Ile Maurice: Ambiance - Expulsions à la pelle et «diktatir» !

29 Novembre 2023

Une séance parlementaire ordinaire si l'on se base sur les normes de ces derniers temps. Des expulsions, de vifs échanges et des membres du gouvernement pas sanctionnés. Durant la Private Notice Question (PNQ) de Xavier-Luc Duval au ministre Anwar Husnoo, quelque chose présageait que le ton allait monter bien que le ministre ait gardé son calme malgré les remarques du député de l'opposition. Le Premier ministre Pravind Jugnauth a, lui, défendu son ministre. «Hé ki arivé? Be fair!» a déclaré le chef du gouvernement au leader de l'opposition quand ce dernier a fait ressortir que le ministre Husnoo lui donnait deux réponses pour une question. À la fin de la PNQ, le Premier ministre devait également faire une autre remarque au leader de l'opposition. «Demann Bodha komié Victoria Terminal ti pou kouté», a-til fait remarquer. La réponse de l'élu de l'opposition a été immédiate. «Li dir mwa ki twa kinn fané», a-t-il ce dernier.

D'ailleurs, il y a eu pas mal d'échanges entre le speaker Sooroojdev Phokeer et Xavier-Luc Duval. À un moment, le président de la Chambre a élevé le ton pour demander au chef de l'opposition de poser une question directe alors que le député disait que le gouvernement a agi avec amateurisme. Le chef de file de l'opposition l'a ignoré en faisant des signes de la main. Son geste n'a pas plu au speaker qui s'est mis débout pour dire qu'il objectait. «Ne montrez pas vos mains. C'est un manque de respect. Je vais prendre des sanctions», a-t-il martelé en montrant du doigt le leader de l'opposition. «J'apprécierai si le respect était mutuel. Je suis le leader de l'opposition. Il faut me respecter», a immédiatement rétorqué Xavier-Luc Duval. Ses collègues de l'opposition ont longuement tapé des mains sur la table en signe de soutien. «Vous n'avez pas le droit de me hurler dessus», a insisté Duval.

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Juste avant, le député du Parti travailliste, Shakeel Mohamed, avait 'osé' demander au speaker de baisser le bras alors qu'il montrait du doigt le leader de l'opposition. Le speaker lui avait alors demandé de s'excuser. «Je présente mes excuses pour avous avoir dit de baisser votre bras», a-t-il déclaré, mais ce n'était pas au goût du président de la Chambre qui lui a demandé de présenter des excuses sans réserve. «I apologise unreservedly for stating to put your hand down», a-t-il affirmé. Sooroojdev Phokeer l'a alors expulsé. «Vous cherchiez un prétexte pour partir. Partez ! Quittez la Chambre», lui a-t-il ordonné. «Samem to ti pé rodé», a ajouté un membre du gouvernement. «Vous cherchiez un prétexte pour m'expulser», devait déclarer l'élu du Parti travailliste qui, semble-t-il, avait préparé une série de questions supplémentaires à poser au Premier ministre sur les incidents lors du concert à la Citadelle.

D'ailleurs, lorsque Pravind Jugnauth a eu l'occasion de répondre à une question supplémentaire de Joanne Tour, la députée du Mouvement socialiste militant (MSM) sur cet incident, le Premier ministre en a profité pour régler ses comptes avec Shakeel Mohamed. Cependant, les membres de l'opposition n'ont pas compris la raison pour laquelle le speaker a autorisé la question de la députée du gouvernement. Elle voulait savoir ce que pense le chef du gouvernement sur la déclaration d'un avocat qui représente un des suspects dans cette affaire qui, selon elle, a comparé le traitement de la police sur l'incident de la Citadelle à celui de Trou-d'Eau-Douce. D'habitude, quand des députés de l'opposition demandent aux ministres leur opinion, Sooroojdev Phokeer rejette leur question. «Li pé rod lopinyon», a protesté Khushal Lobine. À noter que tard en fin d'après-midi, le speaker avait rejeté une question du député Lobine, jugeant que c'était une opinion. Pour en revenir à la question de Joanne Tour, Pravind Jugnauth devait alors dire que l'avocat en question n'est autre que Shakeel Mohamed et un autre membre de l'opposition, citant Reza Uteem, qui, selon lui, auraient fait des commentaires sectaires qui auraient pu mettre en péril l'unité du pays. «La honte», ont répété les membres du gouvernement. «Kan monn dir sa? Shame!» a répondu Reza Uteem.

