Le chef d'état-major des forces terrestres de l'armée congolaise, le lieutenant général Fall Sikabwe Asinda a présidé, vendredi 3 novembre au camp major Vangu à Lubumbashi, à la cérémonie de présentation et de remise de l'étendard au tout nouveau commandant de la vingt-deuxième région militaire, le général de brigade Eddy Kapend Irung.
Ce dernier remplace le général major Mutara Smith rappelé à Kinshasa après avoir passé trois ans à la tête de cette région militaire qui comprend toutes les provinces issues de l'ancien Katanga.
C'est devant les policiers et militaires de différentes unités que cette cérémonie de remise de l'étendard a eu lieu.
Prenant la parole, le chef d'état-major des forces terrestres a commencé par rappeler leur serment :
« Ne jamais trahir le Congo ».
Appelant à lui le nouveau commandant de la vingt-deuxième région militaire, le chef d'état-major des forces terrestres a d'abord fait la lecture de l'ordonnance nommant le général de brigade Eddy Kapend ; et ensuite a invité les officiers généraux, les officiers supérieurs, les officiers subalternes, les sous-officiers, les caporaux, les matelots et autres soldats à obéir aux ordres qu'il donnera pour le bien du pays.
Enfin, le chef d'état-major des forces terrestres, le lieutenant général Fall Sikabwe a procédé à la remise de l'étendard :
« Général de brigade Kapend Irung Eddy, je vous remets cet étendard symbole du commandement de la vingt-deuxième région militaire, vous le garderez jalousement, vous le protègerez, vous le défendrez jusqu'au sacrifice suprême ».
Le général de brigade Eddy Kapend a donc reçu cet étendard, symbole de commandement qui marque ainsi sa prise de fonction.
La cérémonie s'est clôturée par le défilé de toutes les troupes présentes.
Portrait d'Eddy Kapend
Eddy Kapend est originaire du Sud-katanga où il est né en 1960. Il est le cousin de l'ancien président Laurent Désiré Kabila. Détenteur d'une licence en philosophie et en droit de l'Université de Lubumbashi, il sert dans l'administration sous le régime de feu Mobutu Sese Seko.
Formé militairement en Angola au sein des Tigres katangais, il se rapproche de l'Union des fédéralistes et des républicains indépendants en1990. Quelques années plus tard, il servira dans l'armée congolaise, au grade de colonel, après la prise du pouvoir de Kinshasa par la rébellion de l'AFDL que dirige son cousin Laurent Désiré Kabila, devenu Président de la République.
Le 15 mars 2002 devant la Cour d'ordre militaire, s'ouvre un procès l'impliquant dans l'assassinat de ce dernier.
A l'issue de ce procès, il est dégalonné à l'audience publique sans être révoqué par ordonnance présidentielle, conformément aux dispositions de la loi du 17 juillet 1981 portant statut du personnel de carrière des services publics de l'Etat, unique texte applicable même aux militaires à l'époque.
Une décision de condamnation à la peine capitale est prononcée contre lui le 7 janvier 2003.
De sa réintégration dans l'armée
La décision judiciaire qui maintient Eddy Kapend en prison pendant deux décennies n'est jamais signifiée ni retrouvée jusqu'à ce jour, soutient-t-il.
En 2013, une résolution de la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples demande au pouvoir de Joseph Kabila d'invalider la décision l'ayant condamné, d'indemniser tous les condamnés, les réhabiliter et réorganiser un nouveau procès « plus juste et plus équitable ».
En application de cette résolution, Eddy Kapend est à nouveau mécanisé, retrouve son grade, son numéro matricule et doté d'une nouvelle tenue militaire mais il est sans fonction et demeure en prison, selon les affirmations de son avocat et proche Patient Matuka.
Au cours d'une célébration eucharistique à l'aumônerie catholique de la prison centrale de Makala en 2018, à l'occasion de la commémoration de la mort de Laurent-Désiré Kabila, il arbore son béret militaire et témoigne de son innocence dans l'assassinat de Kabila.
Lui et tous ses coaccusés, 135 au départ dont d'autres décédés en prison, plaident alors en vain, dans une lettre ouverte adressée au Président de la République, pour leur réinsertion socioprofessionnelle en exécution de la décision de la Commission africaine des droits de l'homme.
C'est en 2021 que le Président de la République Felix Tshisekedi daigne leur accorder une grâce présidentielle collective, après avoir d'abord commué leur peine en perpétuité.
« Je n'ai pas le sang de M'zee Laurent-Désiré Kabila sur les mains. J'avais déjà été réhabilité dans l'armée et je reste à la disposition du commandant suprême », a déclaré Eddy Kapend lors d'une conférence de presse le 17 mai 2022, date commémorative de l'entrée de l'AFDL à Kinshasa.
Gracié, attendant des nouvelles fonctions, il préparait sa thèse au terme d'une formation militaire complémentaire au Collège des hautes études des stratégies et de défense (CHESD).
Le 19 octobre 2023, l'ordonnance de sa nomination et réintégration dans l'armée abroge tous les actes antérieurs contraires à sa promotion.
Le texte dispose qu'il s'agit d'une mesure exceptionnelle et d'assimilation, conformément au règlement militaire.
Le général Eddy Kapend réintègre donc l'armée congolaise sous le signe d'une citation de Laurent Désiré Kabila et serment des FARDC qu'il aime répéter à qui veut l'entendre : « Ne jamais trahir le Congo ».