Afrique: Mohamed Hedi Abdelhak, ancien défenseur axial du Club Africain - «Le smoking de gala de Khaled Touati»

26 Novembre 2023

Sa carrière a été illuminée par deux exploits majeurs : la Coupe du monde juniors Russie-1985 avec la bande à Mrad Mahjoub, et la «Roubaïa» 1991-92 avec le Club Africain.

Mohamed Hedi Abdelhak a préféré ranger ses crampons à seulement 27 ans pour aussitôt affronter la fameuse reconversion toujours délicate.

Défenseur axial d'une rare élégance, il s'est rendu célèbre par sa lourde frappe de très loin, ce qui lui valut d'être par deux fois sacré meilleur buteur clubiste.

Né à La Marsa le 7 mars 1966, Abdelhak signa sa première licence en 1976 pour l'équipe Ecoles de l'Etoile Olympique de Goulette-Kram, avant de rejoindre en 1985 les seniors du CA où il allait évoluer jusqu'en 1992.

Il a remporté la coupe et le championnat de Tunisie 1992, en plus du championnat 1990, la coupe d'Afrique des clubs champions 1991 et la coupe afro-asiatique 1992.

Il a par ailleurs participé à la Coupe du monde juniors 1985 en Russie.

Sa petite carrière d'entraîneur l'a vu exercer à la tête des jeunes d'Al Ourouba saoudien en 2011, et des séniors de l'EOGK en 2017.

Cet ancien fonctionnaire à la STEC, et gérant d'un café, est marié et père de quatre enfants.

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Mohamed Hedi Abdelhak, ne vivez-vous pas un peu dans le regret de n'avoir guère connu la carrière internationale espérée ?

Non, pas vraiment. En sélection, il y avait Khaled Ben Yahia et Taoufik Hicheri à l'axe.

Le sélectionneur Jean Vincent m'a convoqué pour le tournoi de Paris-Bercy en salle avec la participation du Bayern, Marseille... J'ai également disputé plusieurs matches amicaux.

Vous incarnez l'exemple vivant du défenseur axial qui aime attaquer et marquer des buts. Votre frappe lourde vous y a aidé.

Est-ce un don naturel ou plutôt le fruit du travail ?

Il y a tout à la fois les prédispositions naturelles, mais aussi le travail.

Par exemple, en sélection juniors, la première fois où j'ai été convoqué, nous étions six joueurs à rester à la fin de la séance avec notre coach Mrad Mahjoub pour tester la qualité de notre frappe.

Un jour, Mahjoub s'est adressé à moi: «On m'a beaucoup parlé de votre tir imparable. Montrez-moi ce que vous savez faire !».

Eh bien, bombardé de toutes parts, le gardien de l'Union Sportive Monastirienne, qui était avec nous, a dû mettre le plâtre à la main.

Sur un de mes tirs, il a mal calculé la force de la frappe.

Il ne faut jamais y aller avec les mains «molles», de façon indécise.

Le secret résiderait-il dans la puissance de frappe ?

Non, pas vraiment. Il y a une technique de frappe qui fait que, par exemple, Cristiano Ronaldo donne un effet flottant à son tir.

J'aimais tenter ma chance des longues distances que ce soit du coup de pied ou de l'intérieur, parfois même de l'extérieur.

Cela m'a valu de terminer deux fois meilleur buteur du Club Africain: en 1987 avec 6 réalisations, et en 1991 avec 11 buts. Pourtant, je suis un simple défenseur.

Tout le temps ?

Pratiquement. J'ai parfois été milieu polyvalent. Mais le plus gros de ma carrière, je l'ai passé comme pivot ou libero. Mais c'est au poste de libero que je me sens le mieux.

J'aime subtiliser le ballon à l'adversaire ou l'anticiper proprement, avant de relancer avec précision.

Grâce à une bonne lecture du jeu, je peux économiser mes efforts.

Une fois, en sortant du terrain après un match très dur contre le Club Sportif des Cheminots, disputé sous une pluie battante et sur une pelouse lourde, avec boue et marécages, mon coéquipier Khaled Touati me lança, pince-sans-rire, car c'est vraiment un «numéro»: «Il ne manque plus que je vous apporte un smoking de gala ! Etes-vous certain d'avoir joué ce match-là avec nous?».

