Tunisie: Trois questions à Mohamed Zmerli, point focal national de la Convention des Nations Unies sur les Changements Climatiques, à La Presse - «La Tunisie mise sur les énergies renouvelables à l'horizon 2030»

14 Janvier 2024
interview

La dernière COP 28, qui s'est déroulée du 30 novembre au 12 décembre 2023 à Dubaï aux Emirats arabes unis, à laquelle avait participé une délégation tunisienne composée de 200 personnes influentes sur la question du climat et des membres des différents ministères, mais aussi de l'Utica, nous a apporté de nouveaux enseignements.

La Tunisie en tant que pays membre et signataire des accords de la convention sur le climat depuis 1992 doit nécessairement s'astreindre aux objectifs climatiques mondiaux, avec ses propres caractéristiques et défis. On a voulu en savoir plus sur les retombées pour la partie tunisienne, en consultant le spécialiste tunisien sur le climat, M. Mohamed Zmerli, point focal national de la Convention des Nations unies sur les changements climatiques.

Quel rôle doit jouer la Tunisie dans cette lutte climatique durable qui nécessite des moyens très importants, et quelle priorité doit-elle accorder à ce fléau mondial, au moment où elle surmonte, à peine, la crise économique qui l'a frappée ces dernières années ?

Il y a des décisions majeures prises dans le cadre de la solidarité internationale sur le climat, la politique de financement, la multiplication de facteurs pour favoriser le recours aux énergies renouvelables et réduire celles fossiles pour l'ensemble des pays de la planète.

Chaque pays a donc la latitude de cibler et choisir son domaine d'intervention selon la priorité, pour obtenir des résultats tangibles en matière de lutte contre les effets du CC.

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A ce titre, la Tunisie est dans la phase initiale de la transition énergétique, qui vise à atteindre 35% d'énergies renouvelables utilisées à l'horizon 2030. Ce qui est plausible dans la mesure où la Tunisie a un très fort potentiel en matière d'énergie solaire issue des régions de forte chaleur et semi-désertiques du sud, produisant entre 4.000 et 5.000 Mégawatts grâce au photovoltaïque. On a 120 jours d'ensoleillement par an. La Tunisie mise donc fortement sur cette énergie renouvelable à l'horizon 2030. D'autres pays peuvent tendre vers l'énergie hydraulique avec de grandes régions montagneuses, ou l'énergie éolienne.

L'ambition est de réduire l'émission des gaz à effet de serre pour assurer la survie des entreprises du secteur privé que l'Etat doit soutenir et accompagner continuellement à cause des menaces qui pèsent sur leurs activités. Ces dernières sont durement frappées par l'impact des CC et ont beaucoup d'obstacles à surmonter pour réaliser les objectifs du développement durable et une meilleure contribution dans l'empreinte carbone de la Tunisie.

En tant qu'expert et consultant international, comment percevez-vous l'évolution du climat en général et de la météorologie en particulier, sur le plan local et dans la zone euro-méditerranéenne qui doit oeuvrer à améliorer son empreinte carbone ?

Il faut savoir qu'il y a 4 principaux phénomènes météorologiques qui s'accentuent sous l'effet des changements climatiques. Tout d'abord, une augmentation des températures. D'où l'objectif de l'Accord de Paris en 2015 visant à réduire le réchauffement de 1,5° d'ici 2100 en Tunisie, parce qu'en 2023, on est à 1° C d'élévation de température par rapport à 1850. La Tunisie est classée dans le groupe des PED (pays en développement), avec la Chine qui est le deuxième plus grand émetteur de CO² dans le monde.

Le deuxième phénomène produit par un impact des manifestations du CC a trait à la réduction du niveau des précipitations.

Le scénario moyen, assez probable, envisage une réduction de 30% des précipitations à l'horizon 2030, par rapport à celles enregistrées actuellement touchant plus fortement et davantage les zones arides du pays.

La Tunisie est particulièrement impactée par le réchauffement climatique. Le troisième phénomène consiste en l'élévation du niveau de la mer et la montée des eaux conséquence directe des CC, au point d'affecter notre tourisme, principalement balnéaire, avec l'érosion des plages. Enfin, on constate une augmentation et une plus grande fréquence des catastrophes naturelles dues au CC, avec de fortes inondations sur la ville, comme il y a deux ans à Nabeul. La fréquence des catastrophes naturelles est doublée.

Enfin, sachant que les pays riches et développés économiquement sont les plus grands pollueurs, comment la Tunisie va se donner les moyens d'appliquer les recommandations des accords de la COP 28 et ceux prévus dans la COP 29 dans un an ?

Pour la première fois, un fonds mondial va être institué. Sous la dénomination Fonds des Pertes et Préjudices, la COP 28 opérationnalise enfin la décision. L'objectif est d'aider les PED les plus vulnérables, dont la Tunisie, à faire face aux risques de catastrophes naturelles liés au changement climatique pour améliorer les moyens d'intervention, les fonds d'urgence et toute la préparation nécessaire et requise.

Pour réduire les impacts des CC, il y a un besoin de financement plus important que ce soit à travers les mécanismes classiques comme la coopération internationale ou les instruments spécifiques aux CC. En général, les investissements dépassent les capacités nationales en termes de budget, c'est pour cela qu'on parle de la mobilisation de la finance internationale et des bailleurs de fonds. Ce sont les principaux enseignements de la participation tunisienne à la COP 28.

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