La signature d'un accord entre l'Éthiopie et le territoire autoproclamé indépendant du Somaliland, lundi 1er janvier, a suscité la colère de la Somalie qui a parlé d'un viol de sa souveraineté, ainsi que l'inquiétude dans toute cette région très instable.
La polémique ne retombe pas dans la Corne de l'Afrique après l'annonce lundi d'un accord signé entre l'Éthiopie et le Somaliland. Ce territoire autoproclamé indépendant de la Somalie a affirmé que le texte prévoyait une reconnaissance du Somaliland comme État à part entière par l'Éthiopie en échange d'un accès à la mer.
Au fil des jours, le problème prend de l'ampleur, de plus en plus de pays prennent position et chaque camp tente d'engranger un maximum de soutiens.
Ces derniers jours, c'est la Somalie qui a engrangé le plus d'appuis diplomatiques officiels. Aujourd'hui, les représentants de la Ligue arabe au Kenya ont tenu une réunion d'urgence et réaffirmé leur soutien. Même appui en fin de semaine des diplomaties américaine, danoise, néerlandaise, britannique et turque. C'est au téléphone, jeudi soir, que Josep Borrell, le chef de la diplomatie de l'Union européenne, a fait part de sa sollicitude au président somalien Hassan Sheikh Mohamoud. Sur son profil X, il « réaffirme le plein soutien de l'UE à la souveraineté et à l'intégrité territoriale de la Somalie. »
L'Union africaine et l'Igad, l'organisation régionale de la Corne de l'Afrique, ont quant à elles appelé à une solution négociée, sans vraiment émettre d'opinion sur l'accord entre l'Éthiopie et le Somaliland. Une position tellement tiède qu'elle a provoqué le courroux de la villa Somalia, la présidence somalienne. Plus étonnant reste le silence des pays de la sous-région, pourtant concernés au premier plan. Ni le Kenya ni l'Érythrée ne se sont encore exprimés. « Sans doute qu'ils ont déjà bien assez de crises sur les bras » commente un observateur de la région, évoquant notamment le conflit au Soudan. Alexis Mohamed, conseiller du président djiboutien, rappelle néanmoins qu'Ismaïl Omar Guelleh, reste disponible pour une médiation, « si elle lui était demandée ».
Mais au-delà de ces réactions, beaucoup se sentent le besoin de prendre position. Des députés kényans d'origine somali ont par exemple déclaré collectivement leur solidarité avec Mogadiscio, dénonçant « l'aventurisme politique irresponsable » de l'Éthiopie... Des élus somaliens ont même demandé des mesures de rétorsion. Certains appellent à stopper l'importation du khat éthiopien, ou même à arrêter les liaisons avec Ethiopian Airlines.
Somaliland et Éthiopie font également du lobbying. Taïwan, grand allié du Somaliland, a par exemple reçu une délégation d'Hargeisa. Le territoire reste toutefois soucieux de son image. Son ministère des Affaires étrangères a demandé à sa population de rester mesurée, d'argumenter avec des faits. « Vous êtes les ambassadeurs du Somaliland », ont indiqué les autorités.
L'Éthiopie pour sa part a réuni des diplomates étrangers pour évoquer l'accord. Addis-Abeba a opportunément annoncé le lancement d'une semaine de la diplomatie à partir du 11 janvier, pour souligner le rôle du pays dans la région et sur le continent...
Toutefois, pour ne rien arranger à la situation, Addis-Abeba a dans le même temps annoncé le lancement de la dernière phase de construction du barrage de la Renaissance. Infrastructure géante, source de graves tensions avec l'Égypte.