Afrique: Face à la crise au Soudan et aux tensions Éthiopie-Somalie, l'Igad peine à reprendre la main

Le sommet extraordinaire de l'Igad organisé en Ouganda s'est terminé jeudi 18 janvier. L'autorité intergouvernementale pour le développement, qui rassemble sept pays d'Afrique de l'Est, avait un programme chargé. Au menu : deux crises majeures. La forte tension diplomatique entre l'Éthiopie et la Somalie depuis qu'Addis-Abeba a signé un accord avec le Somaliland, territoire autoproclamé indépendant, que Mogadiscio ne reconnaît pas. Ensuite, la guerre au Soudan depuis avril. En l'absence de plusieurs belligérants, l'organisation a fait ce qu'elle a pu pour reprendre la main

Difficile d'obtenir une paix lorsque tout le monde n'est pas autour de la table. L'Éthiopie n'était pas présente, officiellement, à cause d'un conflit d'emploi du temps. Le chef de l'armée soudanaise, le général al-Burhan, avait lui annoncé son boycott du sommet, car l'Igad avait invité son ennemi juré, le général Hemedti.

Dans ces conditions, l'Igad a néanmoins fait ce qu'elle a pu pour relancer les initiatives de paix. Concernant le Soudan, elle a rappelé les engagements, les promesses des belligérants, leur demandant de se rencontrer face à face d'ici à 14 jours. « Le Soudan n'appartient pas aux parties en conflit, mais au peuple », ont indiqué les États membres.

Le secrétariat de l'Igad est chargé de réviser la feuille de route adoptée en juin dernier, mais non suivie d'effet, et d'établir un calendrier clair pour que d'ici à un mois, un nouveau processus de paix soit convoqué, processus mené par les Soudanais. Une tâche très délicate tant la situation sur le terrain est désastreuse et l'antagonisme entre les généraux est fort.

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« La guerre au Soudan, nous la décrivons comme injuste, a déclaré le président ougandais Yoweri Museveni. Nous, combattants de la liberté, nous sommes très attentifs à cela. Quand on se battait pour la liberté durant les guerres anticoloniales, il s'agissait de guerres justes, car nous combattions pour la justice, et on ne pouvait pas l'atteindre par d'autres moyens. Nous pensons donc vraiment que les belligérants doivent immédiatement arrêter de se battre. »

L'UA met en place un panel de haut niveau pour le Soudan L'Union africaine a annoncé, mercredi dans un communiqué, la mise en place d'un panel de haut niveau pour la résolution de la crise au Soudan. Il est composé de trois éminentes personnalités africaines. Présidé par Mohamed Ibn Chambas, haut représentant de l'UA, il regroupe l'ancienne vice-présidente de l'Ouganda, Speciosa Indira-Kazibwe, et Francisco Madeira, l'ancien représentant de l'UA en Somalie.

Ce haut comité pour le Soudan prend effet immédiatement pour « faire taire les armes ». Les membres du comité « travailleront avec toutes les parties soudanaises » civiles et militaires, pour restaurer rapidement la paix et la sécurité au Soudan. Selon le communiqué : Ils travailleront en coordination avec l'Igad, l'ONU et la Ligue arabe.

Malgré les efforts fournis par ces différentes instances régionales et internationales, depuis 10 mois, les affrontements au Soudan n'ont fait que s'aggraver. La relation entre Khartoum et l'Igad s'est crispée dernièrement et le processus de Jeddah est à l'arrêt. Une occasion pour un retour de l'UA sur ce dossier objet de forte concurrence entre différents médiateurs.

En avril dernier, quelques heures seulement après le début de la guerre, le Conseil de paix et sécurité de l'UA avait décidé d'envoyer une délégation à Khartoum, mais celle-ci a été empêchée pour des raisons sécuritaires. L'UA s'était engagée au Soudan depuis la chute du président el-Béchir en 2019 en faisant partie du comité tripartite aux côtés des Nations unies et de l'Igad qui cherchaient à rapprocher les parties civiles et militaires. En janvier 2022, Moussa Faki, le président de la Commission de l'Union africaine, a présenté au général al Burhan un plan visant à sortir de la crise, mais sans succès.

L'Igad a pris le parti de Mogadiscio

Quant aux tensions Éthiopie-Somalie, sans surprise, l'Igad a pris le parti de Mogadiscio, rappelant les « principes cardinaux de souveraineté, unité et intégrité territoriale » du pays. « Toute action doit respecter ces principes. Tout accord doit se faire avec le consentement somalien », ont déclaré les États membres. Toutefois, l'Igad demande ainsi aux deux parties de s'engager dans une désescalade et de lancer un dialogue constructif.

« Nous sommes profondément préoccupés, a souligné Mahmoud Ali Youssouf, ministre djiboutien des Affaires étrangères. Nous réaffirmons comme principes cardinaux, le respect de la souveraineté, de l'unité et de l'intégrité territoriale de la Somalie. Toute action, tout accord doit se faire avec la Somalie. Nous demandons ainsi à l'Éthiopie et à la Somalie de s'engager dans une désescalade et un dialogue constructif. »

Cette crise toute récente inquiète particulièrement les États-Unis. Jeudi, leur envoyé spécial a estimé qu'elle pouvait perturber la lutte contre les terroristes shebabs. Selon Mike Hammer, les islamistes utiliseraient même l'accord entre Addis-Abeba et le Somaliland pour recruter de nouveaux membres.

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