L'audience du procès dit de « Charbon fin » s'est poursuivie, le mardi 7 novembre 2023, au Tribunal de grande instance Ouaga I.
C'est à un véritable « ping-pong » entre experts que l'on a assisté à l'audience du mardi 7 novembre 2023 au Tribunal de grande instance Ouaga I dans le cadre du procès dit de « Charbon fin ». Appelé à la barre dès l'entame de l'audience, le Pr Arsène Yonli, enseignant-chercheur en biochimie dont l'expertise a été sollicitée par le parquet dans le cadre du procès, a dit douter purement et simplement de la sincérité de l'expertise judiciaire.
Et ce, au regard des conclusions auxquelles il est parvenu dans le cadre de l'expertise additive qui lui a été demandée par le parquet. « Il y a plusieurs conclusions qui ne découlent pas d'une méthodologie scientifique. Et donc je ne suis pas d'accord avec le rapport d'expertise judiciaire », a-t-il soutenu. Se justifiant, il a dit avoir constaté une teneur d'eau de 40% sur les corps analysés.
Ce qui prouve scientifiquement, selon lui, que ce n'est pas du charbon fin. « Au-delà de 20% de teneur, c'est rigoureusement impossible que ces matières soient du charbon fin », a-t-il attesté formellement face aux interrogations du parquet. L'expert a, par ailleurs, confié n'avoir trouvé aucune trace de carbone dans les corps analysés. Ce qui le conforte dans sa position selon laquelle ce n'est pas du charbon fin.
« Le caractère composite de la cargaison ne pose aucun débat. C'est du minerai. Il y avait des aspects différents du charbon fin parce qu'il n'y avait pas de carbone ! », a-t-il lancé avec assurance. Son assurance et ses déclarations ont provoqué le courroux de la défense qui a, à nouveau, engagé le débat sur sa qualité dans le procès. « Un expert non commis ne peut pas venir contredire une expertise judiciaire », ont insisté les avocats de la défense.
« L'expertise judiciaire ne sert qu'à titre informatif »
Pour eux, il y a lieu de définir clairement la qualité du Pr Yonli dans le cadre de ce procès. Pour couper court au débat, le tribunal a précisé que même l'expertise judiciaire ne sert qu'à titre d'information. « Si le tribunal juge nécessaire de faire appel à d'autres experts pour plus de précisions, il peut le faire », a rappelé le président du tribunal. Et ce, en réponse à l'un des conseils de Bolloré Transport et Logsitics qui a estimé que toutes les parties devaient au préalable être informées de l'intervention du Pr Yonli en tant qu'expert dans le procès.
« N'importe qui ne doit pas intervenir à ce procès sans que toutes les parties ne soient au préalable informées. Cela donne l'impression que les choses sont déjà jouées », s'est-il plaint. Une suspension de quelques minutes a été préconisée par le président du tribunal afin de permettre à l'ensemble des parties de se retrouver dans son cabinet pour trancher sur la question.
A la reprise de l'audience, une trentaine de minutes plus tard, les deux experts judiciaires ont été invités à se prononcer sur l'exposé du Pr Yonli qui a remis en cause les résultats de leur expertise. A tour de rôle, Joël Ilboudo et Moussa Gomina ont défendu avec hargne et chiffres à l'appui les conclusions auxquelles ils sont parvenus grâce à une méthodologie « rigoureuse ». C'est sur leur exposé que l'audience a été suspendue pour être reprise aujourd'hui avec la poursuite des débats sur les conclusions de l'expertise judiciaire.