A quelque deux semaines de la clôture des candidatures à la présidentielle du 25 février prochain, l'opposant Ousmane Sonko, englué dans des procédures judiciaires pour la validation de sa candidature, n'est pas encore définitivement fixé sur son sort.
En rappel, suite à sa condamnation, en juin dernier, à deux ans de prison ferme pour « corruption de la jeunesse », dans l'affaire qui l'opposait à une employée d'un salon de massage dakarois qui l'accusait de viols, le leader du PASTEF (Patriotes africains du Sénégal pour le travail, l'éthique et la fraternité), qui avait été placé sous mandat de dépôt, avait été radié des listes électorales.
Mais le recours en annulation de cette radiation, introduit par ses avocats, avait trouvé une oreille attentive auprès du tribunal d'instance de Ziguinchor, qui avait ordonné, en octobre dernier, sa réintégration dans les listes électorales.
Un verdict qui avait relancé la candidature de l'édile de ladite ville à la course pour la présidentielle de février 2024, mais qui sera cassé et annulé quelques semaines plus tard, précisément le 17 novembre par la Cour suprême statuant après saisine de l'Etat. C'est donc d'une affaire à rejuger que le Tribunal hors classe de Dakar était appelé à connaître le 12 décembre dernier, pour départager les protagonistes.
L'essentiel est que la Justice sénégalaise agisse en son âme et conscience
L'enjeu est d'autant plus grand qu'en cas de confirmation de sa radiation des listes électorales, le sort de l'opposant s'en trouverait définitivement scellé. Et la conséquence immédiate serait son inéligibilité à la présidentielle du 25 février prochain, en attendant l'examen d'un éventuel recours. Car, la première condition pour se porter candidat à une élection, est d'être inscrit sur les listes électorales.
Ce qui n'est toujours pas le cas pour le jeune opposant qui a été radié dans les conditions que l'on sait, et qui a d'autant plus du mouron à se faire que l'échéance du 26 décembre, prévue pour la clôture des dépôts de candidatures, avance à grands pas.
Et ce, dans un contexte où la bataille judiciaire qui l'oppose à l'Etat du Sénégal, est encore loin de connaître son épilogue. Et rien ne dit qu'elle ne traînera pas encore en longueur, avec la possibilité qui s'offre aux deux parties d'interjeter appel en cas d'insatisfaction.
Autant dire que Ousmane Sonko est plutôt mal barré. Et on se demande même si les carottes ne sont pas cuites pour lui, pour ce qui est de sa participation à la présidentielle à venir, qui lui tient tant à coeur. Car, le temps presse et joue manifestement contre lui dans ce dossier judiciaire qui n'a pas fini de faire couler beaucoup d'encre et de salive au pays de la Teranga.
Et les délais sont tellement courts que l'on se demande si le dossier pourra se dénouer suffisamment à temps, pour lui permettre de remplir les formalités de validation de sa candidature. Rien n'est moins sûr. C'est dire si, même en cas de victoire à l'issue de la procédure judiciaire en cours, Ousmane Sonko n'est pas à l'abri de la forclusion pour le dépôt de sa candidature.
C'est dire aussi si son parti avait vu juste de se coltiner un plan B, en attendant de connaître le sort de son truculent leader. En tout état de cause, quel que soit le verdict, cette affaire judiciaire fera des heureux et des mécontents, et aura immanquablement un impact sur la compétition électorale à venir. L'essentiel est que la Justice sénégalaise agisse en son âme et conscience.
Car, au-delà de son indépendance, c'est son honneur et sa crédibilité qui sont, ici, en jeu. Et en pareille circonstance, elle doit pouvoir se mettre au-dessus de la mêlée et des considérations partisanes pour dire le droit.
Ousmane Sonko aura sans nul doute de grandes leçons à tirer de ce feuilleton judiciaire
L'histoire la regarde. Quant à Ousmane Sonko, rien ne pourra l'empêcher de voir derrière la succession de ses déboires judiciaires, la main invisible du pouvoir dans sa volonté de l'écarter de la course à la succession du président Macky Sall.
Mais de son côté, il aura sans nul doute de grandes leçons à tirer de ce feuilleton judiciaire qui aura tenu le Sénégal en haleine pendant plus de deux ans, s'il devait in fine être amené à prendre son mal en patience voire à faire le deuil de ses ambitions pour mieux se projeter dans l'avenir.
Car, avec le recul, il n'est pas loin d'être le grand perdant de l'histoire après le renoncement du président Macky Sall, dans les conditions que l'on sait, au troisième mandat dont l'opposition lui prêtait l'intention.
C'est dire si Ousmane Sonko aura aussi prêté le flanc. Et il aura surtout péché dans sa stratégie visant à se mettre en pole position pour la succession du natif de Fatick. Et les répliques telluriques de l'effet boomerang ne sont pas loin d'être hautement préjudiciables à ses ambitions présidentielles à court terme.