Xavier-Luc Duval devait répéter une question pour savoir si la police et un ministre avaient été avisés que quelque chose se tramait à la Citadelle, mais que la police avait envoyé une équipe au mauvais endroit. «À ce stade de l'enquête, il n'est pas approprié de donner des informations», a fait savoir le Premier ministre. Reza Uteem a alors laissé échapper une interjection pour exprimer sa surprise. «Ki ein? Atann do!» a déclaré le chef du gouvernement. «Met li déor», a proposé un membre de la majorité. Tout de suite, le speaker s'est mis débout pour expulser le député du Mouvement militant mauricien. «Al mett enn post lor Facebook», a proposé un député du MSM. À la fin de son intervention, Arvin Boolell a demandé à Pravind Jugnauth où était la réponse à la question de Xavier-Luc Duval. «To zorey bousé?» lui a demandé le chef du gouvernement alors que son micro était allumé.

Il semblerait que le speaker ne l'ait pas entendu, mais que la déclaration d'Arvin Boolell lui était parvenue à l'oreille. «Honorable Boolell. Vous voulez partir ? Restez ! Ne cherchez pas de prétexte pour partir. Je ne veux pas tomber dans le piège des membres de l'opposition qui hurlent pour que le speaker leur demande de partir. Honorable Boolell, vous devez rester jusqu'à la fin de la séance», a-t-il maintenu. Entretemps, le député Ehsan Juman devait demander la démission de celui qui serait derrière l'incident de la Citadelle. «Pheew. Bizin demann so demisyon!» a-t-il déclaré. «Ki pheew?» a interjeté le Premier ministre. «Vous n'êtes pas dans un bazar ! Vous êtes dans un Parlement démocratique. Vous devez montrer du respect et être un modèle pour les jeunes», a déclaré Sooroojdev Phokeer. Toute l'opposition s'est alors mise à rire.

Durant la reprise après le déjeuner, tout le monde croyait que la tension était retombée, mais non... Tout comme la semaine dernière, le ton est monté d'un cran durant une question destinée au ministre de l'Énergie venant de la députée Joanna Bérenger. Cette dernière avait posé une question sur le Mauritius Renewable Energy Agency (MARENA) et l'Energy Efficiency Management Office (EEMO). Par la suite, elle a voulu savoir quelles sont les qualifications de la nouvelle présidente de la MARENA, mais le speaker lui a fait savoir que sa question supplémentaire n'était pas appropriée. «Vous allez diriger mes questions aussi ?» a-t-elle demandé. Sooroojdev Phookeer a alors rejeté sa question. Quelqu'un a alors laissé échapper le mot «diktaker». Le speaker n'a rien entendu, mais Joe Lesjongard a alors attiré son attention là-dessus. Sooroojdev Phokeer a alors ordonné à Joanna Bérenger de quitter l'Hémicyle. Elle a tenté d'argumenter, mais le speaker a élevé le ton, demandant au Serjeant-atarms d'agir. «Mari diktatir sa!» a balancé Joanna Bérenger tandis qu'Ariane Navarre-Marie a déclaré : «Dominer!» Le speaker lui a alors demandé de choisir entre retirer ses propos et quitter le Parlement. «Je ne vais pas les retirer», a-telle maintenu. Karen Foo Kune-Bacha devait alors dire : «Pe fer diktatir kont madam! Dominer.» Elle a été expulsée aussi, tout comme Joanna Bérenger et Ariane Navarre-Marie...

Rajesh Bhagwan encore suspendu

Il assistait à sa première séance après une suspension de cinq jours... Et Rajesh Bhagwan, le secrétaire général du MMM, a une nouvelle fois été suspendu par le speaker hier. Cette fois pour une durée de quatre semaines, ce qui fait qu'il sera de retour l'année prochaine.

Rajesh Bhagwan avait posé une question à Joe Lesjongard, sur les conditions d'emploi de Prakash Maunthrooa, le directeur géneral de la Central Water Authority (CWA). Toutefois, à peine le ministre avait-il terminé sa réponse que Sooroojdev Phokeer a donné la parole à Salim Abbas Mamode pour passer à autre chose. «Est-ce que je peux poser une question supplémentaire ?» a argué Bhagwan mais le speaker l'a ignoré. «Est-ce parce qu'il est un agent du MSM que vous ne m'accordez pas une question», a alors fustigé le député mauve. Une remarque qui a amené le speaker à lui demander s'il contestait son autorité. «You are biased», a balancé Rajesh Bhagwan. Le speaker lui a demandé de retirer ce mot, mais il a tenu tête avant d'être expulsé. Sooroojdev Phokeer a ensuite décidé de le suspendre quand il a envoyé : «The population is laughing at you.»

Dans une déclaration à l'express, Rajesh Bhagwan affirme que c'est du jamais-vu avec cinq expulsions et une suspension en une journée. «C'est clair que le speaker a voulu protéger Prakash Mauntrooa alors que la CWA a beaucoup de problèmes et l'opposition ne fait que son travail. Parmi, il y a eu trois femmes suspendues. J'admire leur courage...»

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