Ile Maurice: Allô, fausse polémique ?

L'exercice de réenregistrement des cartes SIM a débuté cette semaine, le mardi 31 octobre plus précisément. Ceci dans le cadre des Information and Communication Technologies (Registration of SIM) Regulations 2023, comme recommandé dans le rapport de la Commission d'enquête sur le trafic de drogue, présidée par l'ancien juge Paul Lam Shang Leen en juin 2018.

Ce rapport, il est bon de le rappeler, a mis en lumière les méthodes utilisées par les trafiquants de drogue, y compris à l'intérieur de la prison, pour commettre leurs activités illégales. Ils utilisent des portables et des numéros de téléphone pour tromper les enquêteurs et les orienter vers de fausses informations. Les malfrats utilisent ainsi des cartes SIM enregistrées au nom de travailleurs étrangers qui ne sont plus au pays, ou même de touristes. Lors des enquêtes menées par la brigade antidrogue, de nombreux numéros de téléphone sont apparus, mais il est difficile de déterminer qui sont les véritables propriétaires de ces numéros. Ainsi, l'objectif du réenregistrement, assurent les autorités, est d'assurer que chaque carte SIM en service soit enregistrée au nom de l'individu qui l'utilise, renforçant ainsi la protection des abonnés contre l'usurpation d'identité, de diverses formes de fraudes et autres pratiques malveillantes.

L'Information and Communication Technologies Authority (ICTA) et les opérateurs de téléphonie mobile, my.T, Emtel et Chili, ont animé une conférence de presse le lundi 30 octobre pour donner des détails. Les détenteurs de cartes SIM ont jusqu'au 30 avril 2024 pour procéder au réenregistrement en ligne, sur les sites web ou les applications mis en place par les opérateurs, ou en personne dans les succursales. Cependant, il est recommandé de ne pas attendre la dernière minute pour effectuer l'enregistrement. Après le 30 avril 2024, toutes les cartes SIM non réenregistrées seront automatiquement désactivées.

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Il y a environ 2,3 millions de cartes SIM en circulation.

Selfie

Chaque opérateur a mis en place sa propre plateforme, mais suit le même procédé mis en place par l'ICTA. Les informations nécessaires pour s'enregistrer comprennent la validation du numéro de téléphone, l'identification de la citoyenneté, le numéro de la carte d'identité (avant et arrière), les noms, les prénoms et l'adresse. «Un selfie du détenteur de la carte SIM est aussi nécessaire pour confirmer que c'est bien la personne elle-même qui s'enregistre», indique Kresh Goomany, Chief Executive Officer (CEO) d'Emtel.

Afin de faciliter le processus de réinscription, Emtel a mis en place une application mobile, MoEmtel. MTML propose également une application mobile. Les deux applications mobiles sont disponibles sur l'App Store et sur le Play Store, et pour Mauritius Telecom, un lien sera accessible à partir de son site web ou sur le Telecom App.

Appréhension

Certains utilisateurs ont des appréhensions et se posent de nombreuses questions. Pourquoi avoir attendu si longtemps avant de mettre en place le réenregistrement ? En vue des élections générales qui approchent, les partis politiques auront-ils accès à ces données ? Pourquoi réinsérer des données personnelles et une photo de soi alors qu'il y a déjà la carte d'identité biométrique ?

Jérôme Louis, Director of Engineering de l'ICTA, a expliqué lors du point de presse que le travail a débuté depuis 2018. «Une fois que le rapport a été publié, nous avons examiné la situation. Nous avons entamé des discussions avec différents opérateurs et parties prenantes pour déterminer comment mettre en oeuvre les recommandations du rapport.» Relevant que l'un des défis majeurs était le grand nombre de cartes SIM déjà en circulation, ainsi que le problème des 'black phones'. «Nous devions trouver un moyen de régulariser la situation pour ceux qui utilisent une carte SIM enregistrée au nom d'un touriste ou d'une personne décédée. La seule solution était de procéder au réenregistrement, offrant ainsi à ceux dont la carte SIM n'est pas enregistrée à leur nom l'opportunité de le faire.» Un autre défi a été de trouver une solution pour permettre aux utilisateurs de réenregistrer leurs cartes SIM sans avoir à se rendre physiquement chez les opérateurs, considérant le grand nombre de cartes SIM en circulation. «La mise en place d'un système en ligne a nécessité beaucoup de travail, notamment en matière de sécurité. Cela a été fait pour garantir que le réenregistrement se déroule correctement.» Par ailleurs, les opérateurs de téléphonie assurent que les données sont en sécurité et cryptées et que l'accès à celles-ci est restreint.

Hector Tuyau, l'ex-assistant surintendant de police (ASP), qui a été membre de l'Anti-Drug and Smuggling Unit et aussi enquêteur principal dans la commission d'enquête, estime qu'avec un grand nombre de cartes SIM illégales en circulation, notamment dans les prisons, le réenregistrement des cartes SIM est une bonne chose. «L'utilisation d'une photo est un moyen de vérification important. De toute façon, lorsqu'une personne se rend physiquement dans une succursale de téléphonie, elle doit montrer son visage. C'est un faux débat.»

Hassenjee Ruhomally, informaticien, affirme également que cela présente plusieurs avantages. Il ajoute que le réenregistrement est une pratique courante dans de nombreux pays et que «ce n'est pas une pratique inhabituelle ou dictatoriale». Toutefois, il remet en question la demande de photo. «Puisque nous disposons déjà de cartes d'identité biométrique avec notre visage dessus, pourquoi avons-nous besoin d'une deuxième photo ? Peut-être pourrait-on justifier une deuxième photo si la carte d'identité était différente, soit comme l'ancienne carte. Mais dans le cas d'une carte d'identité biométrique, cela ne semble pas nécessaire.»

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