Le besoin en main-d'œuvre met à mal les positions anti-migration du gouvernement Meloni
Bonne nouvelle pour la main-d'œuvre maghrébine. Les entrepreneurs italiens cherchent désespérément des employés étrangers dans les secteurs de l'agriculture et du tourisme, entre autres. Selon le site du Financial times (FT), plus de 600.000 pré-demandes ont été déposées pour 2024 par les employeurs italiens souscrivant à la loterie des visas pour les travailleurs non européens, soit quatre fois plus que le quota gouvernemental. A noter que Giorgia Meloni, présidente du Conseil italien, s'est engagée à augmenter progressivement le nombre de visas de travail annuels pour les travailleurs non européens jusqu'à 165.000 en 2026. Ce qui serait plus que permis au cours de sa première année de mandat et en hausse par rapport aux années précédentes.
Des besoins énormes
"Nous avons besoin que davantage de personnes soient autorisées à travailler", a déclaré, au FT, Angelica Donati, présidente de l'aile jeunesse de l'Association nationale italienne des constructeurs. Et de préciser : «Il faut faire plus pour garantir que les entreprises soient en mesure de faire appel à des travailleurs étrangers.»
Pour avoir une idée sur l'importance de cette main-d'œuvre étrangère, le site collettiva.it a révélé que dans les Pouilles uniquement, région du sud de l'Italie, 138.689 résidents étrangers sont enregistrés, soit 3,6% de la population régionale. Rien que dans la région de Foggia, il y a un besoin de 20.000 travailleurs, mais le quota alloué aux Pouilles, selon le décret de flux de la main-d'œuvre étrangère, a été beaucoup plus faible. En 2022, les entrepreneurs italiens ont demandé 100.000 travailleurs agricoles et 300.000 dans les secteurs du tourisme et de la restauration. Les secteurs de la logistique et de la construction, entre autres, sont également des métiers sous tension.
Ces travailleurs migrants sont principalement employés dans les secteurs du commerce et du tourisme. 23% d'entre eux trouvent un emploi dans l'agriculture comme saisonniers. Ils viennent souvent du Maroc, de la Tunisie et de l'Algérie. Certains sont déjà présents sur le territoire et parcourent les régions pour faire la campagne de récolte des agrumes, des tomates, des olives et des raisins en Sicile et des poires en Emilie-Romagne.
Travail au noir
La moitié d'entre eux sont sans titre de séjour et ils sont peu nombreux à pouvoir l'obtenir. En effet, le taux de rejet est très élevé et il est en contradiction avec les importantes demandes d'embauche émises par les entrepreneurs. L'année dernière, uniquement 185 titres de séjour ont été délivrés.
Ainsi, nombreux sont ceux qui travaillent au noir, sans protection, sans droits et sans cotisations. Ils ne peuvent même pas louer une maison ou une chambre. Et ils sont souvent contraints de vivre dans des cabanes et des fermes abandonnées ou sous des arbres.
«Les migrants qui travaillent dans les champs restent invisibles. Ils ne peuvent pas payer de cotisations, ce qui porte préjudice à l'Etat et à eux-mêmes. Ils n'ont pas droit à l'existence, à la santé, au logement», a déclaré Azmi Jarjawi, chef du département de l'immigration du CGIL des Pouilles, au site collettiva.it. Et de poursuivre : «En Italie, le phénomène migratoire est abordé en termes strictement d'urgence et avec une approche sécuritaire. Cela alimente les peurs et la xénophobie. Il y a ceux qui ont fait carrière en alimentant la discrimination, en soutenant une législation de plus en plus répressive et restrictive, mais qui n'ont jamais été capables de contrôler les flux migratoires.
Des présences non régulières continuent de se produire, en raison de la faiblesse des mécanismes qui devraient favoriser les entrées régulières et des règles en matière de citoyenneté. Avec de nombreuses associations et organisations des Pouilles, nous travaillons pour l'intégration, pour un accueil équitable. Le sujet est sur l'agenda de la région, il reste beaucoup de choses à faire, nous allons certainement essayer".
Encore plus de travailleurs migrants
De leur côté, les organisations patronales italiennes ont considéré l'augmentation progressive du quota de travailleurs non européens comme une première étape importante pour lutter contre la pénurie de main-d'œuvre, mais elles estiment qu'il faudra faire davantage, étant donné le nombre de travailleurs italiens atteignant désormais l'âge de la retraite.
La Banque centrale italienne et l'Agence nationale de statistiques estiment que la population en âge de travailler diminuera de 6 millions d'ici 2040. L'agriculture italienne dépend déjà des travailleurs étrangers pour environ 32% de ses besoins annuels en main-d'œuvre. "Dans chaque secteur, nous avons besoin de personnel", a déclaré au site collettiva.it, Luigi Pio Scordamaglia, directeur des politiques européennes chez Coldiretti, influent groupe agro-industriel. "Il n'y a aucun secteur en Italie où nous ne manquons pas de main-d'œuvre", a-t-il ajouté
Le ministère italien de l'Intérieur, qui gère la loterie annuelle des visas «Click Day», a déclaré que parmi les pré-demandes pour l'année prochaine, 260.953 concernaient des emplois saisonniers, principalement dans l'agriculture et le tourisme, 253.473 des emplois non saisonniers dans la construction et d'autres secteurs, et 86.074 étaient destinées aux travailleurs domestiques et aux soignants dans les établissements de santé et sociaux.
Le quota sera attribué selon le principe premier arrivé, premier servi à l'ouverture de la fenêtre électronique de soumission, avec des jours différents pour divers types de visas, bien que certains secteurs aient leur propre quota réservé.
Scordamaglia a déclaré que l'augmentation du nombre de travailleurs migrants légaux donnerait au monde des affaires italien l'occasion de prouver qu'il est capable de gérer une migration à plus grande échelle, y compris en fournissant des commodités telles que des logements.
Le gouvernement Meloni s'est également engagé à ouvrir d'autres voies de migration légale, notamment par le biais d'accords bilatéraux avec des pays comme la Tunisie, qui s'ajouteraient aux quotas.