L'ancien ministre gambien de l'Intérieur est accusé de crimes contre l'humanité, torture, enlèvement ou encore exécutions extrajudiciaires. Jamais un homme au niveau hiérarchique aussi élevé n'a été jugé en Europe au titre de la compétence universelle. Et ce n'est que la seconde affaire criminelle concernant la dictature de l'ancien président Yahya Jammeh à se retrouve devant la justice. Ce mercredi, les premières victimes ont témoigné à la barre.
Craignant d'être déstabilisée, Binta Jamba a demandé à ce qu'Ousman Sonko ne soit pas dans la salle durant son témoignage. Alors que son tortionnaire présumé était dans une autre pièce, elle a accusé l'ancien ministre d'avoir tué son mari avant de venir chez elle et de l'agresser sexuellement. Il l'aurait violée, 4 à 5 fois par semaine, pendant plusieurs années.
Pour Reed Brody de la Commission internationale de Juristes, présent sur place, il était temps que les victimes racontent enfin leur histoire. « C'est un moment critique. J'ai rarement vu un témoignage aussi impactant. Elle est devenue une esclave sexuelle. C'est un début de justice des victimes de pouvoir raconter. Il y a quelque chose de sacré dans l'idée d'un prétoire où la vérité est déterminée à travers une procédure contradictoire, où la liberté de l'accusé est en cause. »
Mais pour Me Philippe Curat, l'avocat d'Ousman Sonko, le témoignage de Binta Jamba n'est pas crédible. « On a de sa part un témoignage bourré de contradictions. Il a été déployé de début janvier 2001 jusqu'à mi-janvier 2002 dans les forces des Nations unies en Sierra Leone. IL est reparti au Nigeria d'août 2002 à fin mai 2003. On a un alibi établi par pièces officielles. »
Ousman Sonko est accusé d'avoir eu un rôle central dans le système de répression. Mais lui nie en bloc. Selon son avocat les actes étaient commis par les services de renseignements et l'unité des Junglers. Deux groupes qui n'avaient aucun lien hiérarchique avec Ousman Sonko.