Georges Weah # Joseph Boakai. Telle est l'affiche du second tour de la présidentielle qui a lieu aujourd'hui, 14 novembre 2023, au Liberia où les électeurs sont appelés aux urnes pour élire le nouveau locataire de l'Executive Mansion, le palais présidentiel. Une affiche qui était déjà celle de 2017 où les deux personnalités politiques s'étaient déjà retrouvées face à face au même niveau de la compétition électorale, dans la course à la succession de Ellen Johnson Sirleaf.
A l'époque, c'est l'ex-super star du football mondial qui l'avait remporté sans coup férir avec 61,54% des voix contre 38,46% pour son illustre adversaire. Six ans plus tard, on se demande qui remportera le match retour tant les deux candidats arrivés en tête de peloton de la vingtaine de prétendants au trône, sont au coude-à-coude à l'issue des résultats du premier tour qui s'est déroulé le 10 octobre dernier. Lesquels résultats ont crédité l'enfant des bidonvilles devenu président, de 43,83% des voix contre 43,44% pour son farouche challenger.
Avec le scrutin de ce 14 novembre, les Libériens sont à un carrefour de l'histoire de leur pays
C'est dire si la partie paraît pour le moins très serrée entre des adversaires qui se connaissent bien, mais dont le sort pour conduire les destinées du premier pays indépendant d'Afrique, est soumis à l'arbitrage du peuple libérien. Et bien malin qui saurait prédire le futur vainqueur de cette présidentielle dont les enjeux semblent aller au-delà de la personnalité des deux candidats pour engager l'avenir d'une nation en pleine reconstruction.
Un Etat qui revient de loin après la période sombre de la guerre civile qui a ravagé le pays pendant plus d'une décennie. Toujours est-il qu'avec un bilan plutôt mitigé sur fond de mécontentement si ce n'est de désenchantement de certains de ses compatriotes, le président George Weah n'est pas loin de jouer son avenir politique à travers cette élection où il est mis en ballotage par son plus farouche opposant.
Un challenger qui, à 78 ans, n'est pas loin de livrer sa dernière bataille pour la conquête du fauteuil présidentiel. C'est dire si avec le scrutin de ce 14 novembre, les Libériens sont à un carrefour de l'histoire de leur pays. Donneront-ils une seconde chance à celui qui reste, à ce jour, le seul Ballon d'or africain, pour redresser la barre d'une gouvernance qui n'a su tenir les promesses, entre autres, de luttes contre la corruption et surtout le chômage des jeunes au point de laisser bien de ses compatriotes sur leur faim au sens propre comme au sens figuré du terme ?
Ou bien, amorceront-ils un virage en décidant de confier les rênes du pays à une autre main, en l'occurrence celle du septuagénaire opposant qui a mené sa campagne sous le slogan « Rescue » (sauvetage) qui ne visait rien d'autre qu'à mettre le doigt sur ce qui passe, à ses yeux, pour être les faiblesses de la gouvernance du président sortant ? L'histoire ne tardera pas à le dire.
L'autre enjeu de ce scrutin reste le taux de participation
En attendant, les résultats serrés du premier tour sont la preuve que la démocratie est en marche au Libéria. Cela est d'autant plus à saluer qu'au regard de son histoire, le Liberia revient de loin. Et les performances de la Commission électorale qui n'est pas loin de relever le défi de l'organisation réussie de ces élections, sont à saluer ; l'on semble bien loin des pays du Gondwana où il est inimaginable qu'un président sortant puisse être mis en ballotage par un quelconque opposant. Il reste maintenant à espérer que le vote se passera dans le calme et la discipline et que les résultats ne donneront pas lieu à ces scènes de violentes contestations post-électorales qui font le lit de l'instabilité politique en Afrique.
C'est pourquoi on ne cessera jamais d'encourager les candidats à n'emprunter que les voies légales de recours en cas de contestation. Et dans le cas du Liberia, cela est d'autant plus un impératif que les affrontements meurtriers du premier tour de la campagne électorale, sonnent comme un appel à la retenue. En tout cas, ces heurts sont symptomatiques d'un pays toujours en convalescence, qui a besoin de conjurer le mauvais sort et de vaincre ses vieux démons. L'autre enjeu de ce scrutin reste le taux de participation, dans un contexte où la campagne pour le second tour, n'a pas soulevé des foules et a plutôt brillé par une certaine monotonie.
En tout état de cause, pour un pays qui sort de l'une des pires guerres civiles de ces trois dernières décennies, plus que l'identité du futur locataire du palais présidentiel, c'est la stabilité du pays qui paraît le principal enjeu. C'est pourquoi il est important pour les différents acteurs, de jouer balle à terre en privilégiant la non-violence et en ayant à coeur la préservation de la paix. Il y va de l'intérêt de ce pays anglophone d'Afrique de l'Ouest qui a besoin de se reconstruire sur des bases solides de la cohésion sociale.