Au Burkina Faso, les réquisitions pour le front anti-djihadiste sont-elles légales ? Plusieurs personnalités de la société civile réquisitionnées avaient demandé la suspension de cette mesure décidée, par la junte, officiellement pour lutter contre le terrorisme. La juge des référés a rejeté, ce lundi 20 novembre, cette demande.
La juge des référés n'a pas accepté la demande de plusieurs personnalités de la société civile ni celle de l'ancien ministre, Ablassé Ouedraogo. Tous avaient déposé un recours pour suspendre leur réquisition au sein des supplétifs Volontaires pour la défense de la patrie (VDP), une réquisition décidée par les autorités de transition, officiellement pour servir la lutte contre les groupes armés et terroristes, mais les organisations de la société civile et les syndicats dénoncent plutôt un moyen de faire taire les voix critiques.
Parmi ces voix critiques que la justice vient de débouter, il y a celles de Rasmané Zinaba et Bassirou Badjo, deux membres du Balai citoyen, réquisitionnés au début de ce mois de novembre, le journaliste et ancien de la profession, Issaka Lingani, ainsi que son jeune confrère, Yacouba Ladji Bama.
Figurent également le Dr Daouda Diallo qui préside le Collectif contre l'impunité et la stigmatisation des communautés, le secrétaire général de l'Organisation démocratique de la Jeunesse du Burkina Faso (ODJ, Gabin Korbéogo, et puis aussi le président du parti Le Faso Autrement, Ablassé Ouedraogo. En juillet dernier, l'ex-ministre des Affaires étrangères, aujourd'hui âgé de 70 ans, accusait la junte de « violation des droits de l'homme » et dénonçait déjà les réquisitions de « citoyens menacés, muselés et enrôlés de force au sein des VDP » pour leur liberté d'expression !
« Un détournement de pouvoir »
Pour justifier le rejet de leur demande de suspension de leur réquisition, la juge des référés a expliqué ne pas avoir ce pouvoir dès lors qu'il s'agit d'une question de sécurité nationale. Mais selon Me Guy Hervé Kam, « ces actes de réquisitions », sont un habillage juridique de « l'arbitraire ». « Cette décision de réquisition n'est pas liée à la sécurisation. Ce sont des décisions sanctions » a rappelé pour sa part, maitre Prosper Farama, qui considère ces enrôlements comme « un détournement de pouvoir ».
Cette décision marque le début d'un feuilleton judiciaire sur la légalité des réquisitions dans le cadre de la lutte contre les groupes armés et terroristes. « Nous allons avoir recours à toutes les possibilités que nous offre la loi », ont ajouté les avocats.