Ile Maurice: Priorités nationales

31 Décembre 2023

Les circonstances font qu'avec les difficultés aigües des ports de Durban et de Richards Bay, une occasion unique se présente au profit de Port-Louis. En effet, la gestion catastrophique de la compagnie étatique sud-africaine, Transnet, qui opère ces deux ports, faisait qu'à fin novembre, on constatait 63 navires en tête de rade à Durban, attendant d'être déchargés.

Parmi, on trouvait 20 porte-conteneurs, ces bateaux prenant entre deux et trois semaines avant de pouvoir accoster aux quais pour être allégés chacun de leur marchandise. La situation ne s'est pas améliorée depuis et selon les autorités citées par le Mail & Guardian, les mesures de redressement à court terme devraient ramener la situation 'à la normale' sur les 15 prochaines semaines. Les mesures de «réforme» et d'investissement lourds, par contre, pourraient prendre entre 12 et 18 mois...

Les lignes maritimes qui fréquentent la région voient la situation se détériorer depuis des années. Les importateurs se plaignent. Les exportateurs aussi et l'inefficience de Transnet - qui s'occupe aussi du rail et d'une partie du transport routier - est estimé couter un milliard de rands quotidiennement, soit environ 4,9 % du PIB ! Transnet est, par ailleurs et avec Eskom, la compagnie étatique qui a le plus souffert des malversations et tripotages de la state capture chez notre voisin. La conséquence principale de cette situation a été un affaiblissement majeur des programmes d'investissement et d'entretien que les services de Transnet paient 'cash' ces jours-ci, ce qui devrait nous ouvrir une chance extraordinaire!

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D'autant plus que récemment, les velléités des Houthis du Yémen d'attaquer les navires dans la mer Rouge, et notamment ceux qui souhaitent emprunter le canal de Suez, poussent les compagnies maritimes à considérer la route plus longue, mais moins risquée au sud du Cap de Bonne Espérance.

Selon nos renseignements, un délégué de la famille Moller du Danemark, principal investisseur de Maersk, a ainsi recherché un rendez-vous urgent avec le ministère des Finances récemment pour proposer ses services et notamment 20 milliards d'investissement lourds, apparemment SANS exigence de gestion. Cependant on était, apparemment, trop occupé pour les recevoir et quatre rendez-vous durent ainsi être renvoyés. Nul ne pense que cela aura beaucoup aidé la réputation du pays et sa capacité et même sa volonté à faire progresser la centralité de notre port dans la région...

Notre port reste donc toujours une priorité nationale. En devenir... D'autant que l'on aurait, en plus, trouvé que c'était, semble-t-il, le moment idéal pour annoncer... une grève portuaire le 3 janvier prochain!

Le Financial Crimes Commission (FCC) Bill a été voté. Il n'y a pas eu, au dernier jour, le mardi 19 décembre, de débats parlementaires puisque l'opposition n'était pas présente, ayant été manoeuvrée pour venir seulement écouter les arguments du gouvernement...

Ces arguments du gouvernement n'étaient pourtant ni frivoles, ni inconséquents. Comme l'argument que l'article 72(3) de la Constitution ne donne aucune exclusivité au Directeur des poursuites publiques (DPP) pour entamer des poursuites. Ou comme celui que le DPP reste constitutionnellement habilité à prendre le relais du FCC pour continuer toute procédure pénale ou pour y mettre un terme. L'argumentaire du PM, émaillé de piques et de sarcasmes à l'encontre de l'opposition - dont on aurait bien pu se passer - s'appuyait, en outre, habilement sur une déclaration du professeur Stanley de Smith qui a été à la base de la rédaction de la Constitution du pays, ainsi que sur une analyse de Me Cyril de Labauve d'Arifat, un ancien DPP. Qui plus est, faisant référence à divers jugements du Privy Council, Pravind Jugnauth détaillait des arguments qui paraissaient plutôt solidement fouillés et, de prime abord, convaincants.

La FCC est maintenant votée, de toute façon. Elle comporte quelques clauses potentiellement dangereuses et, à part le recours légal contre la constitutionalité de la loi, il ne reste plus qu'à juger de la bonne foi de ses utilisateurs éventuels sur pièces et dans les faits.

On commencera donc par le choix du directeur de la FCC dans le sillage la déclaration du PM: «Ce n'est pas la façon de nommer qui est importante, mais bien la crédibilité de la personne choisie, qui doit assumer son indépendance.» Ensuite on verra bien si la loi est utilisée de bonne foi (*) pour «s'embarquer sur la route de la transparence en matière de Global Business et faire de Maurice, un centre financier international d'excellence et d'intégrité»qui combat tous (et seuls) les délits financiers authentiques. A fortiori nous serons tous aux aguets pour nous rassurer que cette loi ne soit pas utilisée pour persécuter les opposants de toute nature.

