l'octroi de permis de conduire ainsi que l'amélioration de la gestion de la sécurité routière.

Selon une ONG impliquée depuis des années dans le secteur du transport terrestre, les stratégies publiques avancées sont prioritairement orientées sur le transport public routier des voyageurs, qui se trouve être le sous-secteur le plus important et le plus vulnérable au niveau du secteur des transports routiers. Sur le plan général, elles sont toutefois valables pour les autres sous-secteurs, notamment le transport public routier de marchandises, le transport de location et les transports intermédiaires.

VERBATIM

Mirambololona Ratovohery, directrice générale de l'Agence des transports terrestres (ATT)

« Notre feuille de route pour le développement du transport routier repose sur trois axes dans ses perspectives. D'abord le développement d'un service de proximité au bénéfice des usagers, notamment l'ouverture de nouvelles lignes de transports dans les régions éloignées. Puis, le renforcement des capacités de tous les acteurs intervenant dans le domaine du transport terrestre. Et enfin, la consolidation de la digitalisation afin de bénéficier des données fiables dans la gestion de l'agence ainsi que dans les prises de décision ».

Lita Rabetsara, dirigeant d'une organisation de défense des consommateurs

« Opérationnaliser les gares routières existantes éviterait la forte concentration de personnes à un seul endroit. Raison pour laquelle nous avons toujours invité l'État à rendre effectives les infrastructures déjà créées. Cela ne pourrait que profiter grandement à la population. Outre le fait que cela évite l'attroupement dans un seul et unique endroit, cela désengorgera également la circulation dans la capitale et dans les autres villes ».

LE TRANSPORT ROUTIER EN CHIFFRES

AllAfrica publie environ 400 articles par jour provenant de plus de 100 organes de presse et plus de 500 autres institutions et particuliers, représentant une diversité de positions sur tous les sujets. Nous publions aussi bien les informations et opinions de l'opposition que celles du gouvernement et leurs porte-paroles. Les pourvoyeurs d'informations, identifiés sur chaque article, gardent l'entière responsabilité éditoriale de leur production. En effet AllAfrica n'a pas le droit de modifier ou de corriger leurs contenus.

Les articles et documents identifiant AllAfrica comme source sont produits ou commandés par AllAfrica. Pour tous vos commentaires ou questions, contactez-nous ici.