Ils sont en principe treize candidats à s'aligner aujourd'hui à la course à la présidentielle malgache. En principe seulement, car 10 prétendants au fauteuil suprême, parmi lesquels l'ancien président Marc Ravalomanana, ont appelé au boycott du scrutin et organisé ces derniers jours des manifestations de protestation.
Réunis dans une coalition, ils dénoncent d'une part l'éligibilité du chef de l'Etat sortant, Andry Rajoelina, qui a acquis secrètement la nationalité française en 2014, et d'autre part des irrégularités dans l'organisation du scrutin, notamment des «milliers de bureaux de vote fictifs».
Il faut dire qu'ils ne sont pas seuls à s'être élevés contre les imperfections du processus électoral. Il n'y a pas jusqu'à la présidente de l'Assemblée, Christine Razanamahasoa, qui n'ait donné de la voix pour reporter le scrutin. En vain.
TGV comme on le surnomme, du fait de sa rapide ascension politique et du nom de son parti, Tanora malaGasy Vonona (jeunes Malgaches déterminés), est bien lancé et ne compte pas s'arrêter en si bon chemin, quitte à foncer droit dans le mur.
L'homme d'affaires prospère qui fut dj dans une autre vie avait été élu en 2018 avec 55,7% des voies au second tour face à Marc Ravalomanana. Il accédait ainsi pour la seconde fois à la tête du pays après l'avoir dirigé en qualité de président de la haute autorité de la Transition entre 2009 et 2013 avant de passer la main à Hery Rajaonarimampianina à l'issue d'élections démocratiques.
Cinq ans après, il met donc son mandat en jeu dans les circonstances troubles qu'on sait, mais aussi avec un mandat pour le moins mitigé. Plus de 80% de la population malgache vit toujours sous le seuil de pauvreté ; seulement 54,4% de la population a accès à l'eau et le prix des biens de consommation a augmenté d'au moins 30% par rapport à 2019. Des chiffres qui jurent avec la campagne presque à l'américaine qui a eu cours ces dernières semaines, où on ne voyait pratiquement qu'un candidat, celui à sa propre succession. Ce ne sont pourtant pas les ressources naturelles et les potentialités touristiques qui manquent sur cette grande île qui semble malheureusement être à la dérive depuis un certain temps.
Cela dit, qu'Andry Rajoelina brigue un second mandat, lesté d'un bilan peu flatteur, ne l'empêchera certainement pas d'être reconduit, vu le contexte dans lequel l'élection se déroule.
Une chose est de gagner le scrutin, une autre est de pouvoir gouverner dans la sérénité ; or on a bien peur que tous les problèmes qui ont entouré ce rendez-vous ne préparent des lendemains électoraux assez tumultueux et susceptibles de remettre en cause la fragile paix sociale dans le pays. On peut le craindre d'autant plus qu'un couvre-feu a été instauré hier dans la capitale après des «actes de sabotage». A moins qu'une fois l'affaire dans le sac, le bientôt quinquagénaire ne gouverne autrement en ouvrant son gouvernement à ses contempteurs. Mais pour le moment, on n'en est pas encore là.
L'affaire a beau sembler être déjà pliée, on va scruter surtout l'engouement des 11 millions de Malgaches appelés aux urnes, à la lumière du taux de participation qui pourrait ne pas être aussi élevé que ça. Mais taux de participation extraordinaire ou pas, ça n'empêchera pas l'ancien maire d'Antananarivo de savourer une victoire qui lui tend déjà les bras.