Ile Maurice: «La hausse salariale signe la fin de certains commerces»

25 Décembre 2023
interview

Le président du Front commun des commerçants de Maurice exprime ses inquiétudes sur l'avenir du monde du petit commerce à partir de janvier. Il souligne les défis posés par la hausse du salaire minimum et la compensation salariale. En ce qui concerne les habitudes d'achat, il souhaite que le public fasse preuve de discernement.

À l'approche de la période festive, comment se porte l'industrie du commerce ?

Actuellement, les ventes se déroulent tranquillement, en particulier, depuis que bon nombre de personnes ont déjà bénéficié de leur bonus de fin d'année. Cependant, on peut observer que les consommateurs font preuve de discernement dans leurs achats. Certains anticipent déjà sur leur budget, surtout ceux ayant des enfants scolarisés. Les dépenses sont considérables pour eux, surtout avec deux ou trois enfants. De plus, avec la paie qu'ils recevront en fin d'année, les consommateurs sont conscients de la nécessité de gérer cette somme jusqu'à la fin de janvier, ce qui représente souvent un casse-tête pour certains. Je me rappelle le temps où j'étais président du syndicat de la Government Printing quand je voyais des individus dépenser sans compter et qui trouvaient ensuite le temps long jusqu'au prochain salaire. Néanmoins, la grande question aujourd'hui est : que faut-il acheter ?

Par rapport aux trois dernières années, les commerçants pourront-ils proposer des nouveautés cette saison ?

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Effectivement, de nouvelles offres seront disponibles mais il est important de noter que les maisons mères ont généralisé les augmentations de prix. Cela aura un impact direct sur le consommateur, car si précédemment nous évoquions la hausse des coûts de transport, aujourd'hui le produit lui-même est déjà onéreux à l'achat. Une fois qu'il aura franchi la douane, se demandera-t-on si la classe moyenne disposera de ressources suffisantes pour acquérir certains articles ? C'est la question cruciale qui se pose. Certes, certains seront prêts à consentir à des dépenses importantes, mais cela ne s'appliquera pas à tout le monde...

On observe que de nombreux particuliers optent pour l'e-commerce via les réseaux sociaux. Quel impact cela a-t-il sur les commerçants ?

À une époque, le ministère du Commerce avait encouragé le développement du commerce électronique, permettant ainsi aux acheteurs de réaliser leurs transactions sans se déplacer physiquement dans les magasins. Cette initiative a donné naissance à de nombreux marchands ambulants qui ont embrassé cette nouvelle approche, entraînant une croissance significative de ce secteur. Autrefois, je luttais contre les marchands ambulants, mais aujourd'hui, ils n'ont plus besoin de parcourir les routes. Ils importent leurs produits de l'étranger, passent la douane, puis vendent leurs marchandises en ligne en toute tranquillité.

Certains fonctionnaires se sont également lancés dans ce mode de commerce, ce qui a des répercussions sur les commerçants traditionnels. Ces derniers doivent non seulement louer des locaux pour leur commerce mais les propriétaires n'hésitent pas à augmenter régulièrement les loyers. De plus, tous les types de commerces ne sont pas aussi prospères. Il est frappant de constater le nombre de magasins qui ont fermé dans les villes. Les vendeurs en ligne ne sont pas tenus de s'inscrire auprès des autorités ou de la Mauritius Revenue Authority. Il faut également souligner qu'il y a peu d'inspecteurs au ministère du Commerce pour ce type de travail, seulement 25 pour surveiller l'ensemble de la situation.

Avec la compensation salariale et la hausse du salaire minimum en janvier, comment envisagez-vous l'avenir de ce secteur d'activité ?

Effectivement, cela pourrait marquer la fin de nombreux commerces. Beaucoup ne pourront pas soutenir leur activité et seront contraints de réduire leurs effectifs. La responsabilité incombe en partie au gouvernement, bien que nous comprenions le droit de chaque individu à percevoir un salaire décent. Les secteurs productifs peuvent envisager de maintenir leurs niveaux de rémunération, mais ce n'est pas toujours possible pour les petites entreprises qui emploient déjà une ou deux personnes.

Ces dernières auront du mal à trouver les fonds nécessaires pour rémunérer leurs employés, d'autant plus avec les coûts élevés, tels que les loyers exorbitants allant jusqu'à Rs75 000, qui englobent les frais d'électricité, d'eau et de téléphone. De plus, ces petits commerces font face à des inspections fréquentes des autorités, que ce soit du ministère du Commerce ou de la Santé, contrairement aux vendeurs de rue. Ce sont généralement ceux qui paient des taxes et patentes qui sont davantage touchés par ces contraintes économiques. La situation soulève des préoccupations sur la nécessité d'un soutien gouvernemental pour aider ces petites entreprises à survivre.

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