Afrique: Journalisme en temps de guerre - Toi aussi, Alain !

Qu'est-ce qu'on ne va pas voir et entendre par ces temps qui courent ! Et motus et bouche cousue. Mon médecin m'a prévenu que je risque d'avoir le goitre, tellement j'ai des choses à dire que je n'arrive pas à faire sortir.

Mais de la 13e édition des UACO (Universités africaines de la Communication de Ouagadougou), qui s'est tenue du 7 au 9 décembre 2023 avec pour thème « La liberté de la presse et droit d'accès à l'information en contexte de crises sécuritaire et humanitaire », parlons-en. Parmi les invités, Jules Domche, patron de la chaîne Vox Africa, et un certain... Alain Foka. Oui, Alain Foka, qui a fait les beaux jours de RFI (Radio France internationale) pendant une bonne trentaine d'années, animateur, entre autres, de « Archives d'Afrique », « Afrique plus » et « Débats africains ».

C'est dire qu'il a pris une dimension internationale ou à tout le moins africaine, avant d'annoncer, un jour d'octobre 2023, son départ de cette radio pour créer son projet MANSSAH et dans la même foulée son propre média (AFO MEDIA). Côté pedigree donc, il n'y a pas grand chose à redire, sauf que son intervention à l'ouverture des UACO m'a fait bondir de mon canapé, ayant perçu sa sortie comme s'il était venu pour donner des cours accélérés de journalisme en temps de guerre aux médias burkinabè, coupable à ses yeux et pour certains de ne pas suffisamment accompagner le pouvoir en place. Morceaux choisis : « Ne répétons pas de façon mécanique ce que les autres nous ont dit de faire... Soyons des journalistes africains avec nos manières de faire et nos règles qui répondent, qui ressemblent à notre environnement et arrêter juste d'être des diplômés de journalisme, mais des intellectuels au service du peuple. ...Quand George W. Bush a déclaré « soit vous êtes avec nous, soit vous êtes contre nous », la presse américaine a rapidement choisi son camp ». Il est même allé jusqu'à dire que quand on veut assassiner un président en Afrique, on utilise la presse.

Toi aussi Alain... Tu vas nous faire ça ??? Faut-il donc croire avec toi qu'on veut utiliser la presse burkinabè pour assassiner le nouveau Sankara comme on présente IB ? J'ai peut-être l'indignation facile, mais à dire vrai, je suis toujours un peu gêné de ces panafricanistes de la 25e heure qui ont souvent lapé les mamelles des ces impérialistes jusqu'à satiété, qui ont étudié chez eux et ont même élu domicile chez eux, avant de partir « pour ne pas être le mouton de quelqu'un ». Tiens donc : Monsieur était donc un mouton avant !

Bien sûr, il faut donc qu'on se comprenne : ce n'est pas que l'Occident en général, la France en particulier, ne soit pas coupable de ce dont on l'accuse, après des siècles d'esclavage, de colonisation et de néocolonialisme, et est devenu par conséquent un punching-ball très commode pour les nouveaux papes du panafricanisme. Mais il ne faut cependant pas pousser le bouchon trop loin en infantilisant la presse burkinabè comme si elle n'était pas sensible et consciente de la situation dans laquelle se trouve le pays. Du reste, elle n'a pas de leçons à recevoir de gens qui s'empêtrent dans leurs propres contradictions.

En fait, le messager a souvent autant d'importance sinon plus que le message qu'il délivre, et la même vérité dite par deux personnes différentes peut produire des réactions contraires. Quand bien même ce que Foka, le promoteur du journalisme endogène, a professé du haut de sa chaire serait vrai, est-il vraiment le mieux placé pour professer ce cours ? Question à un million de francs sahéliens.

Y en a marre à la fin de ces donneurs de leçons qui ont longtemps usé leurs semelles dans les couloirs de médias occidentaux, se faisant un épais carnet d'adresse et qui ont arpenté et ré-arpenté les palais présidentiels africains. Quand Alain Foka était venu au temps de Blaise Compaoré pour faire la promotion de ses coffrets « Archives d'Afrique », a-t-il parlé aux hommes forts de l'époque et à ses potentiels clients d'impérialisme, de panafricanisme ou de journalisme endogène ? Comparaison n'est pas raison, certes ; mais on ne se souvient pas que le journaliste Alain Foka soit un jour parti dans son Cameroun natal, à Yaoundé plus précisément, pour donner des leçons d'alternance politique au dinosaure du palais d'Etoudi.

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