Dans un entretien avec RFI, le sélectionneur de la RD Congo, Sébastien Desabre, fait une lecture de sa liste des joueurs appelés pour la CAN 2024. Le technicien français évoque aussi, sans le marteler, ses ambitions, avec groupe qui ne se mettra pas de limites à la Coupe d'Afrique.
Sébastien Desabre, vous auriez pu sélectionner jusqu'à 27 joueurs, mais vous n'en avez finalement choisi que 24. Pourquoi ?
On est dans une logique de gestion de joueurs. Je ne voulais pas prendre des joueurs pour ne pas les faire entrer, alors que leur club continue d'avoir besoin d'eux en janvier. Ça aurait pu leur porter préjudice. Ensuite, nous avons jusqu'au 3 janvier pour rajouter des joueurs. Et nous avons jusqu'au 16 janvier (puisque notre premier match est le 17 face à la Zambie) pour remplacer un joueur en cas de blessure. J'estime que le nombre de joueurs est suffisant par rapport à mon plan tactique et aussi pour la gestion de mon groupe sur toute la durée de la compétition.
Justement, c'est un groupe que vous connaissez bien, une équipe assez logique par rapport à vos dernières sélections. Vous avez opté pour un groupe resserré façon commando, une formule qui marche souvent assez bien pour la CAN ?
Il y a quand même eu beaucoup de mouvements sur la dernière année. Cela fait un an et demi maintenant que j'ai l'équipe en mains, on a eu des regroupements et on a maintenant des certitudes. C'est pour cela que l'on n'a pas tout chamboulé. Vous savez, en sélection, on n'a pas souvent les joueurs avec nous. Donc c'est bien d'avoir de la stabilité pour construire une politique sportive cohérente. On connaît les joueurs et leur mentalité, qui a été super depuis le début. Ils méritent aussi de connaître la compétition pour laquelle ils se sont qualifiés. Après un départ chaotique avant mon arrivée, ils ont bien redressé la barre, et c'est une récompense logique pour eux qu'ils disputent la CAN.
La sélection congolaise partait de loin, avec deux défaites en qualification d'entrée. Vous avez un peu remis d'ordre dans la maison, en observant aussi les sélections de jeunes et en vous rendant au CHAN avec l'équipe locale. Cette liste de 24 est l'aboutissement de votre travail depuis votre arrivée ?
Quand j'ai repris la sélection, on était plutôt sur l'objectif de se qualifier pour la CAN 2025. C'est arrivé plus vite que prévu, tant mieux. Bien sûr, on travaille sur cette CAN-là, mais aussi sur la pérennité de la sélection. On suit aussi des jeunes joueurs, appelés en sélections de jeunes, et on surveille le championnat local, qui est enfin reparti, et bien reparti depuis quelques mois. Pour les prochaines échéances, ce sont des bonnes pistes, même si pour l'instant, on est focus sur cette CAN ivoirienne. Il y a quatre joueurs cadres qui connaissent bien la compétition (Chancel Mbemba, Gaël Kakuta, Meschack Elia et Cédric Bakambu). Sinon la majeure partie va la découvrir ! On va essayer de donner la meilleure image possible du football congolais.
Il n'y a qu'un seul joueur local dans votre liste (Baggio Siadi, le gardien du TP Mazembe). Le long arrêt du championnat les a pénalisés ?
Il y a beaucoup de bons joueurs au Congo, dont certains auraient mérité de jouer la CAN, mais il faut faire des choix. Si le championnat avait continué, je pense que Fiston Mayele (aujourd'hui à Pyramids FC en Égypte) ou Henock Baka (actuellement au Simba SC en Tanzanie) seraient restés au pays pour jouer dans les meilleurs clubs. Certains joueurs ont malheureusement dû quitter le Congo depuis ces deux dernières années, car il n'y avait plus de championnat. Mais beaucoup de joueurs, comme Meschack Elia, Chancel Mbemba ou Edo Kayembe sont passés par notre football local. C'est important pour l'équilibre et la mixité du groupe, ça nous apporte de la valeur humaine, et ça fait souvent la différence.
pic.twitter.com/ZpLHnPVARy-- Sebastien Desabre (@Seb_Desabre) December 27, 2023
Vous apportez aussi votre patte, avec un grand renouvellement. Ben Malongo, Jackson Muleka, Neeskens Kebano, Chadrac Akolo ou Yannick Bolasie ne sont pas là pour ne citer qu'eux. Vous ouvrez un nouveau chapitre de la sélection des Léopards ?
Je l'avais dit en arrivant : l'un de mes buts était de rajeunir le groupe et d'apporter de la fraîcheur. Tout en bonifiant les résultats, car ça faisait quelque temps que la sélection de RDC était en déclin. On a gagné quelques places au niveau du classement FIFA et de la CAF, ce qui nous a permis d'être dans le chapeau 2 pour le tirage. En tout cas, on ne pouvait pas tout changer du jour au lendemain. Les fans de foot au Congo sont parfois impatients, car c'est un pays de passionnés, ce qui est très bien. Il faut avancer étape par étape. On en a une grande devant nous qui arrive plus tôt que prévu. On espère remettre le Congo à sa place. Nous sommes la 13e équipe africaine pour l'instant. On va essayer de performer pour progresser et faire une bonne CAN.
On fêtera en 2024 le 50e anniversaire de la dernière victoire à la CAN de la RDC (1974 en Égypte). C'est un anniversaire qui vous motive ?
Même s'il y a eu un quart de finale, une demi-finale ou des succès au CHAN, plusieurs générations de supporters n'ont pas pu vivre un succès à la CAN. Les joueurs en sont conscients. On va faire notre maximum ! Il faut qu'à chaque match les gens soient fiers de notre débauche d'énergie et de la générosité de ceux qui portent le maillot, c'est ça qui est important.
Pour aller loin, il faudra sûrement battre la Zambie le 17 janvier à San Pedro. C'est déjà un match décisif, déjà un 16e de finale ?
Important, mais peut-être pas décisif. Regardez l'Argentine à la Coupe du monde, qui a perdu contre l'Arabie Saoudite d'entrée avant d'être sacrée championne du monde. Il n'y a pas de vérité ! Nous sommes concentrés sur nous-mêmes, il faut que l'on fasse des bons matchs. Nos joueurs ont de la qualité et sont ultra-motivés.
Mais vous n'avez pas spécialement coché ce match contre la Zambie ?
Comme à chaque CAN, il y aura des surprises. Notre objectif, c'est d'être prêt sur les trois matchs, pas que le premier. C'est sûr que l'entrée dans la compétition est primordiale. La Zambie est une belle équipe, avec un trio offensif d'exception. Mais on se préoccupe surtout de nous. On va surtout essayer de ne pas avoir de regrets dans une telle compétition.