De gauche à droite : Martine Dennis, modératrice du panel, Mme ;Amina Benkhadra, PDG d'ONHYM au Maroc ; Mme Swazi Tshabalala, vice-présidente principale de la Banque africaine de développement et Mme Georgette Sakyi Barnes Addo, directrice exécutive de Georgette Barnes Limited et présidente de l'Association des femmes dans l'industrie minière au Ghana.
Il y a de réels moyens pour l'Afrique de tirer parti de ses riches minéraux stratégiques pour se développer, estiment des experts réunis mercredi à Marrakech au Maroc, à l'occasion des Market Days de l'Africa Investment Forum qui se tient du 8 au 10 novembre 2023.
L'Africa Investment Forum est le principal événement organisé en Afrique par la Banque africaine de développement et sept partenaires pour mobiliser des investissements pour des projets structurants en impliquant le secteur privé africain.
« Nos ressources naturelles vont créer une prospérité c'est certain, donc les gouvernements doivent créer les conditions pour faciliter cette prospérité », a déclaré, Mme Georgette Sakyi Barnes Addo, directrice exécutive de Georgette Barnes Limited et présidente de l'Association des femmes dans l'industrie minière au Ghana. Elle s'exprimait à la session du panel intitulé, « Minéraux stratégiques : financer une nouvelle ère de prospérité mondiale ». Parmi les panélistes figuraient Mme Swazi Tshabalala, vice-présidente principale du Groupe de la Banque africaine de développement, et Mme Amina Benkhadra, PDG d'ONHYM au Maroc. Martine Dennis, journaliste et présentatrice TV a modéré le panel.
Pour les trois panélistes, l'Afrique est riche en minéraux stratégiques, notamment en terres rares, en lithium, graphite, bauxite, manganèse et en cobalt, essentiels pour les technologies modernes. Toutefois, pour exploiter la valeur de ces minéraux, il faut investir dans les infrastructures, l'innovation et les pratiques durables et tirer parti des relocalisations pour développer le tissu industriel local. Les minéraux stratégiques de l'Afrique doivent faire l'objet de transformation avant leur exportation. Cela permet de développer les chaînes de valeur et de créer des emplois pour les populations locales.
Les panélistes ont cité l'exemple de la Tanzanie qui interdit l'exportation des minéraux stratégiques sans valeur ajoutée ou de l'Indonésie qui a interdit l'exportation du nickel, ce qui lui a permis de créer 13 usines de raffinage de son minerai.
Pour Mme Benkhadra, les pays africains devraient transformer leurs métaux stratégiques pour produire un métal proche de la valeur finale avant exportation.
« Il faut imposer des restrictions sur les exportations. Nous devons profiter des minerais que nous avons », a renchéri Mme Tshabalala.
Plutôt à l'ouverture de l'Africa Investment Forum, le président de la Banque africaine de développement, Akinwumi Adesina citant une étude de Bloomberg NEF avait souligné que le coût de fabrication des précurseurs de batteries lithium-ion en Afrique est trois fois moins élevé qu'aux États-Unis, en Chine et en Pologne.
Les panélistes appellent les pays africains à renforcer le partage d'expériences et de bonnes pratiques entre entreprises et pays africains et à renforcer l'intégration régionale. Elles plaident aussi pour la réduction des risques pour faire en sorte que le secteur privé investisse avec un risque politique « acceptable ».
« Il faut vraiment libérer les chaînes de valeur et voir quels sont les plans de contenu local pour déterminer quelle entreprise peut fournir tel service ou tel autre. Il y en a qui font du manganèse, de l'or, du diamant ; il faut identifier des entreprises qui ont des capacités et les produits qui peuvent être fabriquées sur le continent », a indiqué Mme Tshabalala.
Pour Mme Barnes Addo, outre la multiplicité des monnaies en Afrique, il y a d'énormes difficultés pour le commerce interafricain et il y a nécessité d'harmoniser les droits de douanes, et mettre en place des plateformes communes aux pays pour attirer les investissements. L'accès au financement, surtout pour les femmes, constitue une autre difficulté.
« J'ai une trentaine d'années dans mon secteur et une dizaine en tant que cheffe d'entreprises mais c'est difficile d'avoir accès au crédit, on vous pose même des questions sur votre mari », a-t-elle expliqué.
En faisant preuve d'imagination, les obstacles liés aux financements des entreprises, surtout celles des femmes, peuvent être levés surtout avec des mesures innovantes.
« La Banque africaine de développement a de plus en plus des accords avec les banques pour leur demander de financer les entreprises des femmes à des taux concessionnels. Il faut juste avoir les bons instruments financiers pour permettre aux femmes d'avoir les financements dont elles ont besoin pour développer leurs entreprises. Il faut être plus téméraire. 40 milliards de dollars ne vont pas à des femmes chaque année en Afrique or, les femmes montent des entreprises à partir de rien et elles marchent », a insisté Mme Tshabalala.
« Nous sommes optimistes tout en ayant conscience des difficultés qui se posent à nous », a conclu Mme Benkhadra.