Afrique: Présidentielle à Madagascar - Le fair-play à la Weah a-t-il (déjà) foutu le camp ?

analyse

La Commission électorale nationale indépendante malgache (CENI) a déclaré le président sortant Andry Rajoelina vainqueur de la présidentielle avec un score de 58,95% Quant aux autres candidats, ils ont obtenu 14,4 % des suffrages, pour l'ex-judoka Siteny Randrianasoloniaiko, et 0,8 %, pourSendrison Daniela Raderanirina. Son plus sérieux adversaire, l'ancien chef de l'Etat Marc Ravalomanana, est, en dépit de son appel au boycott, crédité de 12,10 % des voix par la commission électorale à l'issue du dépouillement des 5,1 millions de bulletins de vote.

Seulement, à peine les résultats ont-ils été annoncés, qu'ils sont contestés. Pendant que le camp présidentiel se réjouit de sa victoire, les perdants ruent vigoureusement dans les brancards. En réalité, ce scrutin portait, à l'origine, les germes de cette contestation avec les appels au boycott, les contestations de la régularité du vote et de sa transparence. Les candidats de l'opposition sont même allés jusqu'à dénier au candidat Rajoelina, alias TGV, le droit de se présenter à cause de sa nationalité française. Rien d'étonnant donc qu'on ait débouché aujourd'hui sur des protestations dont on ne sait pas encore à quoi elles aboutiront.

L'Afrique est, hélas, coutumière de ces scènes où, invraisemblablement les perdants ne reconnaissent pas la victoire de leurs adversaires et s'autoproclament même parfois vainqueurs. Les cas du Camerounais Maurice Kamto, en 2018, qui avait revendiqué sa victoire moins de 24 heures après la fermeture des bureaux de vote (avec les conséquences qu'on sait ; il a passé huit mois derrière les barreaux) et du Congolais Martin Fayulu en République démocratique du Congo, il y a cinq ans, qui avait estimé que la victoire lui avait été volée, sont encore vivaces dans les mémoires. Certains d'entre eux ont même poussé l'outrecuidance jusqu'à organiser leur prestation de serment comme président élu. En 2011, Etienne Tshisekedi (le père de l'actuel président de la RDC) ne s'était-il pas autoproclamé président, allant jusqu'à prêter serment dans sa maison de Kinshasa ?

Fort heureusement, à côté de ces images déplorables, il y a une autre version plus reluisante avec des élections irréprochables, des alternances pacifiques et même des perdants qui ont l'élégance républicaine de reconnaître leur défaite et qui, avant même la proclamation officielle des résultats, félicitent leur challenger. Ce fut le cas au Burkina Faso en 2015 et en 2020 quand des opposants, à commencer par le premier d'entre eux, Zéphirin Diabré, s'en sont allés au siège de campagne du MPP, le parti au pouvoir, féliciter le candidat Roch Marc Christian Kaboré.

Pas plus tard que la semaine dernière au Liberia, c'est Mister Weah, battu à la régulière, qui est sorti du terrain politique avec beaucoup de classe comme il savait si bien le faire au football. « Ce soir, mon parti a perdu l'élection mais le Liberia a gagné. C'est le temps de l'élégance dans la défaite... J'ai parlé au président élu Joseph Boakai pour le féliciter de sa victoire », a-t-il déclaré, suscitant une vague d'émotion et surtout de soulagement pour une nation qui a connu une guerre civile meurtrière 14 ans durant avec plus de 250 000 morts.

Comme quoi, à côté des mauvais exemples, il y a des cas d'école qui vous réconcilient avec l'idéal démocratique. Cette démocratie qui, qu'elle soit exogène, endogène, tropicalisée ou autre, reste, selon le célèbre aphorisme de Winston Churchill, « le pire des systèmes à l'exception de tous les autres ». Cette déclaration recélait toute sa saveur quand on sait que celui qui était surnommé « le vieux lion » l'a faite le 11 novembre 1947 à la Chambre de Communes, au moment où il n'était plus le tout-puissant Premier ministre britannique, mais un simple leader de l'opposition.

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