Depuis plusieurs années, le phénomène des incendies dans les marchés publics gagne de plus en plus du terrain dans le centre du pays et particulièrement dans la région de Kaolack. Si, par évidence, cette problématique est moins visible au niveau des marchés périphériques, dans les lieux de spéculations à grande affluence, elle s'amplifie chaque année et les énormes dégâts qu'elle génère en termes de pertes de marchandises, matériel et autres destruction d'infrastructures sont souvent estimées à des centaines de millions voire même des milliards de francs CFA en valeur marchande.
En l'espace de deux ans, pas moins de dix incendies se sont déclarés entre le marché central et le marché « Zinc », à Kaolack. Une situation inquiétante qui ne cesse de provoquer beaucoup d'émotions, d'interrogations, mais surtout de désolation chez les acteurs du commerce et les populations qui s'y rendent tous les jours pour s'approvisionner. Compte tenu de l'occupation anarchique constatée au niveau de ces marchés, et leurs alentours, des ruelles souvent obstruées par des commerçants, l'absence de bouches d'incendie dans certains points stratégiques, ces feux se montrent toujours ravageurs, car à chaque fois qu'ils sont provoqués, les secouristes peinent à avoir accès ou parfois perdent beaucoup de temps pour trouver un angle propice où se positionner pour éteindre le sinistre.
CONTROVERSES AUTOUR DE L'ORIGINE DES FEUX, LES CONSTATS DIFFÈRENT
A chaque fois qu'un feu se déclare quelque part dans un marché du pays, les installations électriques sont pointées du doigt par rapport aux branchements clandestins opérés dans les marchés qui foisonnent. Et dans la plupart des cas, on fait allusion aux courts circuits comme étant à l'origine de ces nombreux feux en répétition dans ces lieux de vente. Mais, d'après certaines études menées au préalable, il se trouve aujourd'hui que la douleur est plus profonde que cela. Car même si l'électricité est incriminée, parfois à tort, dans beaucoup de cas, ces feux seraient commandités et provoqués sciemment par des commerçants eux-mêmes.
Selon nos sources, les incendies dans les marchés n'ont jamais eu lieu pendant la journée, ou du moins rarement, mais souvent la nuit. Comme si un court-circuit choisit des heures bien déterminées pour se manifester. Et, par préférence, il attend la tombée de la nuit pour déclencher un feu. En effets, expliquent nos sources, la raison est que beaucoup de commerçants (notamment en difficulté financière ou très endettés) mettent expressément le feu sur leurs biens, pour espérer être indemnisés plus tard par une compagnie d'assurance avec qui ils avaient contractée auparavant ou recevoir le soutien de l'Etat pour se sortir d'affaire. Surtout lorsque ces marchandises ont connu une mévente telle qu'elles ne sont plus dans une posture d'être écoulées. Dans d'autres cas aussi, un commerçant peut s'aventurer dans ce genre d'opération simplement parce qu'il a subi des pertes telles qu'il n'est pas en mesure de rembourser ses dettes ou de peur que son associé le traduise en justice.
RECONSTRUCTION DES MARCHÉS, UN PROGRAMME A MULTIPLES DÉFIS
La reconstruction des marchés est un programme, mieux une «priorité» pour le pouvoir public. Même si son objectif est de moderniser ces lieux publics et leur apporter surtout sécurité et confort, ce programme également butte souvent sur un parterre de blocages venant directement des commerçants et spéculateurs. Comme c'est le cas dans la commune de Kaolack où les occupants des marchés refusent de quitter leurs souks et cantines, pour être logés ailleurs, le temps de la reconstruction. Quelle que soit l'offre qui leur est soumise, cette opposition est toujours catégorique et ces personnes brandissent toujours la thèse du manque à gagner au niveau des nouveaux sites proposés.
Sur une autre version, ces commerçants craignent de perdre leurs souks ou cantines, mais doutent aussi des nouveaux tarifs de location qui leur seront proposés, une fois le marché reconstruit. Et ceci sous prétexte d'être déguerpis, s'ils ne sont plus en mesure de payer leurs locations. Il faut cependant souligner qu'à chaque fois qu'un marché brûle, ces personnes préfèrent se livrer à des opérations de reconstruction partielles, qu'elles financent elles-mêmes, sans un quelconque apport financier venant de l'extérieur. C'est le paradoxe !