C'est fait ! Les autorités nigériennes ont abrogé la loi 2015-36 relative au trafic illicite des migrants. L'annonce en a été faite, à la surprise générale, le 27 novembre dernier. En effet, adoptée en mai 2015, la loi criminalisant la migration avait pour objet de prévenir et combattre le trafic des migrants ; protéger les droits du migrant et faciliter la coopération nationale et internationale en vue de prévenir le trafic sous toutes ses formes, au Niger. Elle avait été initiée avec le concours de l'Union européenne (UE) qui espérait ainsi voir bloqués les migrants subsahariens loin de ses portes. Le moins que l'on puisse dire, c'est qu'elle a produit les effets escomptés.
A preuve, depuis son application, des milliers de migrants illégaux ont été bloqués au Niger qui était ainsi passé de statut de pays de transit à celui de pays de rétention. Pourquoi la junte au pouvoir depuis quelques mois, en a-t-elle décidé autrement en abrogeant cette loi sur le trafic des migrants ? C'est, sans doute, la question que se posent bien des observateurs. En effet, l'une des raisons serait que la junte, acculée par les sanctions de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) et la communauté internationale, s'accroche à tout pour espérer desserrer l'étau autour d'elle, tout en cherchant à rester dans les bonnes grâces des masses qui souffrent le martyre. La preuve est que l'abrogation de la loi 2015-36 qui, on le sait, a entrainé des conséquences humanitaires et économiques, a été très favorablement accueillie par les Nigériens.
Que va-t-il se passer maintenant ?
Du reste, on se rappelle que ladite loi avait été décriée par la population et les organisations de la société civile qui estimaient que les activités liées à la migration contribuaient énormément à l'économie, notamment dans la région d'Agadez. Cela dit, en annulant, sans autre forme de procès, la loi sur le trafic illicite des migrants, Tiani et ses frères d'armes augmentent leur capital de sympathie auprès de leurs compatriotes qui n'en demandaient pas plus. Et dans le même temps, ils taclent l'UE que l'on sait très préoccupée par la migration irrégulière. Que va-t-il se passer maintenant ?
Les dirigeants européens vont-ils négocier avec les putschistes nigériens qui sont conscients qu'ils ont touché à un point très sensible ? On attend de voir. Mais quand on sait que le combat contre la migration clandestine fait partie des priorités de l'UE, il n'est pas exclu que celle-ci, prenant toute la mesure de la situation, accepte d'aller à un compromis avec la junte nigérienne, en allégeant par exemple, les sanctions prises contre le Niger depuis le coup de force du 26 juillet dernier. Certes, l'UE est prête à contribuer à défendre la démocratie au Niger mais pas à n'importe quel prix sous peine de s'attirer les foudres de son opinion. En tout cas, la junte nigérienne voudrait tailler des croupières à l'UE qu'elle ne s'y prendrait pas autrement.