Le gouvernement du Sénégal et le groupe des partenaires internationaux (France, Allemagne, Canada, Royaume-Uni) ont procédé, le jeudi 16 novembre, à Dakar, au lancement du Partenariat pour une transition énergétique juste. Un atelier national de partage sur le nouveau «Pacte financier mondial» pour les peuples et la planète scellé, en juin dernier, lors du sommet de Paris.
La planète terre va mal et ce depuis des années déjà, à cause de l'action de l'homme sur la nature. Du Nord au Sud, les effets climatiques sont réels. Ils se caractérisent par la hausse des températures qui bouleversent sans cesse les conditions climatiques et perturbent l'équilibre naturel habituel. Partout dans le monde, on note un accroissement des températures, es événements extrêmes (inondations) et des sécheresses. Une situation largement imputable aux grandes puissances à la recherche effrénée de gains (forte industrialisation). Du fait de cet appétit, difficile à assouvir, elles (les grandes puissances) ont fini d'impacter négativement, voire mettre en péril l'existence.
Et pourtant, pendant longtemps, elles étaient bien informées des conséquences néfastes de leur industrialisation outrancière sur la planète. Mais, maintenant que certains pays en voie de développement, comme le Sénégal et la République démocratique du Congo (Rdc), ont récemment eu la providence, à leur tour, de découvrir ces énergies fossiles (pétrole et gaz naturel) à exploiter pour s'industrialiser et par ricochet sortir leurs populations de la pauvreté chronique, ces puissances économiques trouvent le moyen de les contrer par des concepts tels que «transition énergétique juste», «décarbonisation ou décarbonation», abandon des énergies fossiles...
Seulement, pour le Sénégal, le président de la République, Macky Sall, avait urbi et orbi, dans des rencontres internationales, marqué son désaccord quant au renoncement ou à l'abandon de l'exploitation de ses ressources naturelles au motif que l'heure est grave pour la planète.
L'INJUSTICE DES GÉANTS INDUSTRIELS
Convaincu que l'exploitation rationnelle de ces ressources naturelles est un gage pour l'émergence du Sénégal, le président Macky Sall s'adressait ainsi, en mai 2022, à son hôte, le chancelier allemand Olaf Scholz : «N'étant pas les plus grands pollueurs puisque n'étant pas industrialisés, il serait injuste, dans la recherche de solution (au réchauffement), qu'on veuille interdire à l'Afrique d'utiliser les ressources naturelles qui sont dans son sous-sol».
Mais, entre-temps, que s'est-il réellement passé pour que le Sénégal retourne sa veste ? Certes, depuis bien longtemps le Sénégal était en bonne piste sur la «transition énergétique» à travers sa stratégie «Gas to Power» adoptée en 2018, qui prévoit de produire l'électricité à partir du gaz, avec l'arrivée de son gaz local, dans le cadre du projet Grand tortue ahmeyim (Gta) d'abord, mais surtout de celui de Yakaar-Téranga dont la production est attendue en 2024-2025. L'arrivée de ce gaz devrait améliorer sensiblement le mix énergétique, avec une forte diminution de l'utilisation du fuel comme intrants de production. D'ailleurs, les centrales de la Senelec sont en train d'être transformées au gaz, pour pouvoir fonctionner en dual-fuel.
Pour rappel, c'est à la COP 26, en novembre 2021, à Glasgow (Ecosse) qu'il a été convenu de n'accorder plus de financements aux énergies fossiles. A la suite de ça, le président Macky Sall s'était offusqué face à cette décision, pour dire qu'il va exploiter son pétrole. Chemin faisant, les conséquences de la guerre Russo-Ukrainienne ont changé la donne. L'Europe, fortement dépendant du gaz Russe dont elle a été sevré a, de connivence avec ses alliés, pris la décision de glisser sur le terrain de la «transition énergétique» pour contrer leur problème d'approvisionnement en gaz, non sans ignorer que celui-ci (gaz) est une énergie fossile comme le pétrole et le charbon.
LE SENEGAL «LIMITE» L'EXPLOITATION DE SES RESSOURCES PETROLIERES ET GAZIERES
C'est en réponse au changement géopolitique au plan international, lié à la guerre en Ukraine et dont les conséquences en consommation de gaz ont été lourdes pour l'Europe qu'est née l'idée de transition énergétique. Des puissances comme les Etats-Unis, le Canada et l'Union européenne (la France, le Royaume-Uni, l'Allemagne) se sont résolu à financer la transition énergétique de l'Afrique du Sud, qui dépend à 85% du charbon, pour son électricité. A la COP 27, le Sénégal s'est montré intéressé par cette «transition énergétique juste».
LE SENEGAL SEDUIT PAR 1.639 MILLIARDS DE FRANCS CFA
En juin 2023, à Paris, le Sénégal s'est engagé à amorcer cette «transition énergétique juste». Et ce, grâce au Partenariat pour la Transition énergétique juste, sous l'appellation JETP, qui permettra de bénéficier de 2,5 milliards d'euros de financement, soit 1.639 milliards 892 millions 500 mille francs CFA. Un mécanisme de mobilisation de financements publics et privés pour aider les pays en développement à abandonner les énergies fossiles.
Mais, le hic, c'est la mobilisation de ces 2,5 milliards d'euros sur la période de 3 à 5 ans, à compter de 2023. Il y a tant d'engagements qui ont été pris pour soutenir les efforts de lutte contre les effets climatiques, tel le projet de la Grande muraille verte..., par ces partenaires internationaux et certaines banques multilatérales de développement qui n'ont pas été honorés.
LE SENEGAL SOUS LE DIKTAT DES GRANDS POLLUEURS
Le Sénégal devrait-t-il s'inscrire ou suivre l'agenda des grands pollueurs du monde ? Les priorités du Sénégal sont-elles les mêmes que celles de ces grandes puissances ? Que gagne le Sénégal en contrepartie de ces 2,5 milliards d'euros ? Pour quelle temporalité ? En signant cet engagement, le Sénégal pourra-t-il avoir les coudées franches pour exploiter ses ressources, si les engagements pris ne sont pas respectés ou alors si d'autres crises venaient à affecter le monde, obligeant ces mêmes partenaires à reporter la mobilisation des financements ? Pendant ce temps, quelles solutions à nos problèmes de développement ? Autant de questions que nos gouvernants semblent occulter et qui peuvent avoir des conséquences directes sur nos politiques de développement durable.