Cameroun: Patrick Alain Fouda, membre du Conseil des jeunes du Fonds mondial

interview

À 27 ans, Patrick Fouda est un jeune organisateur et entrepreneur social du Cameroun sur la voie du succès. À l'âge de 23 ans, il a cofondé le Réseau camerounais des adolescents et jeunes positifs du VIH (RECAJ+), réagissant aux inégalités sociales et aux difficultés face aux systèmes de santé auxquels sont confrontées les jeunes personnes vivant avec le VIH au Cameroun.

Il s'est vite rendu compte que les jeunes séropositifs vivant au Cameroun et ailleurs en Afrique de l'Ouest et centrale francophone étaient confrontés aux mêmes difficultés. Il a commencé à militer pour mettre en place un réseau de coordination régionale d'organisations de jeunes vivant avec le VIH, qu'il préside encore aujourd'hui.

Fort de son expérience, il est devenu membre du Conseil des jeunes du Fonds mondial en 2020. En janvier 2023, il a rejoint l'instance de coordination nationale du Fonds mondial au Cameroun en tant que représentant des jeunes et adolescents. Il est également membre du groupe consultatif régional du programme « Nos droits, nos vies, notre avenir » (O3) de l'UNESCO, qui soutient une éducation sexuelle complète pour les adolescents et jeunes de l'Afrique subsaharienne.

Pouvez-vous nous décrire votre parcours avec le VIH ? La stigmatisation et la discrimination ont-elles fait partie de votre expérience ?

Quand j'avais 12 ans, j'ai été atteint d'une paralysie. Je ne pouvais plus tenir de stylo ni aller à l'école. Mes parents m'ont emmené chez un neurologue qui, en effectuant d'autres tests de dépistage, a constaté que j'étais séropositif. À l'époque, la paralysie me touchait beaucoup plus, et je n'ai pas beaucoup pensé à mon statut sérologique.

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Plus tard, à 19 ans, j'ai commencé à réfléchir à mon statut VIH, et je me suis rapproché d'autres jeunes séropositifs. Plusieurs d'entre eux parlaient de stigmatisation et de discrimination dues à leur statut VIH. Ma première réaction était que ma paralysie m'avait beaucoup plus touché que ma séropositivité, et je minimisais les problèmes des autres jeunes vivant avec le VIH. Je ne suis pas à l'aise avec les plaintes - les miennes et celles des autres. Grâce à une accompagnatrice psychosociale, j'ai a été sensibilisé. Elle m'a encouragé à aider les autres à trouver des solutions à leurs problèmes, tout comme j'avais dû trouver des solutions à mes problèmes. Maintenant, mon approche est d'écouter d'abord, puis de travailler sur la responsabilisation.

Quel type de stigmatisation et de discrimination les jeunes séropositifs rencontrent-ils dans votre pays, le Cameroun ?

Pour les adultes, il y a peu d'obstacles pour se faire soigner. Il peut y avoir de la stigmatisation, mais les adultes, y compris les populations clés, ont accès aux services. Mais pour les jeunes, il y a des questions de droit, qui sont liées à des questions culturelles. L'âge de consentement, c'est-à-dire l'âge de la maturité sexuelle, est fixé par la loi à 21 ans. Cela signifie que des jeunes de 15 ou 16 ans qui commencent leur vie sexuelle n'ont pas accès à l'accompagnement dont ils ont besoin. Cette question se pose de plus en plus dans notre société. Il commence à y avoir des dérogations, par exemple, l'initiative sur les autotests pour les jeunes de plus de 18 ans, mais les autorités restent très traditionnelles. C'est la sexualité des jeunes qui est stigmatisée, et cela entraîne des conséquences sur la santé.

Comment voyez-vous les aînés qui soutiennent cette politique ?

J'avais la réputation d'être impoli, car chez nous, un jeune ne s'exprime pas ouvertement devant un aîné, et moi, je m'exprimais. Maintenant, je m'exprime toujours devant les aînés, mais j'essaie de les comprendre. Ils ont été élevés dans un autre contexte, avec une autre ligne de conduite. J'écoute les aînés autant que j'essaie de les amener à écouter les jeunes et leurs préoccupations.

Ces problèmes se retrouvent-ils ailleurs en Afrique francophone ?

A mon avis, quand on se compare à l'Afrique anglophone, il y a très peu d'engagement envers le soutien des jeunes séropositifs de la part de la société civile au sens large dans les pays d'Afrique francophone, de sorte qu'on a du mal à identifier les problèmes. En Afrique francophone, la prise en charge pour les jeunes séropositifs est la plus mauvaise du continent.

Comment concevez-vous votre rôle au Cameroun et en Afrique francophone ?

Je me vois oeuvrer au sein de structures organisées pour accompagner une plus grande mobilisation. J'ai déjà commencé la coordination avec un réseau de groupes de jeunes et d'adolescents séropositifs d'Afrique de l'Ouest et centrale. Je vise à les autonomiser et à les accompagner dans leurs efforts de mobilisation.

Mon approche est de responsabiliser les jeunes et les groupes de jeunes que je soutiens. Je leur dis : « Voici les difficultés que l'on rencontre. Il faut les identifier et proposer des solutions, puis mettre en oeuvre ces solutions en travaillant avec des entités extérieures. Mais la solution doit venir de nous. »

Le Conseil des jeunes du Fonds mondial fait une lecture des besoins et des difficultés des jeunes par rapport au VIH, à la tuberculose et au paludisme, ainsi que d'autres aspects plus généraux de leur santé et de leur bien-être. Il conseille le directeur exécutif, qui en anime les réunions. La plupart des membres ont moins de 25 ans et vivent avec le VIH, la tuberculose ou le paludisme, ou sont touchés par ces maladies, et reflètent la diversité des jeunes, notamment les populations clés et vulnérables.

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