En RDC, le M23 contrôlerait près de 80% du territoire de Rutshuru, proche des frontières du Rwanda et de l'Ouganda. Cette occupation affecte l'économie locale.
Dans l'est de la République démocratique du Congo, les rebelles du M23 contrôlent encore plusieurs localités dans les territoires de Masisi et de Rutshuru. Quel est l'importance de ce territoire de Rutshuru aussi bien pour les rebelles que pour l'état congolais et comment la population réagit-elle à l'occupation de la région par les rebelles du M23 ?
Rutshuru est un vaste territoire de la province du Nord-Kivu proche des frontières du Rwanda et de l'Ouganda.
Ce territoire a toujours été le point de départ de la plupart des grandes rebellions de la RDC notamment celle lancée en 1997 par l'AFDL de Laurent Désiré Kabila.
Depuis le 8 novembre 2021, les rebelles du M23 y ont repris les attaques contre les forces armées congolaises et ont réussi à prendre le contrôle de plusieurs localités.
Le Comité de paix et sécurité
Fin 2022, le M23 a installé une administration dénommée Comité de paix et sécurité (COPASEC), composé de quelques civils de la rébellion et des membres des communautés locales. Un coordonnateur, installé à Rutshuru centre, gère au quotidien les activités de cette administration.
Certains habitants comme Agerimana Alphonsine, pensent que la sécurité s'améliore dans les zones occupées par les rebelles du M23.
"Nous vivons bien, raconte-t-elle. Je ne peux pas dire que nous vivons dans des mauvaises conditions, car je peux circuler la nuit sans que quelqu'un me vole mon téléphone, ou que quelqu'un me tabasse. C'est pourquoi je dis que nous vivons bien. Nous n'avons pas de problèmes avec eux et nous n'entendons pas de tirs la nuit. Aussi, il y a moins de voleurs ces derniers temps."
Manque de confiance
Si certains habitants saluent l'amélioration de la situation sécuritaire, d'autres évoquent un manque de confiance entre la population et les rebelles à cause de quelques tracasseries perpétrées par les rebelles. Jean Kaseru, un habitant de Rutshuru, assure que "les articles au marché ont pris de l'ascenseur à cause des tracasseries routières de la part des rebelles. Moi je ne peux pas dire qu'on vit en paix, parce que les gens vivent avec la peur. Le M23 est ici mais la population n'a pas confiance en eux."
Les écoles ont ouvert au mois de septembre 2023 dans certaines localités et quelques structures sanitaires sont opérationnelles, y compris celles appartenant à l'Etat congolais.
Les radios locales et des organisations non gouvernementales sont aussi opérationnelles.
L'économie souffre
Cependant, la fermeture de la route nationale 2 par les autorités congolaises affecte la vie socio-économique de la population.
Sendugu Mwenyemali, un habitant de Rutshuru et membre de la société civile, raconte que "pour ce qui est de la sécurité, nous circulons librement. Mais sur le plan économique ou de l'agriculture, vous pouvez cultiver mais vous n'aurez pas d'acheteurs. Vous faites du commerce, il n'y a pas des clients. L'argent ne circule pas et la route est bloquée. Aussi, il n'y a pas des opportunités d'emplois. Il n'y a que l'agriculture et malheureusement même les produits champêtres ne sont pas achetés."
Aujourd'hui, le M23 contrôlerait près de 80 % du territoire de Rutshuru. Un territoire qui représente la plus grande source d'approvisionnement en céréales pour la ville de Goma et celle voisine de Bukavu.