Comores: Les tensions perdurent, l'opposition appelle à manifester

L'opposition appelle la population à une grande manifestation ce vendredi 19 janvier. La journée de jeudi a encore été marquée par des heurts entre protestataires et forces de l'ordre, particulièrement dans la capitale Moroni. De sources médicales, un manifestant a été tué jeudi par balles et au moins cinq autres blessés, par balles, eux aussi, dont un grave. Les forces de l'ordre ont aussi procédé à de nombreuses arrestations, aucun chiffre officiel n'a été communiqué.

Le mouvement de protestation a débuté mercredi matin, suite à l'annonce des résultats de la présidentielle de dimanche. Azali Assoumani a été réélu avec 62,97% des voix et un taux de participation de 16,30%. Mais l'opposition dénonce « une grossière fraude », pointant l'écart entre les 190 000 votants pour les élections des gouverneurs et les 55 000 pour la présidentielle, alors que les deux scrutins étaient couplés. Moroni est depuis le théâtre d'émeutes urbaines, qui paralysent la capitale. Et les manifestants semblent déterminés à ne pas s'arrêter.

Ils jettent des pierres sur les forces de l'ordre, dressent des barricades avec des pneus, des branches ou des carcasses de véhicules. Et ces jeunes manifestant assurent ne pas être près de s'arrêter. Comme Saïd - un nom d'emprunt - rencontré dans le quartier de Magoudjou. « Dans la rue ce matin, on a commencé à jeter des pierres. Mais la police est arrivée sur la route pour disperser les gens. On continue le combat, on reste sur la route jusqu'à la fin pour que le président Azali s'en aille. »

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Des bâtiments publics et privés ont été incendiés. La route entre Moroni et l'aéroport est jonchée de barricades. Youssouf tient à se justifier. « On a barricadé la route, on a affronté les gendarmes. Le président, ce n'est pas celui qu'on veut. L'État est là pour nous protéger et attraper les voleurs. Notre président a volé les votes, les résultats ». Youssouf estime que cette mobilisation est le seul moyen de se faire entendre, « parce que le président a pris tous les pouvoirs de ce pays, même la justice. On va continuer jusqu'à ce qu'il sorte. »

On a barricadé la route, on a affronté les gendarmes. Le président, ce n'est pas celui qu'on veut. L'État est là pour nous protéger et attraper les voleurs. Notre président a volé les votes, les résultats

David Baché L'opposition soutient le mouvement de protestation

Les cinq candidats d'opposition appellent désormais la population à faire de ce vendredi « une journée nationale de protestation et de dénonciation de la mascarade électorale » d'Azali Assoumani. Ils demandent aux Comoriens de « soutenir le sursaut de résistance engagé par la jeunesse » en organisant des manifestations, après la grande prière, « dans les villes et les villages » du pays.

« Ceux qui ne sont pas éloignés des routes doivent » les « investir », demandent encore les opposants, qui sollicitent implicitement le soutien de l'armée en soulignant « l'esprit de pondération » de l'état-major des forces comoriennes.

Jusqu'ici, les cinq candidats d'opposition n'avaient jamais lancé un tel appel. Aujourd'hui encore, ils présentent les évènements des derniers jours comme une révolte spontanée qu'ils n'auraient pas initié, à laquelle ils entendent se joindre pour obtenir « l'annulation pure et simple des élections. »

Sollicité par RFI, le porte-parole du gouvernement réagit : « l'objectif affiché est de créer des troubles et de soutenir des actes de violences. » Houmed Msaidié, également directeur de campagne du président Azali Assoumani, prévient : « l'État ne peut pas permettre cela. »

Les observateurs de l'Union africaine, dont le chef de l'État comorien Azali Assoumani est actuellement le président en exercice, qui avaient jugé le processus électoral globalement « libre » et « transparent », ont reconnu avoir initié une tentative de médiation, apparemment sans réussite. Les opposants leur demandent d'ailleurs de « reconsidérer » leurs conclusions, qui dénotent selon eux « une complicité coupable à la série d'irrégularités et magouilles orchestrées par le pouvoir. »

Ce vendredi, les Comoriens s'attendent à une journée mouvementée. Jeudi, l'immense majorité des commerces ont gardé leurs portes fermées, ce qui pose déjà des difficultés aux habitants.

La situation est vraiment très précaire, je n'ai jamais vécu cette situation parce que tout au long, j'ai parcouru le tout Moroni, je n'ai vu aucune boutique ouverte. Tout est fermé.

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