L'ancien ministre de l'Energie et candidat à la présidentielle de 2024, Thierno Alassane Sall, en évoquant la nationalité française de Karim Wade, remet sur la table un débat qui ne cesse de polluer la scène politique. Le candidat du Parti démocratique sénégalais (Pds) qui, selon ses souteneurs, a renoncé à sa nationalité française, continue pourtant d'être sur les listes électorales françaises.
La publication d'une première liste de 21 candidats retenus pour la présidentielle du 25 février prochain a remis une couche dans le débat politique, en ce sens que, pour aspirer à la magistrature suprême, les prétendants doivent être exclusivement de nationalité sénégalaise, selon la Constitution. Karim Meïssa Wade, parmi la vingtaine de postulants, retenus par le Conseil constitutionnel, ne semble pas pouvoir se prévaloir d'un tel droit, selon ses détracteurs car son profil serait une entorse à une des neuf conditions d'éligibilité fixées par la Constitution.
Dans un communiqué daté du dimanche 14 janvier, le leader de la République des Valeurs et candidat à la présidentielle, Thierno Alassane Sall, vend la mèche. «Selon diverses sources, Karim Wade, candidat à l'élection présidentielle, serait toujours détenteur de la nationalité française, ce qui est en contradiction avec la Constitution de notre pays. Notre Loi fondamentale dispose que tout candidat à la magistrature suprême doit exclusivement être de nationalité sénégalaise», dit-il, en faisant référence à la Constitution qui stipule, en son article 28, entre autres, que «Tout candidat à la Présidence de la République doit être exclusivement de nationalité sénégalaise, jouir de ses droits civils et politiques».
La sortie de l'ancien ministre de l'Energie a fait réagir les libéraux. «Nous déplorons que, malgré cette décision, certains s'acharnent à tenter de discréditer Karim Wade, en soulevant des questions fantaisistes relatives à sa nationalité française. Questionner la nationalité de Karim Wade, qui a clairement renoncé à sa bi-nationalité, est l'expression méprisable d'une discrimination ou d'une xénophobie qui n'honore pas certains candidats qui en sont à l'origine», ont-ils riposté.
Seulement, force est de constater que Karim Wade, sauf s'il s'agit d'un autre, est bel et bien inscrit dans les listes électorales françaises. Le fichier électoral consulté hier, par nos soins, atteste que le nom de Karim Wade est présent sur les listes, sous le numéro national d'électeur 160275427 et électeur au bureau 00026 de la commune de Versailles.
Rappelons que Karim Wade, condamné en 2015 à six (6) ans de prison ferme pour enrichissement illicite, a été gracié en 2016 par le président de la République, Macky Sall, et vit en exil depuis lors, au Qatar. Cette condamnation à l'origine de sa non-éligibilité a motivé les siens à prendre part au dialogue national impulsé par le président de la République l'année dernière, qui a abouti à une modification du Code électoral. Au terme d'une longue séance plénière du samedi 5 août 2023, au total 124 députés ont adopté le projet de réforme qui permet à Karim Wade et à l'ancien maire de la capitale, Khalifa Ababacar Sall, de réintégrer la course pour le fauteuil présidentiel. La grâce présidentielle a effacé la sanction pénale, mais pas les amendes financières estimées à plus de cent (100) milliards de FCFA. Pour espérer briguer le suffrage des Sénégalais, Karim Wade devrait donc verser à la Caisse de dépôts et consignation (Cdc) la somme qui lui a été infligée par la justice, selon des spécialistes.
Pour le moment, le Parti démocratique sénégalais (Pds) qui l'a investi et l'a toujours maintenu comme numéro 1, malgré ses déboires judiciaires, n'a pas communiqué sur le versement de cette amende. Si sa candidature venait à être acceptée, le 20 janvier prochain, la présidentielle de février 2024 marquera son retour à la vie politique. A signaler que ce n'est pas une première que le débat sur la nationalité de Karim Wade envenime le débat politique. En tout temps, il lui a été rappelé sa nationalité française.