Madagascar: Activités culturelles en circonvolution

Les ateliers et les conférences sur la culture s'organisent un peu partout sur la Grande île. Des jeunes s'invitent à des endroits somptueux notamment les hôtels étoilés pour exposer des solutions aux problèmes qui s'avèrent éminents.

Certes, l'idée est là. L'inquiétude pousse les coordinateurs de projets à faire un bilan et à dresser des perspectives d'avenir. Les invités, pour leur part, pertinemment conquis par les idées, hochent la tête, prennent des notes. Une fois l'évènement fini, les vidéos et les photos de groupe ne sont que des supports de rapport pour prouver aux créanciers que « la formation a été très enrichissante, les participants ont été actifs ». Mais en réalité, les calepins sont classés dans les tiroirs en attendant la prochaine édition. L'année suivante, c'est encore le même schéma !

Parler de la tradition dans une grande ville imbibée de la culture étrangère est une belle initiative. Les citadins omettant sciemment les legs de leurs aïeux ont besoin d'un rappel. Néanmoins, ces préceptes demeurent dans les quatres murs, voire une connaissance acquise sans pratique, puisque l'environnement où ils vivent a exceptionnellement évolué. Bien entendu, le savoir-faire des ascendants n'a plus sa place dans une jungle de béton. Les participants sont toutefois reconnaissants envers les anciens, car ceux-ci ont laissé un immense héritage. En revanche, le patrimoine confié s'effrite au profit d'une nouvelle civilisation qui s'est facilement ancrée dans l'esprit.

Par ailleurs, les organisateurs d'ateliers, bien qu'ils soient experts en la matière, n'ont aucune référence. La majorité d'entre eux sont formés à l'étranger, à la limite dans la capitale. Leur longue absence sur les lieux les oblige à consulter Google pour avoir quelques notions de base. De ce fait, les éléments obtenus sont approximatifs, loin de la réalité sur le terrain. Par conséquent, ils livrent des informations biaisées. Ainsi, la résolution s'avère superflue, pour ne pas dire super-floue.

La sociologue Olivia Rafaranirina partage entièrement cet avis. « À Madagascar, les ateliers ne puisent pas le fond du problème. Les thèmes proposés sont attirants... mais j'ai l'impression qu'on reste en surface. Que des faux diagnostics si j'ose dire ainsi. Ils ne soulèvent pas les grands points... J'ai assisté à beaucoup d'ateliers, de formations, de conférences, les intervenants n'osent pas avouer les faits, alors que l'assistance n'attend que ça », a-t-elle martelé. Rôder autour du pot, caresser les dossiers brûlants, en prononçant des jargons techniques tels sont les spécialités des exposants. Pour que les arguments soient tonifiants, ils projettent sur l'écran des statistiques datant de l'année précédente, voire d'il y a cinq ans.

Des visites sont quelquefois effectuées dans les campagnes accessibles. En sortant du 4x4 Land cruiser, vêtus en chemise hawaïenne, coiffés d'un chapeau cubain, sandales en cuir à leurs pieds, ils sont en mode conquistador moderne. Au fief de la tradition, ils imposent les décisions inadaptées à la réalité quotidienne de la localité d'Ambodivahibe, un village situé à plus de 20 km à l'Est d'Antsiranana, district de Diego II. Des soi-disant formateurs sont venus pour sensibiliser les locaux à préserver l'environnement marin. Pourtant, ces initiateurs de projet ne sont que des pêcheurs d'eau douce. Ils n'ont jamais vu la mer depuis leur jeune âge !

Le développement ne se fait pas en une semaine de formation. À vrai dire, pour comprendre à peu près une culture, il faut séjourner au moins un an dans une région. En dépit de cela, les choses se sont timidement améliorées grâce à ces « atrik'asa » - ateliers - ici et ailleurs quoiqu'il faille revoir les tactiques d'approche. Il y a un début à tout...

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