L'année 2023 a été riche en émotions. Entre l'organisation des IXes Jeux de la Francophonie de Kinshasa, la XIe édition du Festival panafricain de musique, la tenue à Brazzaville du Sommet des trois bassins forestiers mondiaux et les concerts des patrons de la rumba congolaise, le Bassin du Congo a vibré et a fait vibrer la planète. Retro.
Le Bassin du Congo est l'épicentre du monde. Et s'il a toujours suscité tous les égards d'un point de vue environnemental du fait de la présence du puissant fleuve Congo, deuxième cours d'eau le plus important au monde après l'Amazonie, de la faune et de la flore qui l'auréolent, il n'en demeure pas moins que le Bassin du Congo est à titre égal un bassin culturel qui a livré au monde quelques-uns de ses plus beaux patrimoines : sa musique, ses rythmes, son mouvement, sa danse, ses traditions et son oralité...
Être Congolais, c'est un label
2023 est une année qui a confirmé ce que l'on savait déjà. Ce dont le monde s'en doutait et ne reconnaissait que partiellement à cause du simple fait que le Congolais n'a jamais vraiment su valoriser sa culture, son potentiel, son patrimoine... Jusqu'en 2023, et l'on exagère à peine.
Depuis que les pères de la musique congolaise ont tiré leur révérence, à savoir Luambo Makiadi, Franco et le TP Ok Jazz, Wendo, Madilu System et le grand Papa Wemba, tout en respectant la présence et la carrière du Michaël Jackson d'Afrique, à savoir Koffi Olomidé, l'on se demandait vraiment qui allait reprendre ce flambeau immense et défendre dignement le patrimoine musical congolais.
La nouvelle génération, loin de démériter, n'a pas su mettre tout le monde d'accord tant sur le talent, l'exportation du savoir-faire congolais mais aussi sur les valeurs humaines, le respect des aînés sur lequel le public est tout aussi regardant. Si les uns se distinguaient sur tel aspect et les autres sur tel autre, nul ne s'est distingué de la masser véritablement et a su mettre tout le monde d'accord.
Les polémiques sont ainsi allées bon train pendant plusieurs années jusqu'en 2023 où Fally Ipupa, musicien congolais de Kinshasa, est entré dans une phase de sa carrière où il a ressenti le besoin de faire les plus grandes scènes d'un point de vue numérique, à savoir les stades, en local et en international.
Dans son élan, ses fans, les Warriors, ont délibérément défié tout musicien de faire autant que lui, si ce n'est mieux. Ce qui a piqué les egos de ses pairs, à Kinshasa, mais aussi à Brazzaville.
De ce challenge, sont nés les plus beaux et les plus grands concerts dans les deux villes, la consigne tacite étant de remplir un stade. Ferre Gola a ainsi produit le plus grand spectacle de l'histoire de la République démocratique du Congo, drainant un public de 120 000 personnes, selon les sources officielles de la ville de Kinshasa et une mobilisation digitale de 22 000 streams.
Le ton était donné, l'écho lancé. Si certains sont discrets, cela ne signifie pas qu'ils sont moins talentueux ou bénéficient de moins de soutien.
Roga-Roga Missile n'est pas resté en marge, remplissant le stade Alphonse-Massamba-Débat de Brazzaville en trois semaines d'organisation, rien que ça. Sursaut patriotique.
Si les musiciens ont donné le ton, cet élan a été consolidé par les événements d'envergure internationale qu'ont accueilli les villes de Brazzaville et de Kinshasa en 2023.
Kin la belle s'est refait une beauté pour accueillir les IXes jeux de la Francophonie pendant lesquels Maître Gims, Ferre Gola et Fally Ipupa ont fait des passages très remarqués.
À Brazzaville, c'est le Fespam qui a fait parler. Il revenait après huit ans d'absence et a rendu le public nostalgique de ces temps où Brazza brûlait en effervescence à l'idée d'accueillir Princess Lover, Youssou N'Dour, Oumou Sangaré ou le groupe Kassav. Cette fois-ci, nouvelles générations, nouvelles moeurs, la part belle a été faite à Sidiki Diabaté et au Roi 24, devenu pour le coup très demandé.
La planète avait les yeux tournés sur Brazzaville lorsqu'il s'est agi de questions très sérieuses telles que l'avenir de la planète. La capitale du Congo a accueilli le sommet des trois bassins forestiers, une machine d'organisation telle qu'on en parle encore et on en reparlera encore longtemps.
Le très réputé média français Radio France internationale n'a pas manqué de suivre tous ces évènements de près et a, dans sa politique culturelle, mis en place divers prix pour encourager, récompenser et honorer le talent africain. Cette année a ainsi vu deux récompenses revenir au Congo-Brazzaville dans le domaine de la musique avec la rappeuse Jessy-B et dans l'humour avec Stéphanie Bluetooth.
L'Union européenne qui célébrait ses 60 ans de partenariat avec l'Afrique a mis en avant le parcours d'impacteurs en herbe qui a permis au public congolais de découvrir ou de redécouvrir le parcours des jeunes artistes et activistes comme Fann Attiki Mampouya, Sylvie Diclo-Pomos, Mariusca Moukengue, Luce Bénédicte, Princilia Pérès, Rita Fabienne Lokanga qui, à leur échelle avec les moyens à leur disposition, façonnent l'avenir du Congo, l'avenir du monde.