Dans le sud de la bande de Gaza depuis le 18 décembre, Jacob Burns, responsable des activités de Médecins Sans Frontières, déplore une situation désastreuse qui s'enlise et des perspectives d'améliorations vaines sans un cessez-le-feu immédiat.
L'incapacité des États-Unis à soutenir une série de résolutions de l'Organisation des Nations unies appelant à un cessez-le-feu dans la bande de Gaza a finalement conduit à adopter une version édulcorée qui ne vise qu'à accroître le flux de l'aide. Cette résolution n'a aucun sens pour ceux d'entre nous qui, sur le terrain, tentent d'apporter de l'aide aux Palestiniens qui en ont désespérément besoin.
Les obstacles à l'acheminement de l'aide à travers des contrôles israéliens et égyptiens sont une réalité, et ces mécanismes doivent être améliorés. Cependant, le principal obstacle au déploiement de plus de secours et de soins de santé de meilleure qualité reste la violence extrême qui caractérise cette guerre.
Depuis Al-Mawasi, la bande côtière qu'Israël a désignée comme zone humanitaire, on entend chaque minute des bombes qui s'abattent sur la ville de Khan Younis, à trois kilomètres de là. La maison tremble par intermittence.
Hier, une équipe MSF s'est rendue à l'hôpital Nasser à Khan Younis, un hôpital dont les Israéliens nous avaient assuré qu'il n'était pas une cible. Des tracts sont pourtant soudainement tombés du ciel, ordonnant l'évacuation immédiate de la zone adjacente à l'hôpital, où se trouve la route d'entrée et de sortie de l'hôpital. Aussi incroyable que cela puisse paraître, l'organe de l'armée israélienne censé coordonner l'aide humanitaire n'a eu connaissance de l'ordre d'évacuation donné par les troupes de combat que plusieurs heures plus tard. Fournir de l'aide dans de telles conditions est tout simplement impossible.
Rafah, la ville la plus méridionale de Gaza, abrite aujourd'hui au moins 1,2 million de personnes, alors qu'elle en comptait 300 000 avant la guerre. Des tentes improvisées à partir de bâches en plastique bordent les rues et les écoles sont pleines à craquer. La terre est dépouillée de sa verdure pour alimenter des feux destinés à réchauffer les gens contre le froid hivernal, car il n'y a que peu ou pas de gaz. L'eau potable et les toilettes manquent et les prix des denrées alimentaires ont été multipliés par six ou sept par rapport à leur niveau d'avant-guerre.
Pourtant, un flot continu de voitures a descendu la route côtière, leurs habitacles remplis de personnes et d'effets personnels, des matelas attachés sur le toit, à la suite de l'ordre israélien d'évacuer certaines parties de la zone centrale de Gaza. Des dizaines de milliers de nouveaux déplacés qui devront essayer de trouver un abri dans une ville où les ressources sont si rares que nous voyons des camions d'aide pillés tous les jours.
La raison de leur fuite est claire : à l'hôpital al-Aqsa, dans le centre du territoire, le personnel MSF a reçu 131 morts et 209 blessés à la suite du bombardement israélien sur les camps de réfugiés d'al-Maghazi et d'al-Bureij dans la nuit du 24 décembre. Les images des corps empilés dans des sacs mortuaires blancs dans la cour de l'hôpital ont tourné en boucle le lendemain. Et puis les bombardements sur Khan Younis ont repris.
Nous voulons faire davantage pour aider la population. Mais la poursuite des bombardements et des combats nous confine dans un espace ridiculement restreint de la bande de Gaza, où les conditions de vie sont désastreuses. Elles sont pourtant moins critiques que dans le nord qui a été coupé de toute aide pendant des semaines. Le seul moyen de sauver des vies ici est de mettre fin à ce carnage, et d'y mettre fin maintenant. »