Quel est votre plus mauvais souvenir ?

Une déchirure à la cuisse droite que j'ai dû soigner en France.

Et les deux penalties ratés dans un seul match face à l'Espérance Sportive de Zarzis.

Cela annonçait déjà le début du déclin.

Le foot d'aujourd'hui vous attire-t-il toujours ?

Il y a de l'argent et le public, mais le spectacle est aux abonnés absents.

Je suis favorable aux gros salaires dans le foot car c'est la seule resource du footballeur.

Et puis, la carrière d'un joueur est brève. Il lui est impossible de concilier sport et études.

D'ailleurs, c'est la raison qui fait que je fais très attention à la scolarité de mes enfants. Bref, les gros salaires ne doivent pas choquer.

Quels sont, à vos yeux, les meilleurs footballeurs tunisiens de tous les temps?

Tarek et Agrebi.

Que pensez-vous du phénomène de plus en plus florissant des académies de formation ?

Souvent, on y engage un entraîneur qui ne maîtrise pas son sujet.

L'enfant apprend l'ABC du foot avant de rejoindre la catégorie Ecoles dans un club.

Dans une académie que j'avais ouvert au Kram, le talent ne manquait pas.

Comment passez-vous votre temps libre ?

Le travail à l'Académie me prend beaucoup de mon temps.

Et puis, j'ai, à un certain moment, entraîné les seniors de mon premier club du Kram.

Jadis, je passais beaucoup de temps dans la pêche.

Elle m'a beaucoup aidé lorsque j'ai raccroché.

Il n'est jamais facile de gérer une situation où ceux qui couraient derrière vous hier ne vous adressent même plus la parole aujourd'hui.

Que regardez-vous à la télé?

Les plateaux politiques et les matches de foot anglais.

Je suis fan de Liverpool. Et puis, cette passion pour la série «Choufli Hal» qui peint fidèlement les choses de la vie. Je regarde trois épisodes par jour.

Avec mon fils Ammar, nous regardons un épisode au déjeuner, et un autre au diner sur la tablette.

En plus de celui que diffuse quotidiennement Al Watanya 2. Kamel Touati est formidable.

Et la musique ?

Hassen Dahmani me plaît. En plus des voix classiques éternelles: Oum Kalthoum, Wadii Essafi et Sabah Fakhri. Leur chant est immortel.

Pourquoi votre frère Issam n'a pas percé ?

Attaquant percutant et rapide, il n'a pas eu de chance. Il a débarqué juste après moi au CA.

Il a dû terminer sa carrière à l'US Monastir, AS Djerba et au Kram.

Parlez-nous de votre petite famille...

J'ai épousé Naziha en 1991. Nous avons quatre enfants: Amanallah, qui travaille dans un restaurant, Hakim, diplômé en électricité, Aicha et Ammar.

Racontez-nous une anecdote...

Au cours de la finale retour de la Ligue des champions disputée le 14 décembre 1991 à Kampala contre Nakivubo Villa SC (1-1), il y avait des élections en Ouganda.

Deux partis étaient en lice. Le signe du parti de l'opposition était le V de la victoire.

---Or, les forces de sécurité empêchaient manifestement toute manifestation liée à l'opposition.

En sortant de l'hôtel, j'ai fait le V de la victoire aux gens qui passaient, comme pour les chambrer. Et qu'est-ce que j'ai vu ?

Une jeep de l'armée occupée par des soldats armés jusqu'aux dents est venue m'arrêter.

La couleur de ma peau aidant, ils m'ont pris pour un Ougandais de l'opposition qui les narguait.

Il a fallu l'intervention du personnel de l'hôtel pour me tirer de ce joli traquenard.

Enfin, si vous n'étiez pas dans le foot, dans quel autre domaine vous verrez-vous exercer ?

Nulle part ailleurs. Le foot est l'unique horizon de mon existence.

Tout jeune, il m'arrivait très souvent de disputer six matches par jour.

Dieu merci, mon club m'a donné mon premier emploi, à la STEC en 1985. C'est Mohamed Ali Bouleymane qui m'y a intégré.

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