Sénégal: Elevage de « ladoum », un bon filon pour l'emploi des jeunes

Dakar — L'élevage de moutons de race améliorée »ladoum » est une activité longtemps considérée comme un hobby. Un violon d'Ingres pour fonctionnaire voulant s'occuper les week-ends. L'explosion de cette activité ces dernières années n'était pas spécialement attendue certes, mais cette évolution apporte une nouvelle perspective à la vie de nombreuses personnes qui voient dans ce secteur une niche de création d'emploi.

Cela tombe bien, les jeunes ne demandent souvent qu'à s'occuper. Il y a cependant que la filière élevage de moutons de race « ladoum » nécessite plus d'organisation pour que ses acteurs puissent atteindre les niveaux de rentabilité escomptés.

Le Regroupement des éleveurs de Tivaouane pour la promotion de l'élevage ladoum (REPTEL) ne s'y trompe pas. Le REPTEL milite pour l'homologation de cette race améliorée de mouton, afin de mieux positionner le Sénégal sur le marché continental, voire mondial.

Le REPTEL est à l'initiative d'un Salon de l'élevage dont la sixième édition s'est tenue en janvier à Tivaouane (ouest), où l'élevage de moutons de race « ladoum » est en plein essor, alors que ce département se trouve dans le même temps fortement impacté par l'émigration irrégulière.

Ils sont nombreux à considérer donc que cette activité offre une alternative pour tous ces jeunes qui rêvent d'ailleurs et d'un hypothétique Eldorado, en contribuant à les retenir sur place.

Les éleveurs de moutons de race « ladoum » contribuent à créer »un grand nombre d'emplois », soutient le président de la Fédération nationale des acteurs de la filière ovine (FENAFO), Abou Kane.

Cette activité contribue à freiner l'émigration irrégulière, « car beaucoup de jeunes sont employés dans les bergeries », dit cet acteur, affirmant que « beaucoup sont devenus des millionnaires avec les moutons ladoum ».

Il arrive souvent que certains jeunes, après avoir acquis suffisamment d'expérience comme employés de bergeries, se mettent à leur propre compte.

Abou Kane a un exemple précis en tête et n'hésite pas à le partager : « J'ai une fois prêté un mouton ladoum à un jeune. Au bout de quelque temps, il m'a donné une avance pour que je lui cède définitivement une agnelle. A force de travail, il est devenu autonome en me payant le reliquat. Aujourd'hui, il se déplace avec un véhicule de marque et emploie lui-même des jeunes ».

Des exemples de réussite par cette activité, Abou Kane peut en donner encore et encore. Il cite volontiers le cas d'un apprenti employé dans des autocars, devenu propriétaire de plusieurs véhicules de transport en commun de marque Tata.

Il s'appelle Moussa Yade. « Je lui avais prêté une agnelle qui coûtait 700.000 à l'époque, il a sollicité et obtenu les services du géniteur appelé Boy Sérère », qui lui a permis de constituer sa propre bergerie, devenue une référence dans le milieu.

L'élevage de « ladoum » plutôt que l'émigration irrégulière

Selon le président de la Fédération nationale des acteurs de la filière ovine, Moussa Yade a récemment vendu un mouton à 10 millions de francs CFA.

Un jour, raconte-t-il, un de ses clients lui a confié que son fils qu'il voulait voir émigrer lui a plutôt demandé un mouton « ladoum » pour s'engager dans l'élevage. Abou Kane confie avoir fait observer à ce client que c'était peut-être là une voie pour réussir au Sénégal.

Il a accepté de lui céder une de ses agnelles à 500.000 francs CFA, permettant ainsi à son garçon de s'engager dans cette activité avec laquelle il a pu s'offrir une grande quincaillerie, sans compter qu'il parcourt désormais les salons d'agriculture du monde entier pour vendre ses moutons.

Il résulte de ces différentes anecdotes que le Sénégal peut bien s'appuyer sur ce secteur pour tenter de résorber le chômage des jeunes, tout en contribuant à rééquilibrer la balance commerciale du pays à travers la limitation des importations de lait et de viande.

La Compagnie nationale d'assurance agricole du Sénégal (CNCAS), spécialisée dans la couverture des risques agricoles, est un bon instrument pour arriver à cet objectif, indiquent des acteurs interrogés par l'APS.

L'apport des assureurs pour booster le secteur

Selon l'assureur Djibril Diop, l'Etat du Sénégal, depuis le passage de Abdoulaye Wade à la tête du pays (2000-2012), a eu l'intelligence de bâtir un partenariat public-privé ayant impulsé un nouvel environnement avec « des conditions favorables » aux acteurs privés dont les activités peuvent tirer profit de la création de la Banque agricole (LBA) et de la CNCAS.

L'assureur rappelle que cette dernière a pour mission d'apporter plus de sécurité aux investissements dans des secteurs tels que l'agriculture et l'élevage, de concert avec la Banque agricole.

La Compagnie nationale d'assurance agricole garantit le paiement d'indemnités à l'éleveur assuré si la mortalité de son bétail est liée aux risques suivants : mort naturelle ou accidentelle et abattage autorisé.

« Nous faisons aussi du benchmarking, de l'éducation financière car on oriente notre cible vers une stratégie plus porteuse », explique Djibril Diop.

La CNCAS incite également les acteurs à se regrouper en mutuelles ou coopératives de crédit et d'épargne « pour pouvoir soutenir l'activité et faire face à des périodes de soudure qui les poussent en général à brader leurs marchandises. »

L'Etat du Sénégal, en subventionnant les primes d'assurance, « fait savoir à l'éleveur et à l'agriculteur qu'il n'est pas seul [...] Ce qui est une façon de les autonomiser », selon Djibril Diop.

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