Madagascar: Kianjan'ny Kanto - « Ankizy Mozika Festival », plaisant et plein d'espoir

Une fête de la musique en bonne et due forme avec « Ankizy Mozika Festival » organisé par le Cercle Germano Malgache hier au Kianjan'ny Kanto Mahamasina. La relève de la musique malgache est solide.

Vers 13h50 régnait un gentil tohubohu sous le grand chapiteau du Kianjan'ny Kanto Mahamasina, quand une centaine de gosses débarquaient avec une encadreuse quelque peu dépassée. L'« Ankizy Mozika Festival » en était à sa troisième édition. Une organisation du Cercle Germano Malgache. Ici et là, des professeurs de violon, de batterie... saluaient des apprentis tous respectueux. Ces derniers, si un groupe s'asseyait sagement avec leurs parents. Les autres, plus âgés, semblaient se réjouir de se retrouver un après-midi dominical hors des murs de leur école de musique. D'autres étaient absorbés par les dernières consignes d'un maître en percussions, en djembé plus précisément. La scène est déjà bien posée, il y a ceux ou celles qui vont pour la première fois de leur vie jouer devant un public. Tous les âges de l'enfance et de l'adolescence sont presque représentés.

« En tout, ils et elles seront 50 à jouer aujourd'hui. Il y aura du jazz, de la musique du terroir... », fait savoir Jenny Raodson, coordinateur culturel du Cgm Analakely. Pour cette troisième édition, lui et son équipe ont voulu prendre une scène large par rapport aux deux premières éditions. Vers 14 h, des vagues de jeunes parents, avec leur petite horde, des troupes d'ados musiciens avec leurs potes du quartier, affluaient. Une dame se disant membre du jury, un peu déboussolée par le regain de soleil et de chaleur arrive sur les lieux. « A priori, il devrait y avoir des récompenses pour tous et toutes », explique-t-elle. Il fallait pimenter un peu le jeu, pour que le festival reste à jamais dans les souvenirs des gosses.

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Dès la matinée d'hier, le ciel avait l'air nuageux faisant craindre des pluies tôt dans la journée. Un beau temps à priori pour écouter de la musique. « Notre école est représentée par deux musiciens de 11 et 12 ans. Ils feront une prestation de "jamless" », se réjouit Mendrika Rasolomahatratra, le batteur de légende, un patrimoine vivant, du groupe Solomiral. Le "jamless" est un genre de karaoké de batterie. « On envoie la chanson, avec tous les instruments et les chants mais sans la batterie. Et les jeunes jouent la batterie de celle-ci sur scène », ajoute-t-il. Ses deux apprentis vont donc s'attaquer à une chanson de The Police et du rock-band Toto.

« J'ai commencé à enseigner le violon au Cnem en 1973 », annonce de son côté Casimir Rakotoniaina de l'école Casi-Musique. Le genre de monument de l'art musical national qui est souvent derrière la réussite des nouvelles générations. « Si à notre époque, il y avait Internet, je n'aurais pas hésité à regarder des vidéos d'apprentissage. Mais pour nous professeurs, ce n'est pas un problème que les petits et les petites apprennent des choses sur la toile. Avant tout, notre mission est de leur inculquer les fondamentaux ». À l'entendre, le violon est un instrument nécessitant une volonté particulière. « Pour le violon, ce serait idéal de commencer à sept ans », ajoute-t-il. Pour savoir tenir en mêlant souplesse et fermeté, l'instrument et l'archet, quatre mois sont nécessaires.

Sur ce point, rien ne vaut un vrai maître en chair et en os. Voilà les limites des tutoriaux sur YouTube. Les deux professeurs de musique sont unanimes en ce qui concerne l'apport du web, c'est un outil d'apprentissage à ne pas négliger qui complète les cours en salle. Plus d'une dizaine d'écoles de la capitale et de ses environs ont donc répondu à l'invitation du Cgm pour cet « Ankizy Mozika Festival ». « La relève est là, pour le cas de la batterie, elle attire tout autant les filles », annonce Mendrika Rasolomahatratra. Un instrument souvent collé au genre masculin depuis des décennies, que ce soit à Madagascar ou ailleurs. Le professeur de violon renchérit, « la relève est bel et bien là, et ils sont beaucoup. Beaucoup plus même que notre génération à l'époque ». Les parents d'aujourd'hui y ont joué un rôle, des papas et des mamans venues au monde entre les années 70 et 2000.

Une génération qui est en train de « déstigmatiser » le rapport des malgaches avec la musique, et avec beaucoup d'autres choses d'ailleurs. Du temps de la première et de la deuxième république, avec le sport, ces deux activités étaient l'opprobre familial. Être artiste musicien ou sportif était alors l'équivalent de drogué ou d'ignare. La bonne morale populaire vivifiait les emplois du gendre parfait à exhiber à la paroisse.

Tels que docteur, combien même gynécologue, banquier, pilote de ligne, être ingénieur équivalait à être un saint. Hier au « Ankizy Mozika Festival », « Mes deux fils savent jouer d'un instrument », déclare d'un ton décidé et fier un père de famille menant sa petite tribu. Pour Casimir Rakotoniaina, l'explication est simple. « Nous faisons des concerts, et ces parents d'aujourd'hui quand ils étaient petits, avaient été emmenés par leurs parents nous voir. Ils n'ont pas oublié ». Par ailleurs, les chiffres ne mentent pas. Le nombre d'écoles de musique créées ces dernières années à Antananarivo est en hausse.

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