Alors qu'il devait comparaître ce mercredi 17 janvier devant le tribunal correctionnel de Freetown pour son rôle présumé dans la tentative de coup d'État du 26 novembre, les avocats d'Ernest Bai Koroma ont déposé une requête en parallèle auprès de la Haute Cour de justice pour demander sa remise en liberté sous caution, laquelle a été accordée.
Après une longue journée d'attente, la Haute Cour a finalement tranché en faveur de la défense. Les avocats d'Ernest Bai Koroma avaient fait valoir l'état de santé de l'ex-chef de l'État, âgé de 70 ans, demandant qu'il soit transféré au Nigeria pour des soins médicaux. Le feu vert de la Cour met donc fin à six semaines d'assignation à résidence de l'ancien président. Depuis plusieurs semaines, la Cédéao plaidait aussi en ce sens.
Cette décision soulève des interrogations quant à la poursuite de son procès. Selon nos sources, l'ex-chef de l'État a été autorisé à quitter le pays pendant 90 jours.
Le 3 janvier, Ernest Bai Koroma a été inculpé de quatre infractions, dont trahison et dissimulation de trahison, en lien avec la tentative du coup d'État du 26 novembre. Des événements ayant fait plus de 20 morts. Celui qui a dirigé la Sierra Leone de 2007 à 2018 nie toute responsabilité. Son procès intervient dans un contexte tendu. Freetown est encore marqué par une crise politique qui a suivi la réélection contestée du président Julius Maada Bio. Les avocats de Koroma dénoncent un « procès politique » contre leur client : « un ancien chef d'État démocratiquement élu » et accusent Maada Bio de « créer un dangereux précédent ».
Les efforts diplomatiques de la Cédéao
La suspension du procès de l'ancien président est aussi une victoire pour la Cédéao, qui depuis plusieurs semaines intensifie les efforts diplomatiques. En un mois, la Cédéao a effectué deux visites en Sierra Leone. La dernière date du 11 janvier. Le président de la Commission, Dr Omar Alieu Touray, s'est rendu sur place pour discuter avec le gouvernement d'un exil temporaire de l'ex-président au Nigeria.
Ce même objectif était déjà à l'ordre du jour le 23 décembre, lorsqu'une délégation de la Cédéao, menée par les présidents sénégalais et ghanéen, avait rencontré Ernest Bai Koroma et le président en exercice Julius Maada Bio. Il faut dire que le sort de l'ex-chef de l'État inquiète le bloc régional, désireux d'éviter une nouvelle instabilité dans la région après une multiplication de coups d'État.
Pour les experts, le transfert d'Ernest Bai Koroma hors du pays permettrait d'apaiser les tensions de ces derniers mois. Selon eux, les poursuites contre lui et d'autres opposants ont nourri le sentiment chez certains Sierra-Léonais d'une persécution de l'opposition.
Signe de ces tensions, la presse sierra-léonaise faisait état ce mercredi de possibles manifestations contre le gouvernement, faisant craindre de nouveaux débordements. Des forces de sécurité ont été déployées dans la capitale. Lors de son dernier sommet, la Cédao a annoncé le déploiement d'une force de stabilisation « pour garantir la protection de la paix ». Elle devrait être opérationnelle dans les jours qui viennent.