«Honest people have nothing to fear», disait encore le PM, qui pour faire bonne mesure, nous assure que le PTr et le PMSD étaient contre cette loi parce qu'ils défendaient les multiples mafias qu'ils ont «engendrées, soutenues et protégées durant leur règne maléfique». Dans le cas travailliste, le règne maléfique, c'était il y a neuf ans déjà et le MSM, de son propre aveu, n'a pas été capable d'y mettre de l'ordre depuis... Quant au PMSD, il a été partenaire du MSM entre 2015 et 2016 lors de son dernier 'règne'... Reste le MMM, accusé d'avoir reçu Rs 10 millions de la BAI pour la campagne électorale de 2014 !

Rappelez-moi comment l'on finance les élections mauriciennes, déjà ? Et qui aurait pu réformer le système «mafieux» actuel, ces neuf dernières années ?

Cinq engagements de l'opposition parlementaires qui sont finalement six. Pour le moment. Redonner ses lettres de noblesse au Parlement avec un speaker digne d'une île Maurice moderne. Bien d'accord !

Remplacer la «Financial Crimes Commission» aussi vite que possible. On y trouve pourtant de bonnes choses et l'efficacité recherchée est positive. Ce serait peut-être mieux d'améliorer plutôt que de remplacer ? Et d'accompagner avec PACE?

Stopper les nominations politiques par le PM et créer une «Constitutional Appointment Authority». L'idée de base est bonne ! Reste à définir les postes qui seront concernés. Et si c'est vraiment une authority plutôt qu'un parliamentary committee que l'on prévoit, il faut quand même réfléchir à ce que pourraient bien faire ses employés, une fois les nominations approuvées en début de mandat ?

Maintien de la pension de vieillesse à Rs 13 500 «et plus». Ne pas reculer et même avancer sur cette question, c'est bien intentionné, mais faut-il quand même bien voir les projections financières et les partager avec la population pour discuter des choix véritables qui sont devant nous.

Exemption d'impôt pour les 18 à 28 ans. Une belle idée! Reste encore à quantifier et à trouver supportable.

Rétablir les élections villageoises et municipales, déjà renvoyées plus d'une fois: on ne peut qu'être d'accord, n'est-ce pas Mr Jeewooth !

L'an prochain, 2024, sera une année cruciale pour les élections mondialement.Malheureusement toutes les élections ne sont pas démocratiques au même degré et sont souvent même des mascarades qui tentent de légitimer le règne d'un autocrate. Qui dit 'démocratie' présuppose des 'élections', cependant que des 'élections' ne garantissent nullement de la 'démocratie'!

Selon les calculs de The Economist, 76 pays projettent de tenir des élections en 2024. Ainsi, plus de la moitié de l'humanité adulte sera appelé aux urnes. Parmi les pays les plus importants on retrouve l'Inde, l'Union européenne, le Mexique, les ÉtatsUnis, la Russie, l'Indonésie, la Grande-Bretagne, l'Afrique du Sud... mais seuls 43 de ces 76 pays bénéficient d'élections qui sont estimées libres et équitables. Maurice en fait heureusement partie et ce, jusqu'à PREUVE du contraire et, fait notoire, huit des dix pays les plus peuplés de la planète se rendront ainsi aux urnes.

Parmi les élections les plus marquantes en conséquences possibles, citons celles de l'Afrique du Sud où un ANC affaibli fera face à une coalition de huit partis d'opposants au sein de la MPC et où le taux de participation au vote sera crucial ; celle de Taiwan qui déterminera si la mer de Chine va rester vexatoire, celle des présidentielles des États-Unis où les deux candidats sont vieux et ne sont pas jugés souhaitables, et celle du Parlement européen qui va probablement virer à droite et favorisera des politiques anti-immigrants, alors même que l'Europe vieillit et a grandement besoin de travailleurs!

Et puis, il y aura, bien sûr, nos élections... Les plus importantes du monde. Du moins pour nous!

Le salaire minimum en hausse et les augmentations salariales font déjà des heureux. Et des ravages! La vague d'augmentations pour rétablir les différentiels, suivant PRB et Wage Consultative Council, arrive en conséquence. Suivront d'autres répercussions: inflation, pertes financières et licenciements. Priorités nationales ?

(*) https://lexpress.mu/node/529577

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