Le suspense est à son comble et l'attente insoutenable. Pour cause : George Weah et Joseph Boakai, les deux candidats à la présidentielle au Libéria, sont toujours au coude-à-coude au sortir du second tour de la présidentielle qui a mobilisé quelque 2,4 millions d'électeurs dans les urnes, le 14 novembre dernier.
Le match-retour entre l'ancienne gloire du football africain et le vieux routier de la politique libérienne, qui s'annonçait déjà serré au regard des résultats du premier tour, n'a donc pas fait mentir les pronostics. En effet, le vétéran Boakai, 78 ans, qui avait déjà imposé un marquage à la culote à l'unique Africain Ballon d'Or dans un duel aussi rude que décisif, est tout proche de réaliser l'exploit. C'est, du moins, l'impression que donnent les premiers résultats encore partiels du second tour.
Ceux-ci donnent une très courte avance à l'opposant sur le président sortant. En effet, le décompte dans 1 315 bureaux de vote sur un total de 5 890, soit 22,3% des suffrages exprimés, crédite Joseph Boakai de 50,71% et George Weah de 49,29%, selon les données de la Commission électorale nationale communiquées le 15 novembre dernier.
L'ancien vice-président de Mme Ellen Johnson Sirleaf qui joue pratiquement sa dernière carte, va-t-il créer la surprise? Il serait trop tôt de l'affirmer. Mais dirait l'autre, ça ne sent pas bon pour Mister George. D'autant que la star du ballon rond ne semble pas avoir le soutien d'une partie des recalés du premier tour. On se rappelle, en effet, que le troisième à l'issue du premier tour, Edward Appleton, et deux autres des six candidats arrivés en tête, ont appelé à voter pour Boakai au second tour.
Qu'elle soit remportée par Boakai ou par Weah, cette élection est l'expression d'une vitalité démocratique au Libéria
Et pourtant, par son aura d'unique Africain désigné Ballon d'or, couplée à son statut d'ancien gamin des bidonvilles de Monrovia, George Weah avait suscité beaucoup d'espoirs après sa brillante élection en 2017 face au même Boakai. Mais l'enfant du peuple a visiblement déçu. On lui reproche notamment de n'avoir pas tenu ses promesses de campagne et de s'être déconnecté des réalités de ses concitoyens très éprouvés par la vie chère.
Corruption, chômage, etc., le président Weah n'a pas pu apporter de réponses concrètes à ces maux dans un pays qui a longtemps souffert de la guerre civile et de l'épidémie d'Ebola. Mais qu'elle soit remportée par Boakai ou par Weah, cette élection est l'expression d'une vitalité démocratique au Libéria. D'autant qu'un président sortant vient d'être mis en ballotage par son challenger.
C'est assurément un fait qui sort presque de l'ordinaire en Afrique où, comme on le dit, on n'organise pas des élections pour les perdre. Cela dit, il faut saluer l'attitude républicaine des deux candidats, qui a contribué jusque-là au déroulement apaisé du scrutin. C'est tout à leur honneur. Leur sens de responsabilité élevé sera une fois de plus utile après le verdict de la présidentielle afin d'éviter au Libéria, de replonger dans une nouvelle crise après la guerre civile dont il garde toujours les stigmates.