Le 14 janvier prochain, les Comoriens sont appelés aux urnes pour élire leur nouveau président. Candidat à sa propre succession pour un troisième mandat consécutif, le président sortant, Azali Assoumani, par ailleurs président en exercice de l'Union africaine (UA), fait figure de favori. Il sera face à cinq autres concurrents dont les candidatures ont été validées par la Cour suprême, tandis que quatre ont été recalés.
En l'absence de son grand rival, l'ex-président Ahmed Abdallah Sambi, condamné en novembre 2022 à la prison à vie au terme d'un procès dénoncé comme inéquitable, et de l'ancien vice-président, Mohamed Ali Soilihi, en exil à Paris, c'est pratiquement en roue libre que le locataire du palais Beit-Salam abordera ces élections face à des concurrents comme Salim Issa Abdillah, un médecin novice en politique, Aboudou Soefou, ancien ministre des Affaires étrangères, Mohamed Abdallah Daoudou, ancien ministre de l'Intérieur, Mouigni Baraka Saïd Soihili, ancien gouverneur de la Grande Comore et Bourhane Hamidou, candidat indépendant qui ne sont pas connus pour être les poids les plus lourds de la faune politique de l'archipel de l'Océan indien. On est d'autant plus fondé à le croire qu'entre partisans du boycott et ceux qui sont contre la politique de la chaise vide, l'opposition, ou du moins ce qu'il en reste, part fortement divisée à cette élection.
Avec une Justice aux ordres, c'est un Azali Assoumani plus que confiant qui mise sur le coup K.-O
Et en étant incapable, en amont, de s'entendre autour d'une candidature commune pour se donner plus de poids dans la compétition, on ne voit pas comment elle pourrait barrer, dans les urnes, la route de ce troisième mandat décrié et aux antipodes des règles de l'alternance, à l'ex-colonel putschiste qui a réussi, entre-temps, à troquer le treillis contre le costume-cravate pour s'installer durablement à la tête de l'Etat. Et qui mène son pays d'une main de fer depuis son retour au pouvoir en 2016. Toujours est-il qu'avec une Justice aux ordres, une opposition réduite à sa plus simple expression et une machine électorale de fraudes massives à portée de main, c'est un Azali Assoumani plus que confiant qui mise sur le coup K.-O. et qui a demandé à ses électeurs de se mobiliser pour l'élire « dès le premier tour ».
En tous les cas, au regard des moyens colossaux qu'il a déployés pour sa campagne, comparativement à ses concurrents, et de l'inégalité d'accès aux médias, la compétition semble d'autant plus jouée à l'avance que l'opposition elle-même s'accorde à reconnaître que le vote du dimanche est une élection taillée à la mesure du chef de l'Etat sortant. Comment peut-il en être autrement quand on voit comment, à la faveur d'un référendum constitutionnel controversé, il s'était déjà ouvert le chemin tortueux d'un troisième mandat qui reste une première dans l'histoire politique des Comores ; aucun de ses prédécesseurs n'ayant, avant lui, succombé à cette tentation ? C'est donc, pour ainsi dire, un scrutin pour la forme que les Comoriens s'apprêtent à vivre le 14 janvier prochain et qui sera servi à la communauté internationale en vue de donner un vernis démocratique à une gouvernance qui jure pourtant par l'autoritarisme du locataire du palais présidentiel.
Il faut espérer que la transparence dans la compilation des résultats, permette de donner plus de crédit à cette élection
C'est dire si dans une organisation qui se respecte, un tel bourreau de la démocratie et des règles de l'alternance, n'aurait jamais mérité de diriger une prestigieuse institution comme l'UA ! Mais que celui de ses pairs qui n'a jamais songé un jour à ruser avec la démocratie, lui jette la première pierre ! En tout état de cause, avec cette candidature inédite de Azali Assoumani à un troisième mandat consécutif, c'est une élection qui s'annonce comme un tournant pour les Comores avec des défis majeurs qui se conjuguent en termes de pauvreté, de chômage et de corruption.
Et maintenant que la campagne qui prend fin ce 12 janvier, se termine sans véritable anicroche, il faut espérer que le vote se déroule dans le calme et la sérénité. Et que la transparence dans la compilation des résultats, permette de donner plus de crédit à cette élection dont le taux de participation reste l'un des enjeux cruciaux pour garantir la légitimité du nouvel élu. En rappel, les Comores sont un pays d'Afrique australe composé d'un archipel de trois îles situées au Nord du Canal du Mozambique dans l'Océan indien. Ce sont l'île d'Anjouan, la Grande Comore et Mohéli. Sa capitale est Moroni. Avec une population qui tourne autour du million, le corps électoral est évalué en deçà de 400 000 électeurs.