Ile Maurice: Rêves, parti et disque rayé

19 Novembre 2023
opinion

Une bonne foule bigarrée d'environ 3 000 personnes a assisté au meeting de l'alliance PTr-MMM-PMSD vendredi soir à Chemin-Grenier. La plupart était des gens des circonscriptions 13 et 14. Être à l'écoute des villageois alors que les dirigeants parlent permet de mieux comprendre la réaction des électeurs de ces circonscriptions.

Comme des animateurs de radio, divers orateurs ont listé, en vociférant, les manquements du régime actuel et ont rappelé, avec des mots juteux, les scandales qui émaillent la présente législature et qui font régulièrement la une des journaux : manque d'hygiène dans les hôpitaux publics, MedPoint, Angus Road, Affaire Kistnen, Affaire Franklin et les achats d'urgence durant la pandémie, entre autres. Ce qui a excité les oreilles des amateurs de meetings politiques, qui ont sifflé leurs émotions. Cependant, force est de constater que Paul Bérenger a créé un anti-climax quand il a sorti ses expressions galvaudées qui, il faut le reconnaître, n'emballent plus grand monde. «2024 sera une année décisive. Il y aura des développements politiques dans les jours à venir et puis viendra le raz-de-marée électoral !»

Combien de fois le sempiternel leader du MMM nous a-t-il sorti ces phrases qui ne veulent plus dire grand-chose, quand elles viennent de lui ? Quelqu'un au sein des Mauves (peut-être sa fille?) devrait lui dire de changer de disque. On ne le prend plus au sérieux quand il se répète de la sorte, les gens rient.

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J'en ai discuté avec quelques militants de la région. Il faut, me disent-ils, remettre Paul Bérenger dans son contexte à lui. Il a été hors du pouvoir depuis 2005, année durant laquelle il a essayé de conserver son siège comme Premier ministre, avec pour adjoint... Pravind Jugnauth, alors son «petit frère». Mais les Mauriciens n'en ont pas voulu; le tandem s'est alors décomposé. «Petit frère» est devenu dans la bouche de Paul Bérenger «petit crétin». Depuis, Paul Bérenger ne peut plus le regarder, encore moins le sentir.

Après la chute de 2005, les Mauriciens n'ont pas voulu de Paul Bérenger ou de ses alliances en 2010, 2014 et 2019 ! Cela fera donc, 19 ans, l'an prochain que Paul Bérenger, inamovible à la tête de son parti avant même l'élection de Dev Virahsawmy en 1970 à Triolet, court inlassablement derrière le pouvoir perdu, ayant entre-temps réduit son parti à une peau de chagrin. Pourtant, il fait comme si de rien n'était et chaque samedi ou presque il convoque la presse pour sortir des clichés du genre, «ce sera une année décisive», «enough is enough», «développement majeurs à venir», or on ne voit rien venir.

Après les législatives de 2019, Bérenger a même tenté de virer Navin Ramgoolam à la tête du Parti travailliste (alors que lui il reste leader du MMM à vie !) avec le soutien de Xavier-Luc Duval, Roshi Bhadain et... Nando Bodha (qui s'est fait embobiner par le leader MMM qui lui a fait croire qu'il est un PM potentiel). Mais Ramgoolam ne s'est pas laissé faire et a rugi une ou deux fois. Paul Bérenger a alors compris qu'il n'avait pas le choix : il fallait jeter Bodha comme une vieille chaussette et s'agripper à nouveau au pantalon de Navin Ramgoolam, celui-là même qu'il avait blâmé pour la cinglante défaite de 2014 contre l'alliance Lepep.

Dans la foule de Chemin-Grenier, les jeunes ne connaissent pas l'histoire de Paul Bérenger et du MMM. Ils connaissent davantage Xavier-Luc Duval qui est suivi en raison de ses PNQ qui font mouche. Paul Bérenger est, lui, quasi-inexistant au Parlement, sauf quand il se fait expulser pour ses propos orduriers. Les jeunes ne connaissent pas le Bérenger au blouson noir, ni celui de 1982 qui a introduit la Sales Tax et remis l'économie sur les rails, mais ils retiennent l'image d'un vieil homme qui tient un discours déconnecté de leur réalité, qui vend des slogans d'un temps révolu. Et puis les jeunes dans le Sud le savent, à en juger par les divers travaux en cours : les élections n'auront pas lieu en 2024 mais en 2025 !

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