Au lieu d'embaucher des infirmiers et infirmières, le ministère de la Santé vient de recruter des «General Workers», même s'ils se tournent les pouces. L'important, c'est de donner du travail et, politiquement, c'est rentable.
Si vous vous rendez à l'hôpital Victoria, Candos, et ne trouvez pas de chaise libre dans une des salles d'attente, c'est probablement parce qu'elles sont occupées par des General Workers, fraîchement recrutés par le ministère de la Santé. Une cinquantaine vient de l'être il y a un mois de cela, rien que pour cet hôpital.
Lors d'une visite d'un de nos journalistes le 22 décembre, ils étaient sept à s'asseoir sur ces chaises entre 8 heures et 9 h 30, à l'heure du départ du journaliste. Si certains d'entre eux fixaient leur portable, deux dames s'amusaient à autre chose. Elles dévisageaient les patients, surtout ceux très mal en point. Et devinez quoi ? Elles se moquaient à haute voix de leur façon de marcher en clopinant, ou sur l'état physique des malades, notamment les vieux. Et éclataient de rire sur leurs propres remarques les plus comiques et dégradantes. Une sorte de compétition de blagues, quoi, pour personnes oisives. Ces General Workers étaient toujours dans la salle d'attente le 5 janvier.
Interrogée, l'infirmière en charge d'appeler les patients nous a affirmé que ces employés attendaient leur tour pour une prise de sang. Alors que plusieurs autres infirmiers et infirmières et même médecins nous ont dit que c'est faux : ces General Workers reconnaissables à leur uniforme bleu n'ont rien à faire et font passer le temps. «Ils viennent s'asseoir dans les salles d'attente pour ne pas rester debout dans les couloirs où ils barrent le passage.» Mais pourquoi a-t-on recruté des General Workers pour ne rien faire ? «Les élections approchent...» nous dit une source au ministère de la Santé.
On apprend que ce recrutement n'est pas passé par la Public Service Commission (PSC). Une dérogation a été décrétée pour permettre au ministère de la Santé de recruter directement et d'urgence. Mais quelle urgence, lorsque l'on voit que ces General Workers n'ont pratiquement rien à faire ? On nous dit qu'ils doivent maintenir les salles propres et certains ont reçu la tâche spécifique de nettoyer les lieux semés de déjections de pigeons qui s'aventurent même dans les salles d'attente. On voit d'ailleurs ces volatiles voler ici et là à l'hôpital Victoria et trouver refuge dans les innombrables coins et recoins du plafond.
Notre source au ministère de la Santé nous fait remarquer que ce n'est pas la faute à ces travailleurs s'ils sont payés à ne rien faire. « l y a tant de travail et surtout du nettoyage à faire. Mais il y a un problème d'organisation.» Il faut savoir que les hôpitaux emploient aussi les services de prestataires privés dont les cleaners qui se tapent en fait tout le travail. Ces pauvres employés du privé, déjà sous-payés et ne bénéficiant que de peu de sécurité d'emploi, doivent tout faire. N'avons-nous pas appris comment les gardiens de réservoir de la CWA s'occupent aussi de l'ouverture et de la fermeture des vannes ?
«C'est à cause de ces emplois qui viennent d'être créés par milliers dans la fonction publique, nous dit un industriel, que nous ne trouvons pas de bras. Et c'est pour cela qu'il nous faut avoir recours à la main-d'oeuvre étrangère, avec tous ces inconvénients pour nous et les désavantages pour l'économie. On est en train de créer en réalité des oisifs.» Notre interlocuteur au ministère de la santé nous rappelle aussi que la majeure partie de ces General Workers viennent de certaines circonscriptions en particulier.
Le Dr Gopal, en charge de l'hôpital Victoria, a promis de revenir vers nous. Nos questions envoyées au ministère de la Santé depuis le 26 décembre sont restées sans réponse.