Gabon: Charles M'Ba, ministre des Comptes publics - «Nous voulons absolument mettre un terme à la gabegie»

interview

Trois mois après le renversement d'Ali Bongo Ondimba, Charles M'Ba, ministre des Comptes publics, présente ses premières mesures pour rétablir une bonne gouvernance dans la gestion de l'État. Il évoque aussi les relations de son pays avec ses bailleurs. Entretien.

RFI : Quelle est la situation que vous avez trouvée lors de votre prise de fonction ?

Charles M'Ba : J'ai trouvé une situation qui a justifié l'intervention du comité pour la Transition et la restauration des institutions. La dette a explosé et atteint 57 % du PIB sans que rien ait été concrètement fait sur le terrain. Il manque toujours autant de routes, d'hôpitaux, autant d'écoles. Et les choses ne sont pas meilleures pour ce qui concerne les comptes publics où l'unité de la caisse de l'État a explosé, où on a créé des nébuleuses financières, etc. Ce n'est pas une situation particulièrement saine. Nous voulons absolument mettre un terme à la gabegie, au désordre, à l'inconséquence, à l'accaparement des biens de l'État. Nous sommes en rupture avec le gouvernement précédent.

Concrètement, qu'allez-vous pouvoir faire ?

L'objectif est d'assainir les finances publiques, de réorganiser une bonne préparation budgétaire et surtout une meilleure exécution du budget. Par exemple, essayer de restreindre ce que l'on appelle chez nous le hors budget. Il est également inadmissible que l'État paye entre 25 et 30 milliards de francs de loyer pour loger des fonctionnaires et leur permettre de travailler. Il s'agit de restaurer nos institutions, faire qu'elles soient fortes, respectées et fonctionnent pour le bien-être des populations.

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Avec quel budget ? La presse gabonaise a affirmé que le FMI a coupé ses aides...

Je ne sais pas qui a informé la presse de cette manière-là. La réalité est que le Gabon avait signé un programme d'appui avec le Fonds. Sur les sept objectifs poursuivis, un seul était à peu près atteint : réduire la demande de financement extérieur. Ce programme qui était mal parti, nous avons décidé de le laisser mourir et d'engager de nouvelles discussions avec le fonds. Nous étions à Marrakech aux assemblées annuelles du FMI et de la Banque mondiale et le nouveau gouvernement a reçu un accueil cordial de la part des institutions financières internationales. Nous avons également reçu au Gabon une mission de la Banque mondiale, qui ne serait pas venue si la situation était si compromise pour l'avenir. Je pense que les institutions financières internationales se rendent bien compte que cette fois-ci, elles ont affaire à un gouvernement de gens sérieux, qui a envie d'aider à rétablir la situation du pays.

Parmi les réformes qui ont été entamées, celle de la bancarisation des agents publics crée des inquiétudes...

Je paye 105 000 agents publics, (dont) 101 000 d'entre eux sont bancarisés. Donc la question concerne exactement 4 100 agents publics. Que ces gens-là soient inquiets, ça me paraît tout à fait normal. Mais je dois vous préciser que sur ces 4 100 qui sont concernés, 3900 vivent dans la zone de Libreville. Donc, ils ont des banques à proximité. Il resterait quelques centaines pour lesquelles, bien sûr, le ministère dont j'ai la charge cherche des solutions.

L'autre aspect de cette bancarisation concerne les retraités. Là, c'est vrai que j'ai un souci. J'ai 27 000 retraités qui reçoivent leurs pensions et 1/3 d'entre eux ne sont pas bancarisés. Mais il faut savoir que l'obligation de bancarisation pour ce qui concerne les retraités ne concerne que ceux qui touchent plus de 150 000 francs CFA de retraite. Compte tenu de l'état des pensions aujourd'hui, ça réduit la difficulté. Mais mon ministère étudie aussi des solutions, notamment avec les opérateurs de téléphonie mobile. Nous sommes en train de parler avec elles, dans l'intérêt de ces agents, pour faire en sorte que le coût ne soit pas trop élevé pour eux. Que ces gens-là soient inquiets, ça me paraît tout à fait normal, mais la bancarisation, ce n'est pas une punition. Être bancarisé, cela présente tellement d'avantages. La sécurité des revenus que l'on reçoit, l'accès aux crédits bancaires, aux instruments financiers, à des possibilités de financer ces projets.

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