Tunisie: Centres de vote à Tazarka - Entre l'incompréhension et l'espoir de la décentralisation

25 Décembre 2023

Dans le paisible village de Tazarka, une atmosphère de curiosité entoure les premières élections locales. Les portes de l'école primaire Habib-Bourguiba s'ouvrent aux citoyens qui, malgré un taux de participation moyen à midi, témoignent d'une diversité d'opinions.

Aux quatre coins de la Tunisie, une atmosphère chargée d'anticipation a enveloppé les premières élections locales, qui se sont tenues hier, dimanche 24 décembre.

C'est une journée historique où les habitants de chaque localité et de chaque région participent pour la première fois à un scrutin qui redéfinit le paysage politique local, ce qui témoigne d'un moment clé dans l'histoire politique tunisienne. Le déroulement de ces élections locales n'est pas seulement un exercice démocratique, mais une étape majeure vers la décentralisation.

Ces élections offrent aux communautés locales l'opportunité de jouer un rôle plus actif dans la gestion de leurs affaires, un tournant significatif dans l'évolution du pays depuis la révolution. L'objectif est de permettre aux citoyens de contribuer activement à la vie politique de leur communauté, en élisant des représentants locaux. Ces élus, censés être plus au fait des réalités quotidiennes, auront la responsabilité de défendre les intérêts locaux, qu'il s'agisse d'éducation, de santé, d'infrastructures, ou d'autres aspects cruciaux de la vie quotidienne.

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Pourtant, au sein de cette effervescence démocratique, un constat intrigant se dégage: une partie des citoyens semble encore dans le flou, s'interrogeant sur l'utilité réelle de ces élections locales. Alors que la Tunisie entre dans une ère nouvelle de gouvernance locale, les interrogations et les attentes des citoyens se situent comme des éléments clés à explorer où espoirs, doutes et attentes se mêlent dans le tissu démocratique en gestation.

Un droit civique !

À l'heure du déjeuner, une scène quelque peu atypique se profile dans la petite localité de Tazarka, située dans le gouvernorat de Nabeul. A l'école primaire HabibBourguiba, les retraités semblent avoir répondu massivement à l'appel démocratique, tandis que la jeunesse se fait plus discrète. L'absence des jeunes électeurs contraste avec la présence marquée des femmes, créant une dynamique intrigante dans ce scrutin local. Ce qui émerge des discussions avec les citoyens est un apparent manque de clarté sur l'utilité de ces élections locales. Malgré le rôle crucial qu'elles jouent dans le processus de décentralisation, les personnes interrogées ne semblent pas tout à fait comprendre la finalité de leur acte électoral. Pourtant, les élections locales sont perçues comme un moyen favorisant une gouvernance plus attentive aux besoins spécifiques de chaque communauté.

Nabil, un retraité âgé de 61 ans, est un observateur tranquille de la scène politique. Bien qu'il admette ne pas saisir les subtilités de ces élections locales, il souligne à La Presse le devoir civique qui l'a poussé à participer. Selon lui, les élus locaux peuvent influencer positivement la politique en répondant aux besoins spécifiques de leur localité, que ce soit dans le domaine de l'éducation, de la santé...

Il perçoit cela comme une forme de décentralisation du pouvoir, où les futurs élus locaux sont mieux placés pour résoudre les problèmes spécifiques de leur communauté. Bien qu'il ne soit pas familiarisé avec tous les détails, il reste optimiste quant à l'avenir. Nabil exprime l'espoir que le processus électoral aboutira à des résultats positifs, prenant exemple sur d'autres pays où le processus a connu un succès indéniable.

Notre interlocuteur encourage la participation de tous à ces élections, soulignant l'importance de partager les besoins de chaque région pour participer à un succès collectif du pays. Il exprime aussi l'espoir que les élus locaux sauront redonner un souffle nouveau à la politique, centré sur les besoins des citoyens.

Voter par confiance personnelle

Pour sa part, Zine El Abidine (52 ans, gestionnaire) insiste sur le rôle crucial des conseils locaux dans l'amélioration de la situation du pays. Sa confiance envers les candidats locaux, en raison de leurs compétences politiques et de leur dévouement, témoigne de l'optimisme partagé par certains électeurs. «Je suis convaincu que l'élection des conseils locaux, plutôt que municipaux, contribuera à améliorer la situation du pays. Leur rôle consiste à défendre les besoins de notre région dans tous les secteurs. Bien que trois candidats compétents et impliqués en politique se présentent, je ne suis pas familiarisé avec les détails de leurs visions respectives.

Ma confiance en eux repose sur notre origine commune, et je suis sûr que quel que soit le résultat, cela servira l'intérêt national. Mon choix se porte sur mon ami d'enfance en qui j'ai une grande confiance. Les trois candidats ont travaillé intensément pour se présenter à ces élections. Aujourd'hui, chaque région défend ses intérêts en fonction des besoins et des problèmes locaux et importants», nous a-t-il déclaré. Salah, un jeune ouvrier âgé de 21 ans, nous offre des réponses succinctes, soulignant le manque de compréhension générale quant à l'utilité des élections locales.

Malgré cette perplexité, il met l'accent sur l'importance du vote, guidé par des critères tels que l'expérience politique et l'activité civile. Interrogé sur sa motivation à voter, Salah répond de manière indécise, en déclarant qu'il ne sait pas vraiment pourquoi. Lorsqu'on lui demande de clarifier, il avoue connaître la liste des candidats, mais reste ambigu quant à la nécessité de voter. Salah admet son manque de connaissance des élections locales et semble peu informé sur les actions des candidats. Il explique que ces élections visent à déterminer les besoins de la région, mais avoue ne pas avoir de détails concrets à ce sujet. Malgré son manque d'information, il exprime sa confiance dans le choix qu'il a finalement fait.

Dignité en péril

La seule femme qui a accepté de partager son point de vue préfère rester dans l'anonymat. Elle pointe du doigt le taux de participation faible, suggérant un désintérêt généralisé pour ces élections locales. Pour elle, les citoyens aspirent avant tout à la dignité et à un retour à des conditions de vie décentes, loin de l'incertitude actuelle. «Le faible taux de participation aux élections locales s'explique par le manque de compréhension de l'utilité de ces scrutins. Pour la majorité des participants, l'aspiration principale réside dans la recherche de la dignité et le rétablissement du niveau de vie d'avant la révolution. Ils aspirent au retour de produits essentiels tels que le sucre, la farine, le café, le lait, et d'autres biens de première nécessité, afin de mener une vie digne loin de l'incertitude actuelle.

Tel est le sentiment partagé par ceux qui ont voté aujourd'hui», a-t-elle affirmé. En conclusion, ces premières élections locales suscitent un intérêt mitigé parmi les habitants de Tazarka. Le manque de compréhension de leur utilité persiste, malgré les espoirs d'une gouvernance plus proche des besoins locaux. Les témoignages révèlent une pluralité d'opinions certes, mais nous instruit sur une donne importante ; le chemin vers une bonne participation assumée et informée aux élections locales en Tunisie est encore à tracer.

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