Afrique de l'Ouest: G5 Sahel - Le coup de grâce venu du Burkina et du Niger

Le général nigérien Abdourahamane Tiani et le capitaine Ibrahim Traoré (photo d'archives)
analyse

On avait même oublié son existence. Qui entendait encore parler du G5 Sahel, jusqu'à ce que le Burkina et le Niger nous rappellent qu'il vivait toujours... en le quittant ?

Dans un communiqué rendu public samedi dernier, les gouvernements de transition du Burkina Faso et du Niger ont annoncé leur retrait du G5 Sahel, une organisation créée en 2014 dans le cadre de la lutte contre le terrorisme et qui regroupait la Mauritanie, le Burkina Faso, le Mali, le Niger et le Tchad. Entre autres raisons invoquées, le constat qu'après 9 ans d'existence, l'organisation « peine à atteindre ses objectifs », avec des "lourdeurs institutionnelles, des pesanteurs d'un autre âge » et des « intérêts étrangers au détriment de ceux des peuples du Sahel ».

Les deux autres membres de la toute nouvelle alliance suivent donc les pas du Mali qui, déjà, le 15 mai de l'année dernière avait quitté le navire. En réalité, ce qui arrive ne peut pas surprendre dans la mesure où en créant l'AES (Alliance des Etats du Sahel), ils se mettaient objectivement en marge du G5 Sahel où il ne reste donc plus que deux membres, la Mauritanie et le Tchad qui ne sont pas à proprement parler victimes du terrorisme tel qu'on le vit au Sahélistan. Le G5 Sahel était donc déjà en mort clinique et le Niger et le Burkina viennent de donner le coup de grâce à un avorton qui en réalité n'a jamais eu les moyens de sa politique. Dommage pour une structure dont l'ambition était de mutualiser les moyens humains, logistiques, financiers et les renseignements pour venir à bout de l'hydre terroriste, mais comportait tout aussi un volet social et économique avec la création d'une fondation.

Il faut dire que l'affaire portait en elle-même les germes de sa propre mort. Tout de suite, des difficultés vont apparaître. Financiers d'abord, puisque quand bien même les ambitions étaient nobles, l'organisation comptait sur les apports extérieurs, notamment l'Union européenne. Les promesses ont afflué mais les vrais décaissements n'ont pas été à la hauteur. C'est à peine si sa force conjointe a pu mener deux opérations militaires, avant de disparaître dans les sables mouvants du Sahel. La première, ce fut en novembre 2017. Dénommée «Hawbi», elle a mobilisé quelques 700 hommes qui étaient appuyés par l'opération Barkhane. La seconde, c'est « Pagnali» en janvier 2018.

Et après, plus rien. Les vicissitudes politiques et diplomatiques ont fait le reste. Il n'était un secret pour personne que deux pays étaient un obstacle de taille : les Etats-Unis, qui ont apposé leur veto empêchant la mobilisation des fonds de la part de l'ONU, et l'Algérie qui tenait à exclure la France comme locomotive de l'institution. La fâcheuse impression qui se dégage est que le G5 Sahel a juste servi à créer et nourrir une nouvelle caste de fonctionnaires et de militaires. Comme on le dit familièrement sous nos tropiques, l'institution a permis à beaucoup de « construire leurs murs ».

Le G5 Sahel est donc mort ; vive L'AES ! Ça tombe bien : le retrait du Burkina et du Niger intervenait alors que se tenait à Bamako une première réunion des ministres des Affaires étrangères. Comme par hasard, l'objectif de la rencontre était de consolider l'assise de la toute nouvelle institution avec pour objectif affiché de tendre vers une confédération des trois Etats concernés dont les contours restent cependant à définir. Il faut seulement espérer que les initiateurs sauront tirer profit des failles de l'organisation défunte